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Rapport d'enquête aéronautique A00P0019

Impact sans perte de contrôle (CFIT)
avec une surface gelée
Piper Navajo Chieftain C-GBFZ
de TGH Holdings Limited (Terry Air)
lac Williston (Colombie-Britannique)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le Piper PA-31-350 Navajo Chieftain portant le numéro de série 31-7752151 s'est retrouvé dans une zone de visibilité réduite à cause de la neige abondante lors d'un vol à vue à destination de Tsay Keh à partir d'un chantier forestier situé à Bear Valley (Colombie-Britannique). Le pilote a perdu ses repères visuels et a fait demi-tour pour retrouver des conditions de vol à vue. Peu après la fin du virage, vers 10 h 55, heure normale du Pacifique, l'avion a heurté la surface gelée du bras Peace Reach du lac Williston (Colombie-Britannique). Le pilote, qui était seul à bord, a subi de graves blessures. Il n'y a pas eu d'incendie. L'avion a été détruit sous le choc.

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Renseignements de base

Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol. Au moment de l'accident, il totalisait quelque 4 500 heures de vol, dont environ 1 500 sur type et 150 sur type dans les 90 derniers jours. Il travaillait pour Terry Air depuis deux ans et avait effectué plusieurs fois, selon les règles de vol à vue (VFR), le trajet entre Bear Valley et Tsay Keh. Il possédait la qualification de vol aux instruments (IFR) et il était qualifié pour voler aux instruments. La compagnie Terry Air est autorisée à conduire des vols IFR en vertu du certificat d'exploitation qui lui a été délivré par Transports Canada. Le pilote effectuait fréquemment ce genre de vol.

L'avion a été inspecté par le personnel du BST sur le lieu de l'écrasement. L'avion a été examiné dans la mesure du possible, et l'examen n'a révélé aucune anomalie antérieure à l'accident qui aurait pu causer la perte d'altitude et l'impact avec la surface gelée du lac. Selon l'information recueillie, l'avion fonctionnait normalement avant l'accident. Les dommages attribués à l'impact révèlent que l'avion a percuté la glace l'aile gauche légèrement basse, avec une assiette en tangage presque horizontale et sur un cap orienté au 050 degrés magnétique environ. L'hélice gauche a touché la surface gelée en premier, suivie du fuselage et finalement de l'hélice droite.

L'avion avait été dépêché de Mackenzie (Colombie-Britannique) pour amener un passager à Bear Valley. Ensuite, l'appareil devait se rendre, sans passager, à Tsay Keh pour y prendre sept passagers qu'il devait ramener à Mackenzie. L'avion a quitté Mackenzie vers 9 h 56, heure normale du Pacifique (HNP)Note de bas de page 1, et a entrepris le vol à destination de Bear Valley selon un itinéraire de vol IFR.

Les conditions météorologiques observées à Bear Valley étaient les suivantes : ciel nuageux avec des éclaircies visibles à l'est.Note de bas de page 2 La visibilité au-dessous des nuages était bonne, toutefois quelques flocons de neige tombaient et on pouvait voir un mur de nuages sombres à l'ouest. Lorsque le pilote est arrivé dans les environs de Bear Valley, il a repéré une zone où le ciel était dégagé à l'est de l'aéroport et a volé au-dessous des nuages pour se rendre à cet endroit, avant de se diriger vers l'aéroport dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC). L'avion est arrivé à Bear Valley vers 10 h 30, et le passager est descendu.

La route prévue pour le vol VFR à partir de Bear Valley était la suivante : voler en direction ouest le long du bras Peace Reach, puis vers le nord-ouest le long du lac Williston, puis vers Tsay Keh, qui se trouve à l'extrémité nord du lac. La distance totale à parcourir était d'environ 100 milles marins (nm). Le pilote savait avant de partir que des nuages sombres se trouvaient à l'ouest de Bear Valley. Il avait l'intention de décoller et d'aller vérifier la météo d'un peu plus près. Il prévoyait voler à une altitude d'environ 800 pieds au-dessus du sol (agl) et descendre, si cela s'avérait nécessaire, à une hauteur aussi basse que 300 pieds pour rester à l'écart des nuages. Au cas où les nuages et la visibilité ne permettraient pas le vol à vue, le pilote avait prévu faire demi-tour et retourner à Bear Valley.

Le pilote a décollé vers 10 h 40 et s'est dirigé vers l'ouest. Il s'est rapidement trouvé en présence de neige, mais la visibilité lui permettait quand même d'apercevoir les rives du lac; c'est pourquoi le pilote a décidé de poursuivre le vol. L'appareil avait adopté son profil de croisière et volait à 160 nm/heure (noeuds), train d'atterrissage et volets rentrés. À environ 25 nm à l'ouest de Bear Valley, la visibilité a diminué au point où le pilote n'avait plus de repères visuels. Il a alors fait demi-tour et a tenté de trouver des repères visuels pour retourner à Bear Valley. Toutefois, l'avion a amorcé une descente à l'insu du pilote et a percuté la surface gelée du lac. Les calculs de performances de virage indiquent qu'à 160 noeuds, le pilote aurait dû maintenir un angle d'inclinaison d'environ 40 degrés (virage serré) pour terminer le demi-tour à l'intérieur de la vallée exiguë. Le BST a déjà fait enquête sur des accidents semblables où la perte d'altitude a fini par causer un impact avec la glaceNote de bas de page 3.

