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Rapport d'enquête maritime A93W0204

Panne moteur et perte de maîtrise
Arctic Wings and Rotors
Pilatus Britten-Norman BN2A-20 Islander C-GMOP
Tuktoyaktuk (Territoires du Nord-Ouest)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le pilote et ses passagers effectuaient un vol à vue de nuit entre Tuktoyaktuk et Inuvik (Territoires du Nord-Ouest). Environ quatre minutes après le décollage, le pilote a déclaré à la station d'information de vol (FSS) de Tuktoyaktuk qu'il avait des problèmes avec un moteur et qu'il retournait à l'aéroport. Comme l'avion tardait à arriver, des recherches aériennes et au sol ont été déclenchées. L'épave a été repérée trois heures plus tard sur la surface gelée d'un lac à huit milles environ au sud-est de l'aéroport. Tous les occupants ont péri dans l'accident.

Le Bureau a déterminé que l'accouplement à déclic d'une magnéto était usé au-delà des limites prescrites et a provoqué la panne du moteur droit. Après la panne, le pilote a mal compensé la direction et n'a pas pu garder la maîtrise de l'appareil.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le 3 décembre 1993, le Britten-Norman BN2A-20 Islander, immatriculé C-GMOP, exploité par son propriétaire Arctic Wings and Rotors, est parti de Tuktoyaktuk (Territoires du Nord-Ouest) pour un vol selon les règles de vol à vue (VFR) Note de bas de page 1 de nuit à destination de la piste municipale d'Inuvik (Territoires du Nord-Ouest). Il y avait un pilote et six passagers à bord. Le pilote a décollé de la piste 09 à 17 h 6 min 34 s, heure normale des Rocheuses (HNR) Note de bas de page 2, et il avait fait tourner l'avion vers le sud quand le moteur droit (Textron Lycoming IO-540-K1B5) est tombé en panne (voir l'annexe A).

À 17 h 10 min 40 s, le pilote a signalé à la station d'information de vol (FSS) de Tuktoyaktuk qu'il avait des problèmes avec un moteur et qu'il essayait de retourner à l'aéroport. À 17 h 11 min 44 s, il a déclaré qu'il se dirigeait vers l'aéroport. À 17 h 11 min 58 s, il a signalé que ses indicateurs affichaient six milles de l'aéroport en rapprochement. Le spécialiste de la FSS lui a demandé s'il déclarait une urgence, mais le pilote était indécis. Pendant le dernier appel radio, la voix du pilote était tendue, mais il n'a donné aucun autre détail sur la nature du problème. Le pilote n'a pas signalé son altitude pendant ses communications avec la FSS. Le dernier appel a duré une quinzaine de secondes et a pris fin à 17 h 13 min 3 s.

Comme l'avion tardait à arriver à l'aéroport, des recherches aériennes et au sol ont été lancées. L'appareil a été retrouvé sur la surface gelée d'un lac à huit milles environ au sud-est de l'aéroport. Il s'était écrasé en piqué prononcé sur la glace. Les moteurs et l'avant de l'appareil avaient passé au travers de la glace de deux pieds d'épaisseur environ. Le reste du fuselage, les ailes et l'empennage reposaient sur la glace. Les sept occupants ont subi des blessures mortelles.

L'accident s'est produit de nuit vers 17 h 13 HNR, par 69° 20′ de latitude Nord et 132° 56′ de longitude Ouest Note de bas de page 3, à 50 pieds-mer environ.

1.2 Victimes

Équipage Passagers Tiers Total
Tués 1 6 - 7
Blessés graves - - - -
Blessés légers/ indemnes - - - -
Total 1 6 - 7

1.3 Dommages à l'aéronef

L'avion a été détruit.

1.4 Autres dommages

Aucun.

1.5 Renseignements sur le personnel

Pilote
Âge 27 ans
Licence pilote de ligne
Date d'expiration du certificat de validation 1er mai 1994
Nombre total d'heures de vol 3 224
Nombre total d'heures de vol sur type en cause 848
Nombre total d'heures de vol dans les 90 derniers jours 298
Nombre total d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours 208
Nombre d'heures de service avant l'événement 8
Nombre d'heures libres avant la prise de service 12

Le pilote était titulaire d'une licence valide et d'une qualification de vol aux instruments de classe I. Il était en place gauche et aux commandes au moment de l'accident. Il n'y avait personne en place droite.

Le pilote avait obtenu sa licence de pilote privé en 1986, sa licence de pilote professionnel en mars 1987, sa qualification sur hydravions en mai 1987 et ses qualifications sur multimoteurs et de vol aux instruments en avril 1988. Pendant sa formation la plus récente sur le PA-31 Navajo, le chef pilote l'avait qualifié de très professionnel et il avait indiqué qu'il semblait maîtriser parfaitement toutes les procédures.

Le pilote avait effectué sa dernière vérification de compétence pilote (PPC) sur l'Islander le 30 avril 1993. Son dernier vol de contrôle de compétence et pour le renouvellement de sa qualification de vol aux instruments s'était déroulé sur le Piper PA-31 Navajo le 25 novembre 1993.

Le pilote avait déjà piloté les Islander quand il était au service d'un autre employeur dans le nord de la Colombie-Britannique. Il travaillait pour le compte d'Arctic Wings and Rotors depuis avril 1993. L'examen du carnet de bord de l'avion a révélé que dans les quatre derniers mois le pilote avait effectué 406 heures de vol environ sur le Cessna 185, le Cessna 207, le Piper PA-32 Cherokee Six, le Piper PA-31 Navajo, ainsi que sur les deux Britten-Norman BN2A-20 Islander.

Le pilote n'avait jamais reçu de formation de nuit sur type sur le BN2A. L'alinéa 46(1)b)(iii) de l'Ordonnance sur la navigation aérienne (ONA) série VII no 3 stipule que la formation en vol qu'un transporteur aérien dispensera à tout pilote avant de l'employer en qualité de membre d'un équipage de conduite à bord d'un avion multimoteur comprendra, pour chaque type d'avion que ce pilote est appelé à piloter, une instruction relative aux décollages et atterrissages de nuit s'il est appelé à voler de nuit. La dernière formation au vol de nuit que le pilote avait reçue avait eu lieu le 20 novembre 1993 sur le PA-31. Le pilote avait peu d'expérience du vol aux instruments (IFR) et n'avait jamais reçu de formation IFR sur le BN2A. Aucun autre point relatif au vol de nuit, comme les procédures à suivre dans le cas d'une situation d'urgence la nuit, n'est mentionné comme entraînement obligatoire dans l'ONA ci-dessus mentionnée.

Le pilote, semble-t-il, avait de bonnes habitudes de sommeil, et il s'était reposé suffisamment la nuit précédente. Il souffrait d'asthme bronchique qu'il traitait au besoin à l'aide de médicaments sur ordonnance et d'inhalateurs. Il était respecté de ses collègues qui l'ont décrit comme un homme dévoué, bien organisé et consciencieux, qui adorait piloter et dont les compétences étaient à jour sur les avions qu'il pilotait.

1.5.1 Horaire de travail du pilote

Le jour de l'accident, le premier vol du pilote était un vol aller-retour entre Inuvik et Tuktoyaktuk. L'avion était parti d'Inuvik à 12 h 45 où il était revenu se poser à 14 h 5. Le deuxième vol (le vol de l'accident) était également un vol aller-retour entre Inuvik et Tuktoyaktuk, et devait partir à 16 h. Le pilote avait effectué 2,2 heures de vol ce jour-là, et son temps de service était d'environ huit heures (période entre une heure avant le départ et une demi-heure après le retour à la base). Apparemment, le pilote s'était couché à 22 h 30 la veille, puis il s'était levé à 7 h 20 et avait pris un petit déjeuner.

La veille, le 2 décembre, il avait effectué 3,1 heures de vol et avait été de service pendant environ 12,5 heures. Le 1er décembre, il avait effectué 2,9 heures de vol et avait été de service pendant 11 heures environ. Le 30 novembre, il avait effectué 9,7 heures de vol et avait été de service pendant 15 heures.

Il avait effectué 93 heures de vol dans les 30 derniers jours, et 298 heures dans les 90 derniers jours. L'examen du carnet de bord de l'avion a révélé que le pilote n'avait pas piloté pendant 13 jours depuis le 1er août. Le dernier jour qu'il n'avait pas piloté est le 11 novembre.

Les jours de repos étaient irréguliers et imprévus, d'ordinaire établis en fonction de la charge de travail saisonnière. Les jours où il était prévu que le pilote n'avait aucun vol à effectuer étaient considérés des jours de repos. La plupart des pilotes de la compagnie étaient logés dans un local adjacent à la base d'opérations, et ils étaient prêts à effectuer un vol après un bref préavis. Il arrivait qu'un pilote reprenne son service et effectue un vol même s'il n'avait pas prévu voler ce jour-là. Règle générale, cela ne se faisait qu'après entente préalable entre le pilote et la compagnie.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

Constructeur Pilatus Britten-Norman Limited
Type BN2A-20 Islander
Année de construction 1974
Numéro de série 398
Certificat de navigabilité Délivré
Nombre total d'heures de vol cellule 9 391
Type de moteur (nombre) Lycoming IO-540-K1B5 (2)
Type d'hélice (nombre) Hartzell HC-C2YK-2CUF (2)
Masse maximale autorisée au décollage 6 600 lb
Type(s) de carburant recommandé(s) essence aviation 100-130
Type de carburant utilisé essence aviation 100 LL

1.6.1 Dossiers de l'aéronef

La compagnie exploitait l'aéronef depuis février 1993. Avant cette date, l'avion avait été loué à un autre exploitant d'Inuvik. L'examen des dossiers d'entretien et des documents de bord de l'aéronef a révélé qu'il n'y avait pas d'anomalies à corriger. Le carnet de bord de l'avion a été trouvé dans l'eau pendant l'enquête sur les lieux et on l'a laissé sécher. Certaines entrées avaient été faites à l'encre soluble et étaient illisibles. Les dernières entrées dans les livrets techniques de l'avion avaient été faites le 13 octobre 1994, 116 heures avant l'accident.

Les dossiers de l'avion et les dossiers d'entretien étaient incomplets, et il n'a pas été possible d'établir si une anomalie avait déjà été signalée, corrigée, ou différée, ni de déterminer qui avait effectué les travaux d'entretien et quels composants avaient été réparés ou changés. Ni document ni feuille de travail n'ont été trouvés faisant état des travaux d'entretien et des changements de composants effectués entre les inspections.

L'examen du carnet de bord de l'avion a révélé que le C-GMOP avait fait l'objet d'une inspection des 100 heures le 7 novembre 1993 après 9 313,0 heures en service, et qu'il avait fait l'objet d'une inspection des 50 heures le 2 décembre 1993 après 9 385,1 heures en service.

1.6.2 Calculs de la masse et du centrage

On a calculé que la masse de l'avion au moment de l'accident était de 6 200 livres environ et que le centrage se trouvait dans les limites prescrites, soit à 23,9 pouces à l'arrière de la référence. Les limites de centrage sont 20,9 et 25,6 pouces à l'arrière de la référence.

1.6.3 Performances de l'avion

La compagnie Pilatus Britten-Norman a fourni des données sur les performances de l'aéronef qu'elle a obtenues pendant un vol d'essai et à l'aide de calculs, à une température de moins 19 °C.

À la masse maximale de 6 200 livres, la vitesse de décrochage prévue et la vitesse minimale de contrôle en vol (VMCA) sur un seul moteur, volets à la position de décollage, sont presque les mêmes. À altitude constante, lorsque les moteurs tournent au ralenti (aucune donnée n'est disponible pour les vitesses de décrochage moteur à grand régime), la vitesse de décrochage serait de 48 noeuds si les ailes étaient à l'horizontale, de 50 noeuds avec une inclinaison de 20 degrés, et de 57 noeuds avec une inclinaison de 40 degrés.

Si la masse maximale de l'avion est peu élevée, l'avion atteint la VMCA avant la vitesse de décrochage, et si sa masse est élevée, le décrochage se produit avant que la VMCA ne soit atteinte. Selon l'avionneur, si la vitesse de l'avion descend au-dessous de la VMCA et si l'avion n'est pas déjà en décrochage, l'appareil se met alors en virage lent, sans incidences soudaines néfastes.

À 6 200 livres, le taux de montée sur un seul moteur est évalué à 315 pieds par minute (pi/min) environ à 60 noeuds, et à 360 pi/min à 70 noeuds. L'information fournie par l'avionneur indique qu'une accumulation de givre de 1/16 à 1/8 de pouce d'épaisseur ne risque pas de nuire aux caractéristiques de vol de l'avion au cours d'un vol normal.

1.6.4 Procédures de vol sur un seul moteur

L'article 4 (Procédures d'exploitation en cas d'urgence) du manuel du propriétaire du Britten-Norman recommande la procédure suivante en cas de panne d'un moteur après le décollage :

pour les deux moteurs, afficher la puissance de décollage, régler le mélange à la richesse maximale, identifier le moteur en panne, mettre le levier de mélange correspondant sur IDLE CUT-OFF, mettre en drapeau l'hélice du moteur en panne, s'assurer que l'interrupteur de la génératrice du moteur qui fonctionne est sur ON, laisser la vitesse indiquée monter jusqu'à 65 noeuds (meilleur taux de montée sur un seul moteur), rentrer les volets, et régler la compensation de la direction pour la montée.

1.7 Renseignements météorologiques

1.7.1 Situation météorologique générale

Le centre météorologique de l'Arctique du Service de l'environnement atmosphérique a fourni une analyse des conditions météorologiques couvrant la période entourant l'accident, pour les régions d'Inuvik et de Tuktoyaktuk. Le faible creux barométrique en surface d'un système dépressionnaire s'étendait du nord de l'île Barter (Alaska) vers le sud-est en passant par Tuktoyaktuk jusqu'à l'est du Grand Lac des Esclaves. Le creux se déplaçait vers le nord-est à cinq noeuds environ et était toujours faible. Dans la matinée et en début d'après-midi, des nuages épars ont été observés à Tuktoyaktuk. À 13 h, la base des nuages se trouvait à 700 pieds, et à 15 h, elle était à 1 100 pieds, et les sommets atteignaient 1 800 pieds. Au moment de l'écrasement, les conditions étaient les mêmes, avec des vents légers en surface du sud-ouest.

1.7.2 Observations horaires

L'observation météorologique de 17 h à Tuktoyaktuk faisait état des conditions suivantes : ciel couvert à 1 100 pieds mesuré par avion, visibilité de 15 milles, neige légère, vent du 200 degrés vrai à huit noeuds, température moins 19 °C, point de rosée moins 21 °C, et calage altimétrique 29,65 pouces de mercure.

L'observation météorologique de 17 h à l'aéroport d'Inuvik (à six milles au sud-est du village et à 210 pieds plus haut) faisait état des conditions suivantes : ciel couvert à 500 pieds mesuré par ballon, visibilité de six milles, brouillard glacé, température moins 23 °C, point de rosée moins 27 °C et vents calmes. Le pilote a été mis au courant de la météo à Inuvik par le spécialiste de la FSS, pendant qu'il circulait au sol en vue du décollage.

Le crépuscule civil (début de l'obsécuritéé) le 3 décembre 1993 s'est produit à 16 h 23.

1.7.3 Rapports de pilotes

À l'atterrissage à l'aéroport de Tuktoyaktuk, le pilote de l'Islander a signalé à la FSS que la base des nuages était à environ 1 100 pieds-sol. Un autre pilote, une heure plus tôt environ, avait déclaré que la base des nuages se trouvait à 1 100 pieds et que les sommets de la couche nuageuse atteignaient 1 800 pieds.

1.7.4 Vol VFR de nuit

Par une nuit avec ciel couvert sans horizon visible, le pilote n'a pour ainsi dire aucun repère visuel à sa disposition. C'est un peu comme voler dans des conditions de vol aux instruments (IMC) parce que le pilote doit surveiller attentivement ses instruments de vol.

Le paragraphe 2.1 intitulé «Les minimums météorologiques en vol VFR» du Rapport sur le vol VFR dans des conditions météorologiques défavorables.publié en 1990 par le BST stipule ce qui suit :

La réglementation canadienne applicable aux vols commerciaux est, à bien des égards, plus sévère que celle qui s'applique aux vols privés. Toutefois, les critères régissant les minimums météorologiques applicables aux aéronefs commerciaux effectuant des vols VFR de jour sont les mêmes que ceux réglementant tous les autres vols VFR, ce qui met en danger la vie d'un grand nombre de passagers payants.

Cette observation s'applique davantage aux vols VFR de nuit.

1.7.5 Vols commerciaux VFR de nuit

Les pilotes volent en VFR ou en IFR. Les vols VFR de nuit ne posent aucun danger pourvu que les repères visuels et la visibilité en vol soient suffisants pour voler en fonction de l'horizon et du relief. Il arrive parfois que les repères nécessaires pour voler de nuit ne soient pas disponibles. Même quand la visibilité est bonne la nuit, il peut être difficile de naviguer à l'aide de références visuelles au-dessus d'un terrain sombre ou dont l'éclairage est clairsemé.

Le pilote qui vole la nuit et se retrouve dans des conditions où il y a peu de repères visuels évidents doit posséder les compétences nécessaires pour voler aux instruments. Il doit donc avoir reçu une formation de vol aux instruments convenable. Le Manuel de pilotage.de Transports Canada précise, à la page 189, qu'il peut être difficile de voler la nuit à l'aide de repères aux sol ou sur l'eau :

Le vol de nuit exige du pilote qu'il s'adapte à un environnement relativement différent, en particulier à l'extérieur du poste de pilotage. Les points de référence comme l'horizon, les particularités topographiques et même le sol, tous apparemment si vitaux pour déterminer les assiettes de l'avion pendant le vol de jour, sont indistincts, obscurs et parfois invisibles.

Les vols commerciaux effectués en IFR par des aéronefs dont la masse est égale ou inférieure à 12 500 livres doivent satisfaire aux normes décrites dans la partie IV, alinéa 39(3), de l'ONA série VII no 3 ( Ordonnance concernant les normes et procédures régissant l'utilisation, par les transporteurs aériens, d'avions petits porteurs.. Cette norme exige un équipage à deux pilotes ou, en vertu de l'alinéa 1(b) Note de bas de page 4 de l'annexe C, un pilote et un pilote automatique à deux axes. Les vols commerciaux effectués de nuit en VFR ne sont pas visés par ces normes; toutefois, les pilotes doivent posséder la qualification de vol aux instruments, et les aéronefs du transporteur doivent emprunter les voies aériennes, les routes aériennes ou les routes de compagnie.

1.7.6 Milieu de formation et milieu opérationnel

La formation d'un pilote, jusqu'au niveau acceptable pour un petit transporteur aérien, est constituée d'exercices pratiques et de procédures d'urgence simulées. Lors d'un vol en double commande ou en compagnie d'un instructeur, le pilote est généralement prêt à affronter des situations anormales, et il s'attend à devoir démontrer comment il réagit pendant les exercices d'urgence.

En revanche, les situations d'urgence et anormales en vol sont réelles et imprévues. L'urgence sur l'Islander est survenue la nuit dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC) à la limite de l'acceptable, avec pour ainsi dire aucun repère visuel, et probablement alors que l'horizon n'était pas visible.

1.7.7 Exigences de formation (ONA série VII no 3 et no 2)

Les exigences de formation que les transporteurs aériens doivent respecter en vertu de l'ONA série VII no 3 sont différentes des exigences plus détaillées de l'ONA série VII no 2 ( Ordonnance concernant les normes et procédures applicables aux transporteurs aériens utilisant de gros avions.. Certains éléments sont obligatoires en vertu de l'ONA série VII no 2, mais ne le sont pas en vertu de l'ONA série VII no 3 : interruptions de décollages à partir de 50 pieds-sol et simulation de conditions IFR à partir de 100 pieds-sol; démonstration de la connaissance de la route empruntée, vérifications en route et maintien de compétence en route; contrôle de compétence pilote tous les six mois et certaines évaluations dans des conditions de vol IFR réelles ou simulées; démonstration de l'habileté du pilote à effectuer des approches indirectes, démonstration de l'habileté du pilote à effectuer des approches interrompues par suite d'une panne du moteur critique dans des conditions IFR simulées, ou dans un simulateur.

Les pilotes de bimoteurs comme le BN2A, visés par l'ONA série VII no 3, sont tenus de recevoir annuellement sur type une formation en vol d'une heure et demie. Les pilotes qui ne sont pas formés d'après les exigences plus détaillées de l'ONA série VII no 2 courent plus de risques de se retrouver dans des situations en vol pour lesquelles ils n'ont jamais pu s'entraîner réellement.

Normalement, le pilote professionnel qui pilote de petits appareils multimoteurs commerciaux doit subir un contrôle de compétence sur chaque type d'aéronef dans le cadre d'une PPC annuelle administrée par Transports Canada; toutefois, Transports Canada peut accorder à un transporteur un regroupement d'aéronefs aux fins des PPC. Dans le cadre du regroupement d'aéronefs, le pilote qui subit avec succès une PPC sur un aéronef obtient l'autorisation de piloter au plus deux autres types d'appareils multimoteurs. Le pilote devrait ensuite, chaque année consécutive, subir sa PPC annuelle sur un type d'avion autre que celui qu'il pilote. L'exploitant à qui est accordé un regroupement d'aéronefs est quand même tenu de dispenser de la formation au sol et de l'instruction en vol sur chaque type d'aéronef.

La lettre de politique no 9 de Transports Canada décrit la politique en matière de regroupement des aéronefs. Cette lettre stipule que pour effectuer le regroupement des types et des modèles d'avions aux fins des PPC, on se fonde sur les similitudes générales des performances et des caractéristiques de vol des aéronefs. En vertu de la politique de regroupement de Transports Canada, il n'est pas obligatoire que des facteurs comme les systèmes de l'aéronef, les limitations, l'aménagement du poste de pilotage ou le fonctionnement des commandes soient pris en compte avant le regroupement.

Il existe une liste approuvée des regroupements d'aéronefs dont la masse maximale certifiée au décollage (MCTOW) est supérieure à 7 000 livres; toutefois, il n'existe pas de liste approuvée pour les aéronefs dont la MCTOW est inférieure à 7 000 livres, et seules des directives générales sont données pour le regroupement des aéronefs. Chaque directeur régional de la Direction des transporteurs aériens de Transports Canada peut faire le regroupement d'aéronefs dont la MCTOW est inférieure à 7 000 livres.

Dans le cas qui nous occupe, l'exploitant avait obtenu un regroupement des aéronefs BN-2 Islander et Navajo PA-31; par conséquent, comme le pilote avait subi avec succès une PPC sur le Navajo PA-31 la semaine précédant l'accident, il avait par le fait même satisfait aux exigences de contrôle de compétence pour le Islander. Or, le BN-2 Islander et le Navajo PA-31 possèdent des caractéristiques de vol fort différentes. Le PA-31 Navajo a des ailes basses, un train d'atterrissage escamotable, des performances de montée et en croisière de beaucoup supérieures, et sa VMCA sur un seul moteur peut descendre à 78 noeuds. Par contre, le Islander a des ailes hautes, un train d'atterrissage fixe, et sa vitesse de croisière et sa VMCA sont inférieures d'une trentaine de noeuds à celles du Navajo.

1.8 Aides à la navigation

L'aéroport de Tuktoyaktuk est desservi par un radiophare non directionnel (NDB) qui sert d'aide à l'approche vers la piste 09, comme le précise le Canada Air Pilot. L'avion était équipé d'un système de positionnement mondial (GPS) Trimble, et n'avait pas de pilote automatique.

1.9 Télécommunications

Les communications entre le pilote et la FSS de Tuktoyaktuk se sont déroulées de façon satisfaisante.

1.10 Renseignements sur l'aérodrome

L'aéroport de Tuktoyaktuk est situé à côté du hameau de Tuktoyaktuk. Son point de référence se situe à 15 pieds-mer. La piste 09/27 est orientée au 088 (09) et au 268 (27) degrés magnétique. Elle mesure 5 000 pieds de longueur sur 150 pieds de largeur, et sa surface est en gravier. Elle est équipée de feux d'extrémité de piste et de feux de bord et d'extrémité de piste ainsi que de feux de seuil de piste moyenne intensité. Un indicateur visuel de pente d'approche (VASIS) à deux barres est installé aux deux extrémités de la piste. Il semble que le balisage lumineux fonctionnait normalement.

1.11 Enregistreurs de bord

L'aéronef n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur phonique (CVR). La réglementation en vigueur n'imposait pas l'emport d'enregistreurs de bord pour ce type d'aéronef.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

1.12.1 Épave

L'avion a heurté la glace sous un angle d'environ 65 degrés en piqué tout en pivotant vers la droite. La section avant de l'appareil, les deux moteurs et les hélices sont passés au travers de la glace et se sont enfoncés sous l'eau. Les deux moteurs ont été arrachés de leurs bâtis, mais ils étaient encore fixés aux ailes par leurs fils et leurs câbles de commande. Les hélices sont restées fixées aux moteurs. L'hélice droite a été trouvée à la position en drapeau et ses pales étaient légèrement endommagées. La manette des gaz du moteur droit était au ralenti, et le levier de commande de l'hélice droite était à la position drapeau. Les dommages et la torsion des pales de l'hélice gauche indiquent que le moteur gauche fournissait une puissance considérable à l'impact. La manette des gaz et le levier de commande d'hélice du moteur gauche étaient respectivement à la position pleins gaz et régime élevé.

À l'impact, le bord d'attaque de l'aile droite a laissé une empreinte dans la neige, avant que son extrémité ne pivote de neuf pieds vers l'arrière. Les réservoirs de carburant des deux ailes se sont rompus, et du carburant s'est répandu devant l'aile gauche et derrière l'aile droite où l'on pouvait voir des tâches de carburant dans la neige. L'avion pivotait donc vers la droite à l'impact. Les ailes sont restées sur la surface gelée, au-dessus du fuselage partiellement submergé.

L'empennage était intact, mais les forces d'impact avaient déplacé le stabilisateur vers l'avant d'une distance suffisante pour rompre la tige de commande du tab de direction qui commande le mécanisme de compensation de la gouverne de direction. L'écrou du tourillon de la tige de commande du tab de direction a été trouvé à un tour de l'extrémité supérieure de son débattement. Il y avait de 1/16 à 1/8 de pouce de givre blanc sur le bord d'attaque du stabilisateur. À cause des dommages qu'ont subi les ailes à l'impact, il a été impossible de déterminer s'il y avait une accumulation similaire de givre sur le bord d'attaque de l'aile.

1.12.2 Examen des instruments

Le Laboratoire technique du BST a examiné l'anémomètre ainsi que le dépressiomètre du gyroscope pour déterminer leurs indications à l'impact. Il y avait deux marques d'impact sur le cadran de l'anémomètre, l'une entre 126 et 128 noeuds, l'autre à 119 noeuds environ.

Sur le dépressiomètre du gyroscope, le bouton inopérant rouge de dépression gauche (moteur gauche) était bloqué derrière le cadran à la position rentrée. Celui de droite (moteur droit) était à la position sortie. Une pression minimale de un pouce de mercure est nécessaire pour faire rentrer le bouton.

1.12.3 Éclairage des instruments

Il semble que l'éclairage de la partie droite du tableau de bord et du tableau supérieur ne fonctionnait pas, et que seule la partie gauche du tableau de bord était éclairée. Un des passagers du vol à destination de Tuktoyaktuk, qui était assis derrière le siège avant droit, a déclaré que le pilote se servait d'une lampe de poche pour lire les instruments de la partie droite du tableau de bord. Il a été impossible de vérifier le circuit d'éclairage à cause des dommages importants au circuit électrique. Aucune anomalie à cet effet n'avait été consignée dans le carnet de bord ni dans les dossiers d'entretien de l'aéronef.

1.12.4 Avertisseur de décrochage

L'avion était équipé d'un avertisseur de décrochage qui pouvait produire un signal sonore et visuel entre quatre et huit noeuds au-dessus de la vitesse de décrochage. Il semble que l'avertisseur ne fonctionnait pas en vol, mais seulement au sol quand le personnel de maintenance le vérifiait. Ni les livrets techniques ni les dossiers d'entretien ne faisaient état d'anomalies ou de mesures correctives à prendre. Après l'accident, il a été impossible de vérifier l'avertisseur en raison des dommages importants causés au bord d'attaque de l'aile et au circuit électrique. Aucun signal sonore de l'avertisseur n'était audible sur la bande magnétique de la FSS.

1.12.5 Examen des moteurs et des hélices

Le Laboratoire technique du BST a analysé la bande magnétique de la FSS de Tuktoyaktuk pour déterminer le régime des hélices pendant le vol. L'analyse spectrale a révélé que le régime des deux hélices était d'environ 2 355 tours par minute (tr/min) lorsque le pilote a signalé qu'il venait de décoller à 17 h 6 min 34 s, et qu'un seul moteur tournait à 2 640 tr/min lorsque le pilote a appelé à 17 h 10 min 40 s pour signaler des problèmes de moteur. Au cours des nombreuses communications qui ont commencé à 17 h 10 min 40 s pour se terminer à 17 h 13 min 3 s, le régime d'hélice a fluctué entre 2 561 et 2 642 tr/min.

Le personnel du BST a démonté et examiné les deux moteurs à l'atelier du bureau régional, en présence d'un observateur de Textron Lycoming.

Le moteur gauche ne semblait pas avoir été endommagé avant l'impact. Aucune anomalie mécanique n'a été trouvée qui aurait pu empêcher le moteur ou ses accessoires de fonctionner normalement. L'examen de l'hélice gauche a révélé que les pales étaient à la position petit pas (régime élevé) à l'impact.

L'examen du carter des accessoires du moteur droit a permis de constater que les filets du boulon du pignon de commande du vilebrequin étaient usés, et que l'ergot de centrage était cisaillé. Le pignon de commande du vilebrequin entraîne tous les accessoires du moteur, dont deux magnétos Bendix, par le biais de pignons intermédiaires et des pignons menants des magnétos. Il manquait des dents sur le pignon intermédiaire et sur le pignon menant de la magnéto gauche. Une masselotte à accouplement à déclic, fixée à l'une des extrémités de la magnéto gauche, était coincée contre la goupille de butée montée sur le boîtier de la magnéto.

1.12.6 Magnétos des moteurs

Le moteur droit était équipé de deux magnétos Bendix (S6LN-1227). La magnéto de gauche était trop usée entre la masselotte et la goupille axiale. La masselotte a donc pu s'étendre et se coincer contre la goupille de butée fixée au boîtier. L'arrêt brusque de la magnéto a eu pour effet de surcharger le train d'engrenages secondaire de la magnéto gauche, de cisailler l'ergot de centrage, et d'arracher les filets du boulon de fixation sur le pignon de commande du vilebrequin principal. Une fois ce dernier pignon immobilisé, tous les accessoires se sont arrêtés, y compris la magnéto de droite.

Figure 1 - Accouplement à déclic
Accouplement à déclic

L'accouplement à déclic comporte deux masselottes et des ensembles à ressort faisant partie de l'accouplement menant de la magnéto (voir la figure 1). Pendant le démarrage des moteurs, l'embout de la masselotte entre en contact avec une goupille de butée fixée au boîtier de la magnéto et empêche celle-ci de tourner. Pendant que le moteur tourne, le pignon de commande de la magnéto enroule le ressort jusqu'à ce que ce dernier se détende et fasse tourner rapidement la magnéto pour envoyer une étincelle à la bougie d'allumage. À mesure que le régime moteur monte, la force centrifuge tire la queue de la masselotte vers l'extérieur, ce qui a pour effet de faire tourner le talon vers l'intérieur et de l'empêcher d'entrer en contact avec la goupille de butée.

La masselotte pivote sur un axe qui, s'il est trop usé, permet au talon de la masselotte de heurter la goupille de butée et de se coincer. En raison de l'usure, le jeu entre la masselotte et la goupille axiale dépassait les limites prescrites de 0,016 de pouce. L'écart entre la goupille axiale et la masselotte qui s'est coincée était de 0,046 de pouce, et l'écart entre la goupille axiale et la masselotte opposées était de 0,076 de pouce. Dans l'espace entre le talon et l'embout de la masselotte, il y avait une dépression qui correspondait à une rainure formée par usure dans la goupille de butée.

1.12.7 Bulletins de service et consignes de navigabilité

Le bulletin de service 599B de Bendix (qui concerne cette magnéto), publié en juillet 1982, précisait que la magnéto devait être inspectée au plus tard après 475 heures de fonctionnement depuis sa mise en service initiale ou depuis révision, et à toutes les 500 heures par la suite. Ce bulletin donnait les instructions à suivre pour vérifier le jeu entre chaque masselotte à accouplement à déclic et sa goupille de butée respective pour déterminer l'usure de la goupille axiale. Le jeu minimal prescrit entre la goupille axiale et la masselotte était de 0,016 pouce. Le bulletin de service 599D de Teledyne Continental Ignition Systems, publié en janvier 1992, exigeait une inspection toutes les 100 heures. Textron Lycoming avait publié le bulletin de service obligatoire 425B en mars 1992 pour exiger l'exécution du bulletin de service 599D de Teledyne.

La publication de bulletins de service est devenue obligatoire après la parution de la consigne de navigabilité 78-09-07 R3 du 17 janvier 1983. Cette consigne exigeait que toutes les magnétos de la série S-1200 dotées d'accouplement à déclic soient déposées, inspectées, et remplacées au besoin, conformément au bulletin de service 599B de Bendix ou à une approbation équivalente de la Federal Aviation Administration (FAA). La consigne exigeait que la date d'exécution et que la marque, le modèle et le numéro de série de la magnéto soient consignés dans le livret technique une fois les travaux terminés.

Il n'y avait pas d'entrée dans le livret technique du C-GMOP indiquant que la consigne 78- 09-07 R3 ou que les bulletins de service avaient été respectés. Une fiche d'entretien du 10 juillet 1993 comportait une entrée indiquant que les exigences du bulletin de service 425 de Lycoming avaient été respectées; cependant, la date d'exécution ainsi que la marque, le modèle et le numéro de série de la magnéto n'y figuraient pas.

Les antécédents de la magnéto défectueuse n'ont pas pu être déterminés avec certitude étant donné que le numéro de série (86510049) ne correspondait pas avec celui (8651004) qui figurait sur les fiches de révision du moteur. Sur la plaque signalétique en métal fixée par le fabricant sur la magnéto, la partie supérieure du dernier chiffre semblait former un 9, mais ce n'était pas assez clair pour qu'on puisse affirmer qu'il s'agissait bien d'un 9. Les numéros de série des trois autres magnétos ont pu être retracés jusqu'à la dernière révision. D'après le temps en service des moteurs depuis leur dernière révision consignée dans les livrets techniques, la magnéto totalisait environ 1 478 heures en service sans qu'une inspection de son accouplement à déclic ne soit consignée. Malgré l'ambiguité qui existe concernant le dossier de la magnéto défectueuse, tout indique que la magnéto est toujours restée installée sur le moteur depuis la révision ayant eu lieu 1 478 heures auparavant.

1.12.8 Examen des gouvernes

Les gouvernes ont toutes été retrouvées, et tous les dommages qu'elles présentaient ont été attribués aux forces d'impact violentes. La continuité des câbles de commande a été vérifiée dans la mesure du possible, et aucune anomalie n'a été trouvée. Les volets étaient rentrés à l'impact.

Le mécanisme de compensation de la direction de l'Islander est classique. En effet, la rotation de la molette de compensation déplace un tab de direction qui à son tour fait pivoter la gouverne de direction dans le sens approprié en vol (voir la figure 2). Le mécanisme de compensation de la direction est actionné par une molette de compensation montée dans le

plafond du poste de pilotage. Un index placé devant la molette indique le niveau de compensation de la direction. La molette est reliée au mécanisme de commande du tab de direction situé dans l'empennage par un ensemble à chaîne et à câbles. La rotation de la molette dans le sens contraire des aiguilles d'une montre (par rapport au pilote assis) déplace le tab à gauche et la gouverne de direction à droite. Si elle est tournée dans l'autre sens en vol, le tab pivote vers la droite et la gouverne de direction à gauche.

Figure 2 - Mécanisme de compensation de la direction
Mécanisme de compensation de la direction

Le tab est commandé par le biais d'un ensemble à tiges tubulaires. L'ensemble est supporté par un roulement fixé à l'avant du longeron du stabilisateur et il est retenu à son autre extrémité par une ferrure fixée au longeron de la gouverne de direction. La tige supérieure est filetée et elle tourne dans un tourillon qui se déplace vers le haut ou le bas, selon le sens de rotation de la molette. Le tourillon est relié au tab de direction et il le commande au moyen d'un ensemble à levier et tige. Lorsque le tab est au neutre, le tourillon se trouve à mi-chemin environ sur la tige filetée. Le tourillon a été trouvé à un tour de son débattement maximal supérieur, le tab de direction étant alors tourné vers la gauche.

L'examen de la tige de commande et de ses liaisons avec le tab de direction a révélé que l'extrémité inférieure de la tige était coudée vers l'avant et fracturée à la base de la gouverne de direction, au-dessus du roulement inférieur fixé au stabilisateur. Les surfaces fracturées aux extrémités de la tige indiquent que cette dernière était courbée vers l'avant d'environ 40 degrés avant de se fracturer. Cette déformation s'est produite quand le stabilisateur s'est coincé vers l'avant pendant l'impact.

1.12.9 Compensation de la direction

Après l'accident, les pilotes de l'Islander ont déclaré qu'il leur arrivait souvent de tourner la molette de compensation dans le mauvais sens au début d'un exercice de compensation moteur en panne; cependant, ils se rendaient aussitôt compte de leur erreur grâce à une réaction du palonnier. Ce dernier augmente la pression exercée sur le pied si la molette est tournée dans le mauvais sens, et il l'atténue si elle est tournée dans le bon sens. Les pilotes ont également déclaré qu'il leur fallait tourner la molette d'un quart à un tiers de tour pour neutraliser la pression au palonnier, pendant les exercices de panne moteur simulée.

Sur d'autres types d'avions équipés d'un mécanisme de compensation de la direction, la molette de compensation ne se trouve pas au même endroit. Sur les appareils dont la molette est située devant le pilote, ce dernier doit étendre la main et tourner la molette dans la direction où il veut diriger l'avion. Pour virer à droite, il doit tourner la molette dans le sens des aiguilles d'une montre (vue de dessus); pour virer à gauche, il doit la tourner dans le sens contraire des aiguilles d'une montre (vue de dessus). Puisque la molette de compensation de l'avion accidenté se trouvait au plafond, au-dessus de la tête du pilote, ce dernier devait atteindre la molette, paume de main vers le haut. S'il la tournait dans le sens contraire des aiguilles d'une montre (vue d'en dessous), l'avion tournait à droite, s'il la tournait dans le sens des aiguilles d'une montre (vue d'en dessous), l'avion tournait à gauche.

1.13 Renseignements médicaux

Des inhalateurs pour les personnes qui souffrent d'asthme ont été trouvés dans les poches du pilote, mais rien n'indique que le pilote faisait une crise d'asthme au moment de l'écrasement. L'enquête n'a révélé aucune autre maladie qui aurait pu causer l'accident ou y contribuer. Les résultats des analyses toxicologiques visant à déceler la présence d'éthanol et de carboxyhémoglobine ont été négatifs.

1.14 Incendie

Rien n'indique qu'il y ait eu un incendie, que ce soit avant ou après l'accident.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

Le siège du pilote n'était pas équipé de bretelles de sécurité. On a jugé que l'accident n'offrait aucune chance de survie à cause de l'importance des forces de décélération à l'impact. Les facteurs de charge pendant la décélération ont été calculés et ils se situaient entre 55 et 63 g; cependant, le facteur de charge maximal a sans doute été plus élevé.

La radiobalise de détresse (ELT) s'est déclenchée à l'impact et a permis de repérer l'avion accidenté.

1.16 Tests et recherches

1.16.1 Essai en vol d'un Britten-Norman

Un test en vol à bord d'un Britten-Norman Islander similaire a permis de déterminer qu'il fallait mettre du pied à gauche avec une force d'environ 250 livres pour maintenir un cap à une vitesse indiquée de 65 à 75 noeuds, moteur gauche au régime maximal (2 700 tr/min), moteur droit arrêté, hélice droite en drapeau, et compensation de la direction réglée au maximum vers la droite.

1.17 Renseignements supplémentaires

1.17.1 Exploitation de la compagnie

La compagnie Arctic Wings and Rotors a commencé ses activités en 1991. En novembre 1993, la compagnie a reçu son certificat d'exploitation pour offrir un service aérien de vols à la demande et de vols spécialisés, intérieurs et internationaux. Les destinations autorisées étaient Inuvik, Aklavik et Tuktoyaktuk (Territoires du Nord-Ouest). Le certificat autorisait la compagnie à effectuer des vols VFR de jour à partir de sa base d'opérations principale située au village d'Inuvik, et des vols IFR et VFR de nuit à partir de l'aéroport d'Inuvik.

Au moment de l'accident, la compagnie exploitait un Cessna 185, un Cessna 207, deux Britten- Norman Islander, un Piper PA-31 Navajo, un Piper PA-32 Cherokee Six, et un de Havilland DHC-3 Single Otter.

À titre d'organisme de maintenance agréé (OMA) par Transports Canada, la compagnie pouvait effectuer la maintenance, autre que des travaux spécialisés, sur ses avions commerciaux, en vertu du chapitre 573 du Manuel de navigabilit.. Le manuel de contrôle de la maintenance de la compagnie a été homologué par Transports Canada le 12 mars 1991. Au moment de l'accident, la compagnie avait à son service deux techniciens d'entretien d'aéronef (TEA) titulaires d'une licence.

1.17.2 Gestion de la maintenance

Transports Canada avait vérifié les activités de la compagnie le 26 novembre 1993. La dernière vérification de maintenance avant l'accident avait été effectuée par Transports Canada en novembre 1992. De nombreux points relevés dans le cadre de la vérification de maintenance concernaient le non-respect des procédures décrites dans le manuel de contrôle de la maintenance.

Certains problèmes déjà mentionnés dans le cadre de la vérification de maintenance ci-dessus mentionnée ont été relevés pendant l'enquête sur le présent accident. Les dossiers d'entretien étaient incomplets, et les anomalies observées par l'équipage de conduite n'avaient pas été consignées dans les livrets techniques de l'avion. Les anomalies récentes ayant été signalées ou non dans les livrets techniques avant l'accident sont les suivantes : l'avertisseur de décrochage ne fonctionnait pas en vol; l'éclairage de la partie droite du tableau de bord et du plafond ne fonctionnait pas; la date d'exécution des consignes de navigabilité et des bulletins de service n'était pas indiquée dans les livrets techniques de l'avion.

L'article 4.2 du manuel de contrôle de la maintenance oblige le commandant de bord à inscrire dans le carnet de bord les anomalies qui sont constatées afin que le personnel de maintenance puisse les corriger ou les différer avant le prochain vol, selon que les anomalies concernent ou non la navigabilité.

Le personnel de maintenance n'avait pas consigné dans les dossiers d'entretien les anomalies qui avaient été constatées régulièrement entre les inspections, ni les mesures correctives prises.

Les bulletins de service périodiques de Britten-Norman avaient été consignés dans le livret technique du C-GMOP, mais les consignes de navigabilité et les bulletins de service relatifs aux composants ne l'avaient pas été.

L'article 4.8 du manuel de contrôle de la maintenance exige qu'on se conforme aux consignes de navigabilité et aux bulletins de service de la manière indiquée par l'organisme qui les publie. Il précise en outre qu'une entrée à cet effet doit être portée aux livrets techniques pertinents, conformément aux exigences des ONA série VII no 2 et no 3 et du chapitre 575 du Manuel de navigabilit..

Le paragraphe 3.2 de l'AMA 593/1 du Manuel de navigabilit. précise ce qui suit : «La non- conformité à une consigne de navigabilité rend invalide le certificat de navigabilité ou le permis de vol. L'utilisation d'un aéronef dans de telles conditions constitue une infraction du fait que le certificat de navigabilité n'est plus en vigueur.»

Les dossiers établis par suite des vérifications de Transports Canada ont été examinés pour déterminer pourquoi certaines anomalies relevées pendant ces vérifications n'avaient pas été corrigées. On a constaté que l'exploitant avait précisé, dans la rubrique des mesures correctives des formulaires de cas de non-conformité, que les anomalies relevées avaient été corrigées. Au moment de l'enquête, les mesures correctives n'avaient pas été prises.

Après l'accident, en février 1994, Transports Canada a effectué une vérification des dossiers.

1.17.3 Temps de service de vol du pilote

L'article 42.1 de l'ONA série VII no 3 précise le temps de vol maximal, le temps de service de vol maximal et la période de repos minimale pour les membres d'équipage de conduite :

  • (4) Le temps de vol maximal de tout membre d'équipage de conduite est de :
    1. 120 heures en 30 jours consécutifs;
    2. 300 heures en 90 jours consécutifs;
    3. 1 200 heures par année civile.
  • (5) Le temps de service de vol maximal de tout membre d'équipage de conduite est de 15 heures par période de 24 heures consécutives.
  • (9) ... à l'intention de ses membres d'équipage de conduite une période de repos minimale :
    1. d'une durée permettant aux membres d'équipage de conduite d'être suffisamment reposés avant un temps de service de vol, calculée selon le nombre et le genre de fonctions qu'ils accomplissent avant et après la période de repos;
    2. d'une durée d'au moins 24 heures consécutives :
      1. soit une fois par période de sept jours consécutifs,
      2. soit 13 fois par trimestre civil.

1.17.4 Fatigue du pilote

En 1986, le Bureau canadien de la sécurité aérienne (BCSA) a publié un rapport intitulé Rapport du personnel sur les accidents attribuables à la fatigue et les limites de vol et de service des membres d'équipage, dans lequel il précise que, dans toutes les catégories d'exploitation d'avions, ce sont les exploitants de vols nolisés commerciaux qui comptent la moyenne la plus élevée de temps de vol au cours des 90 et des 30 derniers jours. Le rapport mentionne deux types de fatigue : la fatigue aiguë et la fatigue chronique.

La fatigue aiguë découle d'activités en vol intenses exécutées pendant une période relativement courte, d'ordinaire à la suite de tâches multiples répétées régulièrement.

La fatigue chronique ou à long terme est une fatigue qui découle d'une accumulation de temps de vol et de temps de service de vol prolongés au cours d'une grande période.

D'après l'étude du BST, après qu'une situation d'urgence ou anormale est décelée, la fatigue peut porter le pilote à faire des erreurs de jugement.

1.17.5 Erreurs de transfert

Le pilote dont les compétences sont à jour sur plusieurs types d'aéronef risque d'appliquer à un aéronef des procédures propres à un autre type d'aéronef, ou il peut faire une mauvaise utilisation des commandes si le fonctionnement des commandes diffère passablement d'un aéronef à un autre. Ces erreurs sont connues sous le nom d'erreurs de transfert. L'être humain court plus de risques de faire une erreur de transfert s'il est fatigué ou lors d'une situation d'urgence, la fatigue et les situations d'urgence étant des agents stressants.

2.0 Analyse

2.1 Introduction

L'analyse porte sur la gestion de la maintenance, la panne moteur, l'altitude et la position de l'avion au moment où le moteur est tombé en panne, les réactions du pilote, la fatigue, la compensation de la direction de l'avion, la perte de maîtrise et la formation du pilote.

2.2 Gestion de la maintenance

Pendant l'enquête, on s'est rendu compte que certaines anomalies qui avaient été relevées pendant la vérification effectuée en 1992 par Transports Canada n'avaient pas encore été corrigées. Les anomalies que présentait l'avion n'étaient pas toutes consignées dans les livrets de l'avion, et les informations relatives aux anomalies répétitives relevées pendant les inspections n'étaient pas consignées non plus. La date d'exécution des consignes de navigabilité et des bulletins de service relatifs aux composants n'était pas indiquée dans les livrets techniques de l'avion, ce qui est contraire aux exigences des ONA série VII no 2 et no 3 et à celles du chapitre 575 du Manuel de navigabilit.. Si l'inspection de l'accouplement à déclic de la magnéto avait été faite comme l'exigeait la consigne de navigabilité 78-09-07 R3, l'usure aurait pu être décelée, et l'anomalie aurait pu être corrigée avant que la magnéto ne devienne défectueuse.

Ces anomalies avaient été relevées pendant les vérifications effectuées par Transports Canada, et la compagnie avait déclaré qu'elle les avait corrigées, toutefois bon nombre d'entre elles existaient encore au moment de l'accident.

2.3 Panne moteur

Les masselottes de l'accouplement à déclic de la magnéto étaient usées au-delà des limites prescrites. Lorsque l'une des masselottes s'est coincée contre la goupille de butée, le train d'engrenages secondaire s'est rompu, et le moteur s'est arrêté brusquement.

2.4 Altitude et position au départ

Il a été impossible de déterminer avec certitude l'altitude et la position de l'avion au moment des problèmes de moteur. Le pilote n'a pas signalé son altitude pendant ses communications avec la FSS.

En revenant d'Inuvik, le pilote est resté au-dessous de la couche nuageuse, et, s'il s'en est tenu à ses habitudes de vol pour le retour, il est probablement resté sous la couche nuageuse située à 1 100 pieds.

La mince couche de givre blanc sur la queue de l'avion a pu s'accumuler en revenant de Tuktoyaktuk, ou au départ. Il est également possible que le pilote soit entré par accident dans les nuages pendant la situation d'urgence.

2.5 Réactions du pilote

Deux scénarios ont été examinés dans l'espoir de comprendre pourquoi le pilote n'a pas réussi à rentrer à l'aéroport sur un seul moteur. Il n'a pas été possible d'établir quelle hypothèse est la plus probable, cependant, les éléments de preuve indiquent que le pilote n'avait plus la maîtrise de l'appareil quand il a heurté la glace.

La première possibilité veut que le pilote soit monté dans les nuages pour passer par-dessus la couche de nuages. Dans ce cas, puisque la base des nuages à Inuvik était plus basse qu'ailleurs, le pilote aurait été obligé d'effectuer une approche IFR sur l'aéroport d'Inuvik pour ensuite continuer en VFR jusqu'à la piste du village. Le pilote était titulaire d'une qualification de vol aux instruments, mais l'avion n'avait pas de pilote automatique et, puisqu'il n'y avait qu'un seul pilote à bord, voler en IFR aurait constitué une violation de l'ONA série VII no 3.

La deuxième possibilité veut que le pilote soit resté en VFR au-dessous des nuages. Les lumières de l'aéroport de Tuktoyaktuk et du hameau auraient alors été derrière l'avion. Dans ce cas, le pilote aurait eu peu de repères visuels et pour ainsi dire aucun horizon pour l'aider à maintenir l'assiette de l'appareil. S'il a réussi à tourner vers l'aéroport, puisque la visibilité signalée était de 15 milles, il aurait dû apercevoir les lumières. S'il a tourné en se référant aux lumières au sol, tout en étant préoccupé par l'exécution des procédures d'urgence en cas de panne moteur, il a pu perdre le sens de l'orientation puis la maîtrise de l'avion. Il a cependant été impossible de déterminer dans quelle mesure il a réussi à tourner vers l'aéroport.

Compte tenu des conditions qui prévalaient et du fait que le pilote était qualifié pour voler aux instruments, nous concluons qu'il a probablement volé en se fiant aux instruments de vol pendant la situation d'urgence, et qu'il a probablement utilisé le GPS, le NDB de Tuktoyaktuk, ou les deux, pour connaître la direction à suivre.

2.5.1 La fatigue

Il semble que le pilote avait de bonnes habitudes de sommeil et qu'il s'était reposé suffisamment la veille de l'accident. Son temps de service de vol et son temps de vol le jour de l'accident se trouvaient dans les limites permises. D'après les livrets de l'aéronef, toutefois, le dernier jour où il n'avait pas piloté remonte au 11 novembre, soit 22 jours avant l'accident. Dans les quatre derniers mois, il n'avait pas volé pendant 13 jours. L'ONA série VII no 3 précise que les membres d'équipage doivent bénéficier d'une période de repos minimale d'au moins 24 heures par période de sept jours consécutifs, ou de 13 périodes de repos minimales par trimestre civil.

Règle générale, les petits transporteurs aériens n'ont pas de politique permettant d'établir clairement la nuance entre un «jour de repos» et un «jour sans vol». Il arrive souvent qu'un pilote n'ait pas de vol prévu pour la journée, mais qu'il demeure disponible si l'on a besoin de lui pour un vol, pour effectuer des tâches connexes, ou les deux.

Il a été impossible de déterminer si l'horaire de travail du pilote des quatre derniers mois a pu favoriser l'apparition de la fatigue suffisamment pour nuire à son jugement et à ses réactions pendant la situation d'urgence.

2.6 L'avion

2.6.1 Avertisseur de décrochage et éclairage des instruments

Il a été impossible de déterminer dans quelle mesure, le cas échéant, l'anomalie apparente de l'avertisseur de décrochage et de l'éclairage dans le poste de pilotage a pu nuire au pilote; cependant, si le pilote a eu besoin de lire les indications du mécanisme de compensation de la direction, il doit avoir eu de la difficulté à les lire sans lampe.

2.6.2 Procédures sur un seul moteur et performances

La position à laquelle les manettes des gaz et de commande d'hélices ont été trouvées indique que le pilote a bien identifié le moteur en panne et qu'il a suivi la procédure d'arrêt moteur en cas d'urgence.

Selon les calculs de l'avionneur, à une masse totale d'environ 6 200 livres (400 livres au-dessous de la masse totale maximale) et à un centrage situé environ à 23,9 pouces derrière la référence, l'avion pouvait rentrer à l'aéroport sur un seul moteur.

D'après l'information obtenue de l'avionneur concernant les performances de l'avion dans des conditions givrantes, on a conclu qu'un seizième à un huitième de pouce de givre sur le bord d'attaque des ailes et du stabilisateur n'aurait pas joué un rôle important dans la perte de maîtrise.

2.6.3 Compensation de la direction

Pendant que le moteur droit était arrêté et que celui de gauche tournait, l'avion avait tendance à prendre un mouvement de lacet et de roulis vers la droite. Le pilote a donc dû exercer une pression constante sur la pédale gauche pour interrompre ou limiter ces mouvements de lacet et de roulis. Pour diminuer la pression nécessaire sur le palonnier, le pilote doit normalement tourner la molette de compensation dans le sens approprié.

En général, un pilote s'attend à sentir une réaction sur la pédale, ce qui lui permet de confirmer qu'il compense dans la bonne direction. Cette méthode est fiable quand l'avion est en palier, mais elle peut induire en erreur si l'appareil est déjà en virage pendant la compensation. L'enquête n'a pas révélé pourquoi le pilote a mal identifié la réaction au palonnier; toutefois, tout indique qu'il a tourné la molette de compensation de manière à provoquer un lacet et un roulis vers la droite plutôt que vers la gauche. Quand la molette de compensation est fixée au plafond, au-dessus de la tête du pilote, il est plus difficile de déterminer dans quel sens il faut la tourner.

Pendant l'enquête, on a essayé de déterminer si le fait d'être qualifié sur cinq types d'avions différents, dont l'un était équipé d'un mécanisme de compensation de la direction monté au plafond, pourrait porter à mal compenser la direction. Même si aucun lien direct n'a pu être établi, on est porté à croire que cette situation peut augmenter les risques de mal compenser la direction du BN2A, et surtout dans une situation stressante comme une panne moteur. Puisque d'autres pilotes d'Islander ont déclaré après l'accident qu'il leur est souvent arrivé de commencer à tourner la molette de compensation dans le mauvais sens pendant les exercices de panne moteur, il est probable que la conception de l'installation elle-même sème la confusion.

Si le pilote a compensé dans la mauvaise direction et ne s'est pas aperçu de son erreur, sans doute parce qu'il était préoccupé par d'autres tâches, il a pu croire que le virage et le mouvement de roulis à droite étaient attribuables à la poussée asymétrique créée par le moteur gauche en marche et le moteur droit en panne. À mesure que la vitesse de l'avion diminuait, la gouverne de direction devenait moins efficace, et l'appareil avait plus tendance à tourner. Si le pilote a continué à compenser dans le mauvais sens, l'avion a fini par faire un roulis à droite, par décrocher, ou les deux.

2.6.4 Perte de maîtrise

Comme l'indique le rapport du test en vol d'un Britten-Norman, pour maintenir le cap constant, le pilote doit exercer environ 250 livres de pression sur la pédale gauche pour contrer les forces combinées d'une gouverne de direction mal compensée et la poussée asymétrique créée par le moteur gauche en marche et le moteur droit en panne. Si le pilote exerce moins de pression sur la pédale pour corriger le roulis aux ailerons, la traînée augmente beaucoup, la vitesse diminue, la montée devient difficile et le pilote perd le contrôle de l'appareil.

Les marques d'impact laissées par l'avion indiquent que l'avion pivotait à droite quand ce dernier a heurté la surface gelée et enneigée.

2.7 Formation et charge de travail du pilote

L'expérience de vol du pilote était l'expérience typique que possèdent les pilotes qui volent pour un petit exploitant commercial. Il avait reçu la formation périodique et subi les contrôles de compétence qu'exigeait son employeur. Toutefois, il n'avait jamais reçu de formation au vol de nuit sur type comme Transports Canada l'exige. Compte tenu de la charge de travail imposée par le type de situation que le pilote a dû affronter alors qu'il était seul à bord, il y a lieu de se demander si la formation annuelle d'une heure et demie exigée par Transports Canada en vertu de l'ONA série VII no 3 aurait suffit à bien préparer le pilote à ce type de situation.

La politique de Transports Canada permet le regroupement d'avions qui présentent des caractéristiques de vol et des performances similaires. Toutefois, le BN-2 Islander et le PA-31 qui avaient été regroupés ainsi, présentent des caractéristiques de vol et des performances considérablement différentes. Il existe des différences fondamentales dans l'aménagement du poste de pilotage et dans ses systèmes. Par conséquent, il est peu probable que le fait de confirmer les compétences d'un pilote sur un seul de ces types d'aéronef dans le cadre d'une PPC puisse permettre de confirmer que ce pilote est compétent sur l'autre type.

Le fait que le pilote avait dû se préparer en vue d'une PPC et le fait que cette PPC avait eu lieu récemment sur le Navajo ont pu le porter à faire une «erreur de transfert» étant donné qu'il avait dû se préparer à utiliser une méthode pour compenser la direction du Navajo qui ne convient pas au Islander dans le cas d'une panne moteur.

Dans le cas des vols commerciaux sur multimoteurs effectués en IFR, l'ONA série VII no 3 exige un équipage de deux pilotes, ou un pilote et un pilote automatique à deux axes. Ces exigences ont été établies parce qu'il est reconnu qu'il est plus difficile de piloter aux instruments lorsque la charge de travail est plus lourde. Voler la nuit en VFR au-dessus d'un terrain sans repères visuels et sans horizon visible, comme c'était le cas pendant le vol en cause, est aussi exigeant que de voler aux instruments.

3.0 Faits établis

  1. Le pilote possédait la licence nécessaire au vol et en vertu de la réglementation en vigueur.
  2. Le moteur droit a perdu toute sa puissance en moins de quatre minutes, après le décollage, par suite du coincement de l'accouplement à déclic de la magnéto gauche.
  3. En raison de l'usure, le jeu entre la masselotte et la goupille axiale de l'accouplement à déclic de la magnéto dépassait les limites prescrites par le fabricant.
  4. Rien n'indique que le bulletin de service 599B de Bendix ni que la consigne de navigabilité 78-09-07 R3, rendant obligatoire l'inspection des magnétos toutes les 500 heures, aient été exécutés.
  5. Les bulletins de service périodiques de Britten-Norman ont été consignés dans le livret technique de C-GMOP. Cependant, les consignes de navigabilité et les bulletins de service relatifs aux composants pertinents ne l'ont pas été. L'AMA 593/1 du Manuel de navigabilit. précise que la non-conformité à une consigne de navigabilité rend invalide le certificat de navigabilité.
  6. Certaines anomalies relevées pendant la vérification effectuée en 1992 par Transports Canada existaient toujours au moment de l'accident.
  7. Le mécanisme de compensation de la direction a été trouvé presque au maximum vers la droite, dans le sens contraire normalement exigé pendant une panne du moteur droit.
  8. Il a été démontré qu'il faut exercer environ 250 livres de pression sur la pédale gauche pour contrer les forces combinées d'une gouverne de direction compensée vers la droite et de la traînée du moteur droit.
  9. L'accumulation de givre sur l'avion n'a pas joué un rôle important dans la perte de maîtrise.
  10. Le pilote n'avait jamais reçu de formation au vol de nuit sur type comme l'exige l'ONA série VII no 3.
  11. Comme le pilote n'avait pas de repères visuels à sa disposition au moment de la panne moteur, il est probable qu'il a dû voler aux instruments.
  12. Compte tenu de la charge de travail du pilote à cause de la situation d'urgence qui est survenue la nuit et alors qu'il était seul à bord, on a jugé que la formation annuelle d'une heure et demie que Transports Canada exige est insuffisante.
  13. L'enquête n'a pas permis d'établir si la fatigue avait joué un rôle dans l'accident, toutefois, l'horaire de travail du pilote au cours des derniers mois favorisait l'apparition de la fatigue.
  14. L'accident n'offrait aucune chance de survie à cause de l'importance des forces d'impact.
  15. La radiobalise de détresse s'est déclenchée et a permis de repérer l'avion.

3.1 Causes

L'accouplement à déclic d'une magnéto était usé au-delà des limites prescrites et a provoqué la panne du moteur droit. Après la panne, le pilote a mal compensé la direction et n'a pas pu garder la maîtrise de l'appareil.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures prises

4.1.1 Inspection des magnétos

En mars 1994, le BST a envoyé un avis de sécurité aérienne à Transports Canada concernant les exigences d'inspection et d'entretien des magnétos. Transports Canada a répondu qu'il avait demandé à la FAA des États-Unis si elle envisageait de modifier la consigne de navigabilité 78- 09-07 R3 pour qu'elle exige l'inspection périodique plus stricte mentionnée dans le bulletin de service 599D. Aucune réponse n'a été reçue jusqu'à présent. Cette question a également été abordée dans les numéros 3/94 et 1/95 de la publication intitulée Sécurité aérienne - Mainteneur.

4.1.2 Bulletin de service obligatoire MS645

Le 4 avril 1994, Teledyne Continental a publié le bulletin de service obligatoire MSB 645 pour remplacer le bulletin SB599D. Ce bulletin avait pour objet de réduire le taux d'usure des accouplements à déclic pour permettre d'éviter les arrêts de moteur en vol. Ce bulletin exige que les accouplements à déclic rivetés soient inspectés toutes les 100 heures. Les accouplements qui ne répondent pas aux normes d'inspection détaillées doivent être remplacés par de nouveaux ensembles à circlips.

4.1.3 Vérifications réglementaires et surveillance

L'analyse des données relatives à cet accident et à 18 autres accidents a permis de cerner des lacunes dans le processus de vérification réglementaire des transporteurs aériens. On a constaté, entre autres, que parfois les vérifications de Transports Canada n'étaient pas assez rigoureuses et que le suivi des mesures imposées après une vérification n'était pas toujours assuré. Par conséquent, le Bureau a recommandé que :

le ministère des Transports modifie le Manuel des vérifications réglementaires.de façon à soumettre à des vérifications plus approfondies les transporteurs aériens pour lesquels se dégage une tendance négative de leurs indicateurs de gestion des risques.
Recommandation A94-23 du BST

le ministère des Transports s'assure que ses inspecteurs chargés des vérifications soient en mesure d'utiliser les méthodes de gestion des risques de façon à pouvoir identifier les transporteurs devant faire l'objet de vérifications plus rigoureuses.
Recommandation A94-24 du BST

le ministère des Transports élabore en priorité une méthode permettant de surveiller le suivi donné aux vérifications.
Recommandation A94-25 du BST

le ministère des Transports prenne des mesures à court et à long terme pour accorder une plus grande importance au contrôle du suivi donné aux vérifications et aux mesures d'exécution dans les cas de non-conformité.
Recommandation A94-26 du BST

En ce qui concerne ces recommandations, Transports Canada a répondu qu'il tiendrait compte des recommandations A94-23 et A94-24 au moment de modifier le Manuel des vérifications réglementaires. De plus, Transports Canada veillera à ce que le programme de formation aux procédures de vérification destiné aux inspecteurs tienne compte de la recommandation A94-24, pour que les méthodes de gestion des risques soient comprises et appliquées correctement.

En ce qui concerne les recommandations A94-25 et A94-26, Transports Canada a répondu que le Manuel des vérifications réglementaires .sera révisé pour s'assurer que des directives claires garantiront de bonnes procédures de suivi aux vérifications. De plus, Transports Canada a l'intention de mettre en service, sous peu, la version améliorée du Système national d'information sur les compagnies d'aviation (NACIS) pour garantir le suivi donné aux vérifications à l'échelle nationale. Entre temps, une directive sera envoyée aux régions pour les enjoindre d'examiner les méthodes de suivi qu'elles utilisent.

4.2 Mesures à prendre

4.2.1 Vols commerciaux VFR de nuit

Les vols commerciaux effectués en IFR par des aéronefs dont la masse est égale ou inférieure à 12 500 livres nécessitent un équipage de deux pilotes, ou un pilote et un pilote automatique à deux axes. Ces conditions ont été établies parce qu'il est reconnu qu'il est très difficile de garder le contrôle de l'appareil et de rester maître de la situation en vol en se fiant uniquement aux instruments.

Les vols VFR de nuit au-dessus d'un terrain sans repères visuels et sans horizon visible exigent aussi que le pilote soit qualifié pour le vol aux instruments. De ce point de vue, les exigences réglementaires pour les vols commerciaux VFR de nuit renferment certaines mesures de sécurité; par exemple, vu que l'aéronef peut évoluer temporairement dans des conditions météorologiques de vol aux instruments ou dans de mauvaises conditions d'éclairage, le pilote doit être titulaire d'une qualification aux instruments; en outre, pour réduire les risques de collision avec le relief ou avec des obstacles, ces vols doivent se dérouler le long de voies aériennes, de routes aériennes ou de routes de compagnie.

Toutefois, ces exigences ne tiennent pas compte des pressions additionnelles que subit l'équipage de conduite lors des situations d'urgence ou lorsque les conditions de vol sont très mauvaises.

Légalement, les vols commerciaux VFR de nuit peuvent être effectués par un seul pilote et sans pilote automatique. Dans le cas qui nous occupe, l'aéronef était certifié pour être piloté par un seul pilote pour des vols VFR de jour et de nuit; toutefois, ce même aéronef utilisé pour des vols commerciaux en IFR nécessitait deux pilotes. Le Bureau croit que le fait de se retrouver seul pour faire des déroutements dus aux conditions météo ou pour s'occuper d'une situation d'urgence au cours d'un vol VFR par nuit noire est très exigeant et peut être comparé à essayer de s'occuper de ces situations seul en vol IFR. Toutefois, en vol IFR, la présence à bord d'un deuxième pilote est une mesure de sécurité supplémentaire.

Les différences dans les exigences de composition des équipages et les exigences d'équipement entre les vols commerciaux VFR et IFR constituent une considération économique pour les exploitants. Dans le cas des équipages VFR à un seul pilote, les coûts en main-d'oeuvre sont moindres, et l'absence d'exigences en matière de pilote automatique réduit les frais d'équipement et d'entretien courant. De plus, comme les exigences de planification pour les vols VFR concernant les aéroports de dégagement et les réserves en carburant sont moins restrictives que pour les vols IFR, l'exploitant jouit alors d'une plus grande flexibilité pour satisfaire aux demandes de ses clients en matière de route et d'horaire.

Les transporteurs aériens qui assurent un service de transport de passagers doivent évidemment tenir compte des contraintes économiques; par contre, dans l'intérêt des passagers payants, le niveau de sécurité ne devrait pas dépendre du type de régime (soit VFR ou IFR) ni du moment de la journée.

Compte tenu des exigences en équipement et en personnel, le pilote qui effectue seul un vol commercial VFR de nuit ne bénéficie pas du même niveau de sécurité (qui lui permettrait de faire face en toute sécurité à des situations imprévues) que les équipages IFR effectuant le même type de vol. Le Bureau s'inquiète du fait que les vols VFR de nuit n'offrent pas aux passagers payants un niveau de sécurité équivalent à celui d'autres vols semblables effectués en IFR. Par conséquent, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports augmente les exigences réglementaires sur la conduite des vols commerciaux VFR de nuit pour le transport de passagers afin qu'ils offrent un niveau de sécurité comparable à celui des vols IFR pour un aéronef similaire.
Recommandation A95-16 du BST

4.2.2 Formation

4.2.2.1 Formation au vol de nuit

Pour transporter des passagers de nuit à bord d'un appareil multimoteur, les exploitants sont tenus de fournir aux pilotes de la compagnie une formation au vol de nuit qui soit propre au type. Dans le cas qui nous occupe, le pilote n'avait pas reçu cette formation, et cette lacune n'avait pas été relevée par les inspecteurs de Transports Canada lors de la vérification des activités de la compagnie, un mois avant l'accident.

En janvier 1993, par suite de l'enquête sur l'accident d'un bimoteur à turbopropulseurs survenu à Moosonee (rapport du BST A90H0002) et qui a révélé qu'aucun des pilotes n'avait reçu la formation au vol de nuit requise, lacune que les inspecteurs régionaux de Transports Canada n'avaient pas relevée, le Bureau a recommandé que :

le ministère des Transports revoie ses procédures actuelles lui permettant de vérifier si les transporteurs aériens dispensent l'entraînement obligatoire au vol de nuit sur les appareils multimoteurs.
Recommandation A93-05 du BST

En août 1993, Transports Canada a répondu que le Manuel des vérifications réglementaires.(publié depuis l'enquête sur l'accident no A90H0002) enjoignait le personnel de vérification de contrôler les programmes de formation au vol des compagnies. En outre, Transports Canada a avisé le personnel régional d'inspection des transporteurs aériens de cette question et a demandé à son équipe de vérification de la qualité de s'assurer qu'on avait bien vérifié si la formation au vol de nuit avait été donnée.

Le cas qui nous occupe est un autre exemple d'accident qui s'est produit la nuit mettant en cause un pilote qui n'avait pas reçu la formation au vol de nuit requise. Malgré les efforts constants de Transports Canada pour améliorer son processus de vérification réglementaire et exercer une meilleure surveillance, il y a encore des pilotes professionnels qui ne reçoivent pas la formation au vol de nuit requise. Comme les compétences nécessaires à la conduite en toute sécurité d'un vol de nuit doivent être mises à jour par une formation périodique, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports procède à une vérification spéciale pour confirmer que les pilotes professionnels effectuant des vols de nuit sur multimoteurs reçoivent la formation au vol de nuit requise.
Recommandation A95-17 du BST

Les procédures de vérification de Transports Canada ne permettent toujours pas de déceler toutes les lacunes en matière de formation au vol de nuit chez les pilotes professionnels; toutefois, il est bien évident que les inspecteurs de Transports Canada ne peuvent pas continuellement être sur place pour assurer que les exploitants dispensent cette formation. Les exploitants qui ne dispensent pas la formation obligatoire doivent être tenus responsables. Par conséquent, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports évalue l'efficacité de ses pratiques actuelles dans le cas des exploitants qui ne donnent pas à leurs pilotes la formation obligatoire.
Recommandation A95-18 du BST

4.2.3 Regroupement d'aéronefs aux fins des PPC

Transports Canada avait autorisé le regroupement des aéronefs Islander et Navajo aux fins des PPC chez l'exploitant en cause dans l'accident. (Il semble que le regroupement de ces deux aéronefs a aussi été autorisé chez d'autres transporteurs aériens.) La politique relative au regroupement d'aéronefs aux fins des PPC exige seulement que les aéronefs soient regroupés selon leurs caractéristiques de vol et leurs performances. Cependant, il semble que des différences marquées existent entre les caractéristiques de vol et les performances du Navajo et du Islander. Le fait qu'il existe des différences dans le sens d'utilisation de la compensation de la direction entre les deux appareils peut avoir été crucial dans cet accident.

Le Bureau comprend que des exploitants veuillent regrouper des aéronefs aux fins des PPC; toutefois, le Bureau croit que les lignes directrices sur le regroupement des aéronefs doivent permettre d'assurer qu'un contrôle de compétence sur un aéronef du groupe donnera systématiquement une indication précise de la compétence du pilote pour les autres aéronefs du même groupe. Des regroupements inappropriés peuvent amener le pilote, l'exploitant et l'examinateur à croire que la capacité du pilote à piloter tous les aéronefs du groupe est meilleure qu'elle ne l'est en réalité; ces pilotes courent des risques s'ils se retrouvent dans des situations qui exigent d'eux des capacités supérieures à celles qu'ils ont démontrées. Par conséquent, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports confirme la pertinence de tous les regroupements d'aéronefs actuels aux fins des PPC, de sorte que la compétence démontrée sur type soit vraiment représentative de la compétence pour tous les aéronefs du groupe.
Recommandation A95-19 du BST

Le pilote dont les compétences sont à jour sur plusieurs types d'aéronef risque d'appliquer à un autre aéronef des procédures ou des mesures propres à un type d'aéronef donné; le pilote peut, entre autres, faire une mauvaise utilisation des commandes si le fonctionnement des commandes d'un aéronef diffère passablement de celui d'un autre aéronef qu'il connaît. Ces erreurs dans l'exécution d'une opération ou d'une procédure sont connues sous le nom d'«erreurs de transfert». Les gens courent plus de risques de faire des erreurs de transfert s'ils sont stressés parce que la charge de travail est lourde. Une mauvaise utilisation de la compensation de la direction pendant une panne moteur sur un appareil multimoteur constituerait une erreur de transfert typique si la procédure d'utilisation de la compensation variait de façon marquée entre des aéronefs différents pour lesquels les compétences du pilote sont à jour. Des différences dans l'aménagement du poste de pilotage, dans le fonctionnement des commandes de vol et des commandes moteur, dans les principaux systèmes de bord et dans les procédures d'urgence critiques risquent de donner lieu à des erreurs de transfert. Pour réduire au minimum les risques d'erreur de transfert auxquels sont exposés les équipages de conduite, les regroupements d'aéronefs devraient se fonder sur plus d'éléments que des similitudes générales de caractéristiques de vol et de performances. Par conséquent, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports revoie les lignes directrices sur les regroupements d'aéronefs aux fins des PPC pour tenir compte des risques d'erreur de transfert auxquels sont exposés les équipages de conduite.
Recommandation A95-20 du BST

Transports Canada a établi une liste approuvée des regroupements d'aéronefs dont la masse maximale certifiée au décollage (MCTOW) est supérieure à 7 000 livres. On croit savoir qu'une analyse approfondie des différences et des similitudes entre les aéronefs de chaque groupe a été menée pour assurer la compatibilité des aéronefs. Cette liste approuvée n'existe pas pour les aéronefs commerciaux dont la MCTOW est inférieure à 7 000 livres. Des regroupements d'aéronefs selon les besoins, fondés sur des similitudes superficielles entre les aéronefs peuvent amener le regroupement d'aéronefs fondamentalement différents (p. ex. le Navajo et le Islander), créant des situations qui risquent de donner lieu à des erreurs de transfert lorsque le niveau de stress est élevé dans le poste de pilotage. Par conséquent, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports établisse, le cas échéant, une liste approuvée de regroupements d'aéronefs aux fins des PPC pour les aéronefs dont la masse maximale certifiée au décollage (MCTOW) est inférieure à 7 000 livres.
Recommandation A95-21 du BST

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Par conséquent, la publication de ce rapport a été autorisée le par le président, John W. Stants, et Zita Brunet, membre, en attendant l'approbation formelle du Bureau.

Annexes

Annexe A - Zone où s'est déroulé le vol

Annexe B - Trajectoire de vol du C-GMOP

Annexe C - Liste des rapports pertinents

L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Annexe D - Sigles et abréviations

BST
Bureau de la sécurité des transports du Canada
CVR
enregistreur phonique
ELT
radiobalise de détresse
FAA
Federal Aviation Administration
FDR
enregistreur de données de vol
FSS
station d'information de vol
g
facteur de charge
GPS
système de positionnement mondial
h
heure(s)
HNR
heure normale des Rocheuses
IFR
règles de vol aux instruments
lb
livre(s)
MCTOW
masse maximale certifiée au décollage
M
magnétique
min
minute(s)
NACIS
Système national d'information sur les compagnies d'aviation
NDB
radiophare non directionnel
nm
mille(s) marin(s)
OMA
organisme de maintenance agréé
ONA
Ordonnance sur la navigation aérienne
PPC
vérification de compétence pilote
pi/min
pied(s) par minute
s
seconde(s)
TEA
technicien d'entretien d'aéronef
tr/min
tour(s) par minute
UTC
temps universel coordonné
VASIS
indicateur visuel de pente d'approche
VFR
règles de vol à vue
VMC
conditions météorologiques de vol à vue
VMCA
vitesse minimale de contrôle en vol
°
degré(s)
minute(s)