Photo 1. Aéronef accidenté sur les lieux de l'accident
Aéronef accidenté sur les lieux de l'accident

L'accident est survenu par 56°02′ de latitude Nord et 123°38′ de longitude Ouest, dans une partie du lac où la vallée est étroite et où les parois de la vallée sont abruptes et orientées d'est en ouest. Il n'y a qu'un mille de distance entre les parois de la vallée au niveau du lac, et chaque paroi a plus de 4 000 pieds de hauteur. La tempête de neige se déplaçait d'ouest en est, et la vitesse des vents augmente habituellement dans cette partie du bras Peace Reach en raison de l'effet d'entonnoir.Note de bas de page 4 Le pilote s'est servi de la rive nord du lac comme repère visuel dans la vallée lorsqu'il s'est dirigé légèrement vers l'ouest, ce qui l'a amené à se diriger vers le nord. Lorsqu'il a perdu le contact visuel avec la rive, la distance latérale à l'intérieur de laquelle il devait effectuer le demi-tour vers la gauche était d'environ un mille. À ce moment du vol, le pilote avait fait descendre l'avion jusqu'à une hauteur de 300 pieds dans l'espoir de rester sous la zone de mauvais temps.

Il n'y a pas de service de message d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) pour le lac Williston. Les METAR de l'aéroport de Mackenzie, situé à environ 50 milles au sud du lieu de l'accident, indiquent que les chutes de neige ont commencé peu après 11 h dans cette région, réduisant la visibilité à 1 mille. Les prévisions régionales pour le nord de la Colombie-Britannique faisaient état de visibilités de 1 à 3 milles dans la faible neige en grains et la bruine. On annonçait également des plafonds entre 500 et 1 000 pieds agl avec un ciel obscurci, situation qui devait persister dans toutes les vallées.

Le vol ayant mené à l'accident s'est déroulé dans un espace aérien non contrôlé. Pour les vols VFR effectués à une altitude inférieure à 1 000 pieds agl dans un espace aérien non contrôlé, la visibilité en vol doit être d'au mois 2 milles et l'avion doit rester à l'écart des nuages.Note de bas de page 5

Analyse

Pour terminer son vol, le pilote n'avait pas beaucoup de choix. Les rapports météorologiques concernant la région de Tsay Keh faisaient état d'un ciel couvert, ce qui aurait empêché le pilote de trouver une zone dégagée pour faire une descente, comme il l'avait fait pendant son approche vers Bear Valley. Le seul aéroport de la région qui possède les équipements pour faire une approche IFR est l'aéroport de Mackenzie, situé à 50 milles de là.. S'il y avait eu une procédure d'approche IFR à l'aéroport de Tsay Keh (ou à l'un des aéroports voisins), le pilote aurait eu le choix de poursuivre son vol en IFR. Il aurait pu quitter Bear Valley pour atteindre la zone où le ciel était dégagé qui se trouvait à l'est de l'aéroport, pour monter jusqu'à l'altitude minimale de croisière et se rendre à destination, où il aurait pu effectuer une approche IFR. Vu l'absence d'approche IFR à l'extrémité nord du lac Williston et le ciel couvert, le pilote n'avait d'autre choix que d'essayer de terminer le vol en VFR.

Le pilote s'est retrouvé dans des averses de neige où la visibilité était inférieure à la visibilité minimale requise pour garder le contact visuel avec le sol dans une région où le relief faisait en sorte que le pilote devait effectuer un virage serré pour s'écarter des averses de neige. Le pilote aurait alors dû se tenir près de la surface gelée du lac pendant le virage pour retrouver des repères visuels. Au terme du virage, l'appareil a percuté la surface gelée du lac. Lorsque la visibilité est réduite dans la neige et qu'un appareil se trouve au-dessus d'un lac gelé recouvert de neige, il est alors très difficile, voire impossible, pour le pilote de l'appareil d'établir le contact visuel avec la surface puisqu'il n'est pas possible de distinguer la surface à cause de la neige. L'avion s'est mis en descente à l'insu du pilote, probablement parce que le pilote était concentré à rétablir le contact visuel avec la surface et qu'il ne surveillait pas son altimètre.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Les conditions météorologiques qui prévalaient dans les environs au moment de l'accident ne se prêtaient pas au vol à vue.
  2. Alors qu'il essayait d'établir de nouveau le contact visuel avec la surface, le pilote a laissé l'avion descendre au point où l'appareil a percuté la surface gelée du lac. Les conditions météorologiques et les conditions à la surface étaient telles qu'il était presque impossible de distinguer la surface gelée du lac.

Autres faits établis

  1. En l'absence d'installations d'observations météorologiques en route, le pilote ne pouvait qu'estimer les conditions météorologiques à partir des prévisions régionales et des rapports informels du personnel non spécialisé se trouvant au chantier.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .