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Rapport d'enquête aéronautique A14Q0148

Sortie de piste
Air Labrador Limited
de Havilland DHC-6-300, C-GKSN
La Tabatière (Québec)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 28 septembre 2014, un aéronef de Havilland DHC-6-300 Twin Otter (immatriculé C-GKSN, numéro de série 493) exploité par Air Labrador Limited, effectuait un vol nolisé de Lourdes-de-Blanc-Sablon (Québec) à La Tabatière (Québec), avec 2 membres d'équipage et 17 passagers à bord. L'aéronef s'est posé à environ 750 pieds au-delà du seuil de la piste 23. Pendant la phase de roulement, le commandant de bord a déterminé que l'aéronef ne s'arrêterait pas avant d'atteindre l'extrémité de la piste et a amorcé un virage vers la gauche à vitesse élevée pour s'engager sur la voie de circulation. L'aéronef a dérapé vers la droite et l'hélice droite a heurté un panneau d'identification de piste avant que l'aéronef ne s'immobilise. L'aéronef a été gravement endommagé. Personne n'a été blessé et il n'y a pas eu d'incendie. La radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz ne s'est pas déclenchée. L'incident s'est produit en plein jour, à 15 h 12, heure normale de l'Atlantique.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le 28 septembre 2014, vers 13 h 30Note de bas de page 1, l'équipage est arrivé à l'aéroport de Lourdes-de-Blanc-Sablon (CYBX) pour préparer un vol nolisé, à destination de La Tabatière (CTU5) (Québec). Le premier officier (P/O) a effectué la vérification extérieure avant le vol et 17 passagers ont pris place à bord de l'aéronef.

L'aéronef, un de Havilland DHC-6-300 Twin Otter (immatriculé C-GKSN, numéro de série 493) exploité par Air Labrador Limited, a décollé à 14 h 37 selon les règles de vol à vue (VFR). Le commandant de bord a effectué le décollage et, une fois en vol, a remis les commandes au P/O. Pour le reste du vol, le P/O a été le pilote aux commandes (PF) et le commandant de bord, le pilote qui n'est pas aux commandes (PNF).

Vers 15 h 10, le P/O a fait un exposé d'approche.

Quatre-vingt-dix secondes plus tard, le P/O a demandé l'exécution des vérifications avant l'atterrissage, puis 10 secondes après, l'exécution des vérifications d'atterrissage finales. Les volets étaient réglés à 20° et l'aéronef était configuré pour l'atterrissage.

À 15 h 12 min 17 s, à une altitude d'environ 200 pieds au-dessus du sol (agl), le commandant de bord a posé au P/O une question sans rapport avec les opérations. Environ 10 secondes plus tard, le radioaltimètre affichait 10 pieds

À 15 h 12 min 32 s, après avoir flotté pendant 6,3 secondes, l'aéronef s'est posé à environ 750 pieds au-delà du seuil de la piste 23 qui fait 1649 pieds de long (figure 1).

Figure 1. Image satellite de l'aéroport de La Tabatière montrant le point de toucher des roues approximatif et le point où l'aéronef s'est immobilisé (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Image satellite de l'aéroport de La Tabatière montrant le point de toucher des roues approximatif et le point où l'aéronef s'est immobilisé

Au toucher des roues, le commandant de bord a pris les commandes de l'aéronef, a immédiatement sélectionné l'inversion de poussée et a freiné. Le commandant de bord a déterminé que l'aéronef ne pourrait pas être immobilisé avant d'atteindre l'extrémité de la piste et a amorcé un virage serré vers la gauche pour s'engager sur la voie de circulation.

Au cours du virage, un pneu a heurté un feu de bord de piste, et l'hélice droite a percuté un panneau d'identification de piste avant que l'aéronef ne s'immobilise (figure 1). Des débris du panneau ont pénétré le fuselage juste derrière la porte droite du poste de pilotage. En dérapant, l'aéronef est passé à moins de 3 pieds de quitter la surface de la voie de circulation et de faire une chute importante.

L'équipage a coupé les moteurs et a évacué l'aéronef en même temps que les passagers. La radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz ne s'est pas déclenchée.

1.2 Blessés

Tableau 1. Blessés
  Équipage Passagers Autres Total
Tués
Blessés graves
Blessés légers
Indemnes 2 17 19
Total 2 17 19

1.3 Dommages à l'aéronef

La roue avant a été détruite et la roue droite du train principal a été fortement endommagée lorsque leurs pneus se sont séparés de leurs talons.

L'hélice droite, le moteur droit et la structure de la nacelle droite ont subi des dommages importants lorsque l'hélice a percuté le panneau d'identification de piste.

Des débris projetés contre le côté droit de l'aéronef ont perforé le revêtement du fuselage directement derrière la porte droite du poste de pilotage, ce qui a déformé la structure et rendu impossible l'ouverture de la porte (photo 1). L'aéronef a été gravement endommagé.

Photo 1. L'aéronef en cause, après s'être immobilisé à côté de la voie de circulation (Source : Randy Jones)
L'aéronef en cause, après s'être immobilisé à côté de la voie de circulation

1.4 Autres dommages

Un feu de bord de piste a été cassé et le panneau d'identification de piste détruit.

1.5 Renseignements sur le personnel

Les dossiers indiquaient que l'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Rien n'indique que la fatigue ait pu nuire au rendement de l'équipage.

Tableau 2. Renseignements sur le personnel
  Commandant de bord Premier officier
Licence de pilote Licence de pilote professionnel – Avion (CPL-A) Licence de pilote professionnel – Avion (CPL-A)
Date d'expiration du certificat médical 1er janvier 2015 1er juillet 2015
Total d'heures de vol 23 000 435
Heures de vol sur type 20 000 235
Heures de vol – 30 derniers jours 55,9 88,5
Heures de vol – 90 derniers jours 194,3 235
Heures de congé avant la période de travail 12 12

Le commandant de bord était à l'emploi d'Air Labrador Limited (Air Labrador) depuis 17 ans et a piloté l'aéronef Twin Otter en cause de nombreuses fois à destination de CTU5.

Au cours des mois qui ont précédé l'événement, le commandant de bord vivait un état de stress en raison d'un problème familial qui s'est intensifié 2 jours avant l'événement. Certains membres du personnel de l'entreprise, notamment le directeur, Opérations aériennes, et le chef de la direction, étaient au courant des problèmes persistants du commandant de bord. D'autres membres du personnel de l'entreprise ont indiqué avoir remarqué, au cours des derniers mois, que le commandant de bord semblait distrait lors des vols.

Air Labrador a recruté le P/O en juillet 2013; ce dernier pilotait pour la compagnie depuis juillet 2014. Le P/O avait piloté à destination de CTU5 environ 12 fois avec le commandant de bord en cause. En raison des tendances à la distraction du commandant de bord, le personnel de la compagnie a soupesé son jumelage au P/O pour s'assurer de la complémentarité des membres de l'équipage, et ce, avant d'autoriser l'aéronef à partir.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

Le de Havilland Canada DHC-6 Twin OtterNote de bas de page 2 est un aéronef non pressurisé à aile haute avec train d'atterrissage tricycle fixe. Il est motorisé par 2 turbopropulseurs entraînant des hélices tripales avec mise en drapeau et à pas réversible. L'aéronef est certifié pour les vols à un seul pilote et peut transporter un maximum de 20 passagers en fonction de la configuration des sièges.

Fabriqué en 1976, l'aéronef en cause totalisait 33 032,4 heures de vol depuis sa sortie de l'usine jusqu'au moment de l'événement. Les dossiers indiquaient que l'avion était homologué, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées, et ne présentait aucune anomalie connue avant le vol en cause.

1.6.1 Procédure d'atterrissage normal

Le manuel d'utilisation du DHC-6-300 indique qu'un atterrissage normal se fait avec les volets réglés à 20° ou à 37,5°; le manuel de vol du DHC-6-300 recommande le réglage des volets à 20° pour toutes les opérations normales lorsque la distance d'atterrissage le permetNote de bas de page 3.

Les distances d'atterrissage pour une VREFNote de bas de page 4 donnée sont calculées en fonction des critères suivants :

Pour obtenir la distance d'atterrissage avec des volets réglés à 20°, il faut multiplier par 1,3 la distance d'atterrissage appropriée pour des volets réglés à 37,5° mentionnée dans le manuel de vol

Conformément aux critères du manuel de vol, les enquêteurs ont calculé que la distance d'atterrissage avec des volets réglés à 37,5° était de 1395 piedsNote de bas de page 5 et de 1814 pieds avec des volets réglés à 20°Note de bas de page 6.

Selon le manuel de vol, la décision de remettre les gaz devrait être prise avant que les volets ne soient sortis au-delà de 10°. Si les volets sont réglés à 10° et les manettes de commande des hélices poussées à fond vers l'avant, les performances et le pilotage de l'aéronef pendant la manœuvre de remise des gaz seront très similaires à ceux d'un décollage normal.

La pratique propre à Air Labrador est d'atterrir avec des volets réglés à 20°. Tout atterrissage nécessitant des volets à 37,5° est considéré comme hors norme. Lorsqu'un atterrissage requiert des volets réglés à 37,5°, Air Labrador fait appel à des pilotes qui ont été formés au décollage et à l'atterrissage courtsNote de bas de page 7.

1.6.2 Piste sans revêtement en dur

Les données de performance à l'atterrissage du DHC-6-300 indiquées dans le manuel de vol sont valides seulement pour une surface dure et sèche. Les distances d'atterrissage du manuel de vol proviennent de démonstrations de distances d'atterrissage, qui mettent en œuvre des techniques d'atterrissage plus énergiques que celles utilisées pendant les opérations normales. Les caractéristiques de surface d'une piste peuvent nuire à la performance de freinage de l'aéronef et, de ce fait, augmenter la distance d'arrêt pendant l'atterrissage. La probabilité d'une sortie en bout de piste peut augmenter lors de l'atterrissage sur une piste sans revêtement en dur dans des conditions restrictives.

Air Labrador détient une spécification d'exploitation de Transports Canada (TC)Note de bas de page 8, datée du 8 novembre 2010, qui lui permet d'exploiter des aéronefs à hélices à partir ou à destination de surfaces non préparées, qui ne sont pas particulièrement abordées dans le manuel de vol. Selon les termes de cette spécification, l'exploitant aérien est tenu de se conformer à l'alinéa 724.44 des Normes de service aérien commercial (NSAC), qui ont été modifiées le 30 juin 2006. En vertu de l'alinéa 724.44 des NSAC, pour calculer la distance d'atterrissage sur une piste en gravier nécessaire à un aéronef DHC-6-300, il faut ajouter un facteur de 10 % aux données de performance pour une surface dure et sèche. Aucun crédit d'inversion de poussée ne peut être utilisé dans ce calcul.

En tenant compte de ce facteur de 10 % pour l'aéronef en cause, la distance d'atterrissage calculée augmente à 1534 pieds avec des volets sortis à 37,5° et à 1994 pieds avec des volets sortis à 20°.

Les équipages de Twin Otter d'Air Labrador effectuent souvent des vols vers les mêmes destinations sur des routes régulières et ils ne consultent pas toujours le tableau de performance d'atterrissage. En conséquence, les calculs de distance d'atterrissage ne sont pas effectués pour chaque atterrissage parce que la longueur de la piste n'est pas perçue comme une menace. Au moment de l'événement, le tableau de performance des distances d'atterrissage contenait une note informant les pilotes d'ajouter 10 % pour les pistes en gravier.

Air Labrador avait effectué des vols réguliers vers CTU5 pendant les 8 années qui ont suivi la modification de l'alinéa 724.44 des NSAC en 2006. Pendant cette période, la politique d'Air Labrador était d'atterrir avec les volets réglés à 20°. Le jour de l'événement, les conditions, avec des volets à 20°, auraient requis une distance d'atterrissage de 1994 pieds. Or, la piste 23 de CTU5 mesure 1649 pieds.

1.7 Renseignements météorologiques

Lourdes-de-Blanc-Sablon, l'aéroport le plus proche enregistrant les conditions météorologiques, se situe à 77 milles marins (nm) à l'est de CTU5. À 15 h, le bulletin météorologique indiquait : vents 300° vrais à 4 nœuds, visibilité de 8 milles terrestres (sm), quelques nuages à 800 pieds agl, nuages fragmentés à 2000 pieds agl, ciel couvert à 5000 pieds agl, température de 11 °C, point de rosée de 9 °C et calage altimétrique de 29,55 pouces de mercure.

L'équipage a signalé que les conditions météorologiques à CTU5 étaient les suivantes : bonne visibilité, pas de précipitations et vents calmes. Les conditions météorologiques n'ont pas été retenues comme ayant contribué à cet événement.

1.8 Aides à la navigation

CTU5 n'est desservi par aucune aide à la navigation basée au sol.

1.9 Communications

CTU5 n'est desservi par aucun service de communications basé au sol.

1.10 Renseignements sur l'aérodrome

Seuls des vols selon les règles de vol à vue (VFR) sont possibles à l'aéroport CTU5. Ce dernier comprend une piste en gravier (05/23) de 1649 pieds de long sur 82 pieds de large (annexe A). La piste se prolonge sur 100 pieds à chaque extrémité. Au-delà de ces prolongements, des dénivellations importantes peuvent atteindre quelque 90 pieds (photo 2).

Photo 2. L'aéronef en cause à côté de la voie de circulation près de l'extrémité ouest de la piste 23. Vue des caractéristiques du relief (Source : Air Labrador)
L'aéronef en cause à côté de la voie de circulation près de l'extrémité ouest de la piste 23. Vue des caractéristiques du relief

La piste 23 dispose d'un éclairage d'intensité moyenne au niveau du seuil, des extrémités et des bords. Un indicateur de trajectoire d'approche de précision (PAPI), approprié à l'aéronef DHC-6, est situé en approche de la double piste. Les feux de l'aéroport et de PAPI sont télécommandés à l'aide d'un dispositif de balisage lumineux d'aérodrome. L'aérodrome a une licence octroyée par TC et est entretenu par Transports Québec.

Les feux de PAPI et de piste n'ont pas été utilisés pendant le vol en causeNote de bas de page 9.

1.11 Enregistreurs de bord

1.11.1 Aéronef à l'étude

L'aéronef était équipé d'un enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR), tel que requis à l'alinéa 605.33 du Règlement de l'aviation canadien (RAC)Note de bas de page 10. Le CVR a été envoyé au laboratoire du BST; les données de l'événement étaient intactes. L'aéronef n'était pas doté d'un enregistreur de données de vol (FDR), ce qui ne contrevenait pas à la réglementation en vigueur.

1.11.2 Avantages des données de vol enregistrées

Les enquêteurs ont été incapables de déterminer les raisons à l'origine d'un accident dans de nombreux rapports d'enquête aéronautique du BST en raison de l'absence de dispositifs d'enregistrement de bord. Les avantages des données de vol enregistrées dans le cadre des enquêtes sur les accidents d'aéronefs sont bien connus et documentés.

La technologie des FDR légers est désormais disponible. Ces systèmes peuvent enregistrer les données de performance des aéronefs, ainsi que les données vidéo et audio de poste de pilotage. Un nombre sans cesse croissant d'exploitants du monde entier les adoptent.

Dans son rapport d'enquête aéronautique A11W0048, le Bureau recommandait que :

Le ministère des Transports, en collaboration avec l'industrie, élimine les obstacles et élabore des pratiques recommandées en ce qui a trait à la mise en œuvre du suivi des données de vol et à l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers par les exploitants commerciaux qui ne sont pas actuellement tenus de munir leurs aéronefs de ces systèmes.
Recommandation A13-01 du BST

Transports Canada appuie cette recommandation et a décidé d'ébaucher une circulaire d'information en 2015-2016 pour décrire les pratiques recommandées relatives aux programmes de suivi des données de vol. En outre, TC mettra en place des groupes de discussion pour cerner les obstacles inhérents à son mandat, et faire des recommandations pour surmonter ces obstacles, qui nuisent à l'installation de systèmes légers d'enregistrement des données de vol par les exploitants commerciaux qui ne sont pas tenus d'en doter leurs aéronefs.

Le Bureau considère comme encourageant que TC ait l'intention de régler les enjeux identifiés dans la recommandation. Toutefois, le travail se poursuit. En conséquence, le BST estime que la réponse de TC à la recommandation dénote une « intention satisfaisante ».

L'absence d'enregistrement de données de vol pourrait empêcher une enquête de déterminer et de communiquer d'importantes lacunes au chapitre de la sécurité et ainsi d'améliorer la sécurité des transports.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

Sans objet.

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Sans objet.

1.14 Incendie

Sans objet.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

Sans objet.

1.16 Essais et recherches

1.16.1 Rapports du laboratoire du BST

Le BST a achevé les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Généralités

Labrador Airways Limited a été fondée en 1948; son siège social se trouve à Happy Valley-Goose Bay (Terre-Neuve-et-Labrador). L'entreprise a été vendue en 2010 et renommée Air Labrador Limited; sa base d'exploitation est demeurée la même. L'entreprise exploite un service de taxi aérien assujetti à la sous-partie 703 du RAC, et un service aérien de navette assujetti à la sous-partie 704 du RAC. Sa flotte comprend 6 Twin Otter, 1 Cessna Caravan, 2 Beechcraft 1900D et 2 King Air 100.

Les commandants de bord de l'entreprise sont chevronnés, pour la plupart, et il y a très peu de roulement de personnel à leur niveau. Les candidats aux postes de premier officier (P/O) sont en majorité recrutés directement auprès des écoles de pilotage et initialement engagés en qualité de préposés au suivi des vols. Ils accèdent aux postes de pilote à mesure que ces postes deviennent disponibles, ce qui peut prendre de plusieurs mois à un an, selon le roulement de personnel au sein des P/O.

1.17.2 Sécurité aérienne chez Air Labrador

Air Labrador n'a pas de système de gestion de la sécurité (SGS) et la réglementation ne l'y oblige pas.

En 2007, Labrador Airways Limited exploitait des vols assujettis à la sous-partie 705 du RAC. TC a donc requis de l'entreprise qu'elle mette progressivement en œuvre un SGS et le manuel SGS nécessaire à cet effet. À cette fin, l'entreprise avait entrepris de mettre en œuvre un SGS et avait terminé la 3e des 4 phases requises, incluant l'élaboration d'un manuel SGS. Au printemps 2009, l'entreprise a abandonné ses activités assujetties à la sous-partie 705 du RAC et le processus de certification du SGS a cessé.

La partie du manuel SGS qui traite de la notification des incidents est la seule à être utilisée régulièrement. Le directeur général, le chef pilote et le responsable de la sécurité examinent les rapports d'incident opérationnel en appliquant une approche classique de la gestion de la sécurité. Cette approche repose principalement sur la conformité à la réglementation, ainsi que sur la réaction à des événements déplorables, ce qui inclut l'identification de leurs causes sous-jacentes et la prescription de mesures particulières pour en éviter la répétition. On ne procède ni à la détection proactive des dangers ni à l'évaluation des risques.

Certes, l'entreprise invite les recrues à lire les lignes directrices du manuel SGS, mais rien n'oblige les pilotes chevronnés à se familiariser avec le contenu de ce manuel.

1.17.3 Réaction aux incidents et accidents à Air Labrador

Le 27 mars 2013, un aéronef DHC-6-300 Twin Otter d'Air Labrador a eu un accident d'atterrissage à l'aéroport de St. Anthony (Terre-Neuve-et-Labrador)Note de bas de page 11. Pendant l'approche, le commandant de bord et le premier officier (P/O), qui était le PF, ont discuté de leurs préoccupations relatives à l'approche et à l'atterrissage à cause des vents traversiers qui soufflaient à l'aéroport. Juste avant l'atterrissage, le P/O a éprouvé de la difficulté à conserver la maîtrise de l'aéronef. Le commandant de bord a demandé au P/O s'il voulait transférer les commandes, ce que le P/O a accepté. Le transfert des commandes s'est effectué moins de 2 secondes avant le toucher des roues. Une fois les commandes de l'aéronef transférées au commandant de bord, il ne restait pas suffisamment de temps pour positionner l'aéronef de manière à réussir l'atterrissage en raison des forts vents traversiers.

En réaction à l'accident de St. Anthony, Air Labrador a décidé de régler les problèmes de sécurité les plus pressants (qu'elle jugeait avoir causé l'événement) en prenant certaines mesures, dont :

  1. la rétrogradation temporaire du commandant de bord au poste de P/O en attendant qu'il termine une formation supplémentaire;
  2. La modification des procédures d'utilisation normalisées (SOP) propres aux Twin Otter de l'entreprise pour stipuler que dorénavant, le commandant de bord devrait effectuer tous les atterrissages par vents traversiers excédant 10 nœuds, avec la nuance, toutefois, que s'il juge le P/O apte à effectuer l'atterrissage, il peut, à sa discrétion, l'autoriser à le faire;
  3. La modification des SOP propres aux Twin Otter de l'entreprise pour interdire tout atterrissage par vents traversiers plus forts que 30 nœuds à 90°.

En réaction à l'événement qui s'est produit à l'aéroport CTU5, Air Labrador a procédé à un examen de l'accident et a rétrogradé le commandant de bord au poste de P/O pour une durée de 500 heures de vol. La compagnie a publié une directive contraignant les P/O comptant moins de 1000 heures sur type à effectuer des atterrissages seulement sur des pistes de 2000 pieds ou plus. Un P/O ayant plus de 1000 heures sur type à son actif pourrait, à la discrétion du commandant de bord, effectuer ces atterrissages.

1.17.4 Surveillance d'Air Labrador par Transports Canada

Transports Canada (TC) élabore et gère des politiques et des règlements relatifs au secteur de l'aviation civile. En outre, TC applique des procédures de surveillance, dont les inspections de validation de programme (IVP)Note de bas de page 12, pour mesurer l'efficacité opérationnelle et la conformité au RAC.

Les IVP se déroulent sur une base régulière et leur fréquence est ajustée, si nécessaire, en fonction des indicateurs de risques. Selon les besoins et les ressources disponibles, TC effectue des inspections et des interventions supplémentaires, y compris d'occasionnelles vérifications des aéronefs présents à la base de l'exploitant.

En mars 2011 et octobre 2012, TC a effectué des IVP relatives à la navigabilité d'Air Labrador. En mars 2012, TC a effectué des IVP relatives aux opérations aériennes, puis de nouveau en septembre 2014, quelques jours avant l'événement. Les IVP ont été effectuées conformément à l'Instruction visant le personnel SUR-001 de l'Aviation civile de TCNote de bas de page 13, et autres documents d'instructions supplémentaires.

Des plans de mesures correctives, que TC a acceptés par la suite, ont servi à résoudre toutes les non-conformités relevées par les IVP. Le ministère a effectué une inspection de suivi le 9 décembre 2015 pour s'assurer que le plan de mesures correctives proposé pour l'IVP de septembre 2014 a corrigé toutes les lacunes. En ce qui concerne les IVP antérieures, le suivi a été effectué et ces dossiers sont considérés comme clos.

TC a effectué une évaluation d'Air Labrador à la suite de l'événement en cause et n'a pas modifié le calendrier des IVP de l'entreprise.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Les accidents à l'approche et à l'atterrissage figurent sur la Liste de surveillance 2014

La Liste de surveillance renferme les enjeux qui font courir les plus grands risques au système de transport du Canada; le BST la publie pour attirer l'attention de l'industrie et des organismes de réglementation sur les problèmes qui nécessitent une intervention immédiate. Comme l'événement à l'étude l'a démontré, des accidents à l'atterrissage continuent de se produire aux aéroports canadiens. Le BST demande à TC et aux exploitants d'en faire davantage pour réduire le nombre d'approches non stabilisées qui se poursuivent jusqu'à l'atterrissageNote de bas de page 14. TC doit également terminer son analyse fondée sur les risques et apporter les modifications nécessaires à la réglementation. Aux aéroports, des solutions adaptées doivent être mises en place afin de prolonger les aires de sécurité à l'extrémité des pistes ou d'installer d'autres systèmes et structures conçus pour arrêter en toute sécurité les avions qui sortent en bout de piste.

En 1998, la Flight Safety Foundation concluait que : [Traduction] « [...] ne pas reconnaître la nécessité d'une approche interrompue et ne pas en exécuter une, le cas échéant, est l'une des causes principales d'accidents à l'approche et à l'atterrissageNote de bas de page 15. » Selon le « Go-around Safety Forum » (26 juin 2013) : [Traduction] « Ne pas prendre la décision de remettre les gaz est le principal facteur de risque en matière d'accidents à l'approche et à l'atterrissage et la principale cause de sortie de piste à l'atterrissage. Pourtant, moins de 5 % des approches non stabilisées conduisent à une remise des gazNote de bas de page 16. »

[Traduction] « Une approche interrompue ou remise des gaz constitue une phase de vol normaleNote de bas de page 17. » Les procédures d'exécution d'une remise des gaz font partie de la formation initiale et des formations périodiques des pilotes. Pendant la formation, les pilotes sont préparés à cette manœuvre et l'exécutent en environnement contrôlé. L'altitude à laquelle on prend la décision de remettre les gaz conditionne les défis liés à cette manœuvre. Si une remise des gaz s'avère nécessaire, le PF doit immédiatement agir en conséquence. Plus l'aéronef se trouve proche du sol, plus cette décision devient critique, car l'énergie de l'aéronef est faible.

La procédure d'exposé d'approche d'Air Labrador n'exige pas que l'équipage discute d'un point de toucher des roues sur la piste ou de la nécessité de remettre les gaz si ce point a été dépassé. Au sein de l'entreprise, on s'attend à ce que les pilotes s'appuient sur leurs connaissances et leur expérience pour évaluer la situation et y réagir en conséquence, notamment décider du moment où il faut remettre les gaz. Les SOP ne contiennent aucune donnée sur les menaces potentielles liées aux approches non stabilisées et l'entreprise n'encourage pas activement les pilotes à penser à la manœuvre de remise des gaz.

Cette manœuvre est rarement exécutée. Selon le « Go-around Safety Forum », un pilote professionnel en service court-courrier ne remet les gaz, en moyenne, que 1 ou 2 fois par an. Cette rareté pourrait en partie expliquer la réticence des pilotes à exécuter cette manœuvreNote de bas de page 18.

1.18.2 Conscience de la situation

La notion de conscience de la situation (CS) individuelle exprime comment un membre de l'équipage interprète et prévoit les changements d'état de l'aéronef à chaque instant, et y réagit. L'équipage de conduite doit fonder ses actions sur une compréhension mutuelle de l'état en cours de l'aéronef, du plan de vol prévu et de ce qui menace ces activités, afin de pouvoir agir de manière coordonnée, pragmatique et sécuritaire. La précision à laquelle un pilote a conscience de la situation pendant le vol l'aide à prendre des décisions judicieuses, car il est alors à même de prévoir les résultats et les conséquences potentielles de ses actions de manière informée et exacte.

Au sein d'un équipage multiple, la CS partagée correspond à l'état dans lequel les membres d'équipage partagent le même modèle mental, la même compréhension de la situation de vol, tels que le décollage ou l'atterrissage avec un pilote aux commandes et l'autre à la surveillance. Un équipage développera et maintiendra une CS partagée grâce à des comportements distincts, d'une part, et continus, de l'autre. Les comportements distincts comprennent la planification de vol, les exposés en vol et l'identification de points clés du vol, tels que les altitudes minimales atteintes. Ces activités sont des points de contrôle prévus pour décrire l'état en cours et les plans ultérieurs, qui donnent aussi l'occasion de vérifier si tous les membres de l'équipage interprètent les choses de la même façon.

Les comportements continus englobent la gestion des menaces et des erreurs, les annonces de changements d'état de l'aéronef et de réglage ou mode des instruments, ainsi que la communication des modifications apportées aux plans. Ces comportements assurent la communication de l'information et des changements d'état entre les membres de l'équipage pour actualiser en continu la CS partagée. De tels comportements continus dépendent de la formation et de l'approche opérationnelle adoptées par les exploitants.

À la différence de la CS partagée, la CS d'équipe représente le degré auquel chaque membre d'une équipe (ou d'un équipage) possède la CS requise pour assumer ses responsabilitésNote de bas de page 19. Elle comprend la CS individuelle de chaque membre de l'équipe et le degré de compréhension partagée par tous. L'étroite coordination d'une équipe, soit le transfert d'information entre ses membres, constitue un élément important de la CS d'équipe. Ce transfert ne devrait pas se limiter aux données, mais s'élargir au partage de la compréhension de la situation des membres d'une équipe et de leurs projectionsNote de bas de page 20.

La distraction ou l'inattention nuiront à la capacité d'un pilote d'être attentif à des stimuli cruciaux provenant de son environnement, et donc à sa conscience de la situationNote de bas de page 21.

1.18.3 Exposés

Les SOP relatives aux Twin Otter d'Air Labrador requièrent de l'équipage d'effectuer un exposé par approche pour garantir que le PNF est conscient des intentions du PF et pour identifier toutes les tâches que le PNF devra exécuter.

Un exposé d'approche VFR type comprend l'orientation de la piste et le nom de l'aéroport, l'altitude de circuit, la masse de l'aéronef, la position des volets, les vitesses d'approche et VREF, ainsi que l'altitude de franchissement d'obstacles.

1.18.4 Liste de vérification

Les SOP d'Air LabradorNote de bas de page 22 stipulent que le destinataire doit accuser réception de toute communication opérationnelle en vol entre les membres de l'équipage de conduite. Le mot « Check » signifie que l'on accuse réception d'une information de situation.

La liste de vérification avant l'atterrissage et la liste de vérification d'atterrissage doivent être exécutées en format « question et réponse ». Toutefois, tous les éléments ne sont pas exprimés verbalement, car cela remet en cause le silence souhaité dans le poste de pilotageNote de bas de page 23. Les SOP relatives aux Twin Otter d'Air Labrador mentionnent que la liste de vérification d'atterrissage est de format « question et réponse » au sous-alinéa 2.20.1 : Normal Procedures [Procédures normales]. Or, le sous-alinéa 5.7.1 : Normal Landing [Atterrissage normal] mentionne qu'elle est de format « lecture et exécution ».

Les procédures de format « question et réponse » exigent du PF de demander la liste de vérification appropriée, du PNF de lire la question, puis du PF d'y répondre de manière appropriée. La liste de vérification de format « lecture et exécution » ne requiert aucune réponse verbale de la part du PF.

Pendant l'approche et l'atterrissage à l'étude, le PNF n'a pas répondu à la demande du PF concernant les vérifications avant l'atterrissage et les vérifications d'atterrissage finales.

Dans les situations à haut risque, comme une manœuvre d'atterrissage, suivre la liste de vérification ou la procédure appropriée procure aux pilotes la ligne de conduite la plus sécuritaire et la plus indiquée dans la plupart des cas. Cependant, si une certaine discipline à l'égard des listes de vérification et des procédures n'est pas enseignée, mise en pratique, renforcée et surveillée, il y a un risque que des pilotes s'écartent des procédures prescrites ou réagissent de façon inappropriée à des situations inhabituelles.

L'enquête a confirmé que les commandants de bord chevronnés étaient moins enclins à respecter le protocole des listes de vérification que les pilotes qui avaient été récemment promus au poste de commandant de bord.

1.18.5 Poste de pilotage silencieux

Les règles relatives au poste de pilotage silencieux, exigeant des pilotes qu'ils s'abstiennent de se consacrer à des activités non essentielles et de tenir des conversations sans rapport aux opérations, sont prévues pour réduire la distraction pendant les phases de vol critiques et garantir l'exécution sans interruption des tâches cruciales. Dans les SOP d'Air Labrador, le poste de pilotage silencieux est requis pour toutes les opérations aériennes sous 3000 pieds, sauf en vol de croisière. Seules une urgence ou la communication de renseignements essentiels pour la sécurité des passagers ou de l'aéronef font exception à la règle.

Des recherches sur les paroles échangées par des pilotes au cours d'une simulation de volNote de bas de page 24 montrent que les caractéristiques prosodiques du discours, par exemple la fréquence des mots par unité de temps, augmentent en fonction de la charge de travail mental accrue.

Pendant l'approche finale, le commandant de bord a posé au P/O une question sans rapport aux opérations. Le P/O lui a répondu brusquement, par un seul mot.

1.18.6 Relâchement de la vigilance

La performance des pilotes qui effectuent des vols vers les mêmes destinations suivant le même circuit peut se transformer en automatisme. Il est possible que les pilotes s'attardent moins aux détails et deviennent moins vigilants. Le relâchement de la vigilance résulte de l'excès de confiance, de la répétition des actions, de la satisfaction à l'égard du statu quo, de la familiarité et de l'ennui. Il est associé à l'expérience et à la confiance, toutes deux propres aux pilotes qui ont de nombreuses heures de vol à leur actif.

Le relâchement de la vigilance des pilotes peut également nuire à la capacité de conserver la CS; il a été un facteur contributif dans de nombreux incidents et accidents d'aviation. Lorsque les pilotes reçoivent des renseignements sur l'environnement auxquels ils s'attendent, ils tendent à réagir rapidement et sans erreur. Toutefois, lorsqu'ils reçoivent des renseignements qui ne répondent pas à leurs attentes (et à leur CS), ils tendent à réagir lentement ou de manière inappropriéeNote de bas de page 25.

Alors qu'il était à l'emploi d'Air Labrador, le commandant de bord a régulièrement effectué le vol vers La Tabatière sans incident.

1.18.7 Gestion des ressources de l'équipage

L'objectif de la gestion des ressources de l'équipage (CRM) est de réduire l'erreur humaine en offrant aux équipages de conduite diverses stratégies permettant d'améliorer leur efficacité. Selon la définition couramment acceptée, la CRM désigne l'utilisation appropriée de toutes les ressources humaines, matérielles et informationnelles mises à la disposition de l'équipage de conduite pour assurer la sécurité et l'efficacité des opérations aériennes. Des études ont montré que les pilotes qui ont récemment suivi une formation en CRM sont mieux préparés à gérer des situations inusitées que ceux qui n'en ont pas suiviNote de bas de page 26.

En 1995, le Bureau de la sécurité des transports (BST) a publié la recommandation A95-11, demandant à Transports Canada (TC) de mettre en œuvre des lignes directrices en matière de formation en CRM et en prise de décision à l'intention de tous les exploitants et de tout le personnel navigant œuvrant dans l'aviation commerciale. La réponse de TC ciblait uniquement les exploitants assujettis à la sous-partie 705 du RAC sans inclure ceux soumis aux sous-parties 703 et 704 du RAC. Par conséquent, le BST a jugé que la réponse de TC dénotait une attention en partie satisfaisanteNote de bas de page 27.

Le 9 octobre 2009, le BST a recommandé ce qui suit :

Le ministère des Transports oblige les exploitants aériens commerciaux à dispenser une formation contemporaine en gestion des ressources de l'équipage (CRM) aux pilotes d'un taxi aérien relevant de la sous-partie 703 du Règlement de l'aviation canadien (RAC) et aux pilotes d'un service aérien de navette relevant de la sous-partie 704 du RAC
Recommandation A09-02 du BST

Dans ses réponses à la recommandation A09-02, TC acceptait cette dernière en principe et indiquait que l'organisme œuvrait à une réglementation qui rendrait la CRM obligatoire pour les services de taxi aérien et les services aériens de navette assujettis respectivement aux sous-parties 703 et 704 du RAC.

TC a récemment élaboré des normes de formation en CRM à l'intention des exploitants aériens commerciaux assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC. Ces dernières sont actuellement à l'état d'avis de proposition de modification (APM) dont TC prévoit la publication en 2016.

Selon la nature des commentaires reçus, TC a l'intention de mettre en œuvre la formation en CRM pour les exploitants et de la rendre obligatoire aux équipages de conduite et de cabine, aux régulateurs de vols et au personnel d'entretien associés à l'exploitation d'aéronefs.

Le Bureau se réjouit que les mesures prises relativement à cette recommandation aboutissent bientôt. Les mesures proposées devraient considérablement réduire ou éliminer la lacune de sécurité soulevée par le BST dans la recommandation A09-02. Tant que ces normes ne seront pas modifiées et entièrement appliquées, la lacune de sécurité perdurera. Le Bureau estime que la réponse dénote une intention satisfaisante.

Air Labrador n'assure pas de formation en CRM, et la réglementation ne l'y oblige pas. Le commandant de bord n'avait jamais suivi de formation en CRM alors que le P/O avait suivi une formation de 8 heures dans son école de pilotage.

Certes, les exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC, ne sont actuellement pas obligés d'assurer une formation en CRM à leurs équipages, mais rien ne les empêche de fournir à ces derniers une formation moderne en ce domaine, et ce, de manière proactive et volontaire.

1.18.8 Culture de sécurité organisationnelle

La culture de sécurité peut se décrire comme « la façon dont nous faisons les choses iciNote de bas de page 28 » ou « ce que les personnes à tous les échelons d'une organisation font et disent lorsque leur engagement à l'égard de la sécurité n'est pas scruté de prèsNote de bas de page 29 ». Selon l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) : [traduction] « La culture de sécurité organisationnelle définit les paramètres du rendement opérationnel accepté sur le lieu de travail en établissant les normes et les limites nécessaires [et] fournit la pierre angulaire pour la prise de décision des gestionnaires et des employésNote de bas de page 30. » La culture est profondément enracinée et son incidence sur la sécurité peut ne pas être immédiatement évidente pour les personnes qui œuvrent au sein de ces cultures.

Un des facteurs ayant la plus grande incidence sur la culture de sécurité est l'engagement des gestionnaires et leur style de gestion. L'OACI a décrit le rôle des gestionnaires dans la création d'une « bonne » culture de sécurité organisationnelle comme suit :

[Traduction] Les personnes les mieux placées pour prévenir les accidents en éliminant les risques inacceptables sont celles qui peuvent apporter des changements dans l'organisation, sa structure, sa culture organisationnelle, ses politiques et procédures, etc. Personne n'est en meilleure position pour produire ces changements que les gestionnairesNote de bas de page 31.

Les organisations diffèrent considérablement quant au niveau de risque toléré dans leurs activités. Les organisations qui adoptent une démarche proactive pour cerner et atténuer les risques sont considérées comme ayant une bonne culture de sécurité, tandis que les organisations dont la culture de sécurité est déficiente exercent leurs activités, consciemment ou non, avec des niveaux de risque plus élevés. Une organisation qui exerce ses activités avec un risque important est plus susceptible de subir un accident.

L'approche classique de la gestion de la sécurité est fondée sur la conformité aux règlements et une réponse réactive aux événements et aux accidents. Selon le Manuel de gestion de la sécurité (MGS) de l'OACI, les mesures de suivi peuvent donner lieu à des recommandations de sécurité ne s'adressant qu'à la préoccupation immédiate et particulière envers le problème de sécurité désigné comme cause de l'événement. On accorde peu d'importance aux autres conditions dangereuses qui, malgré leur présence, ne sont pas la cause de l'événement, même si elles présentent un potentiel de risque pour les opérations aériennes dans des circonstances différentesNote de bas de page 32.

Bien que cette perspective soit très appropriée pour déterminer ce qui s'est produit, elle l'est considérablement moins pour découvrir pourquoi cela s'est produit, ce qui est essentiel pour corriger la lacune de sécurité sous-jacenteNote de bas de page 33. En outre, il est stipulé dans le manuel :

[Traduction] Bien que la conformité avec la réglementation en matière de sécurité soit fondamentale pour la conception de pratiques saines dans ce domaine, on pense aujourd'hui qu'il faut aller bien au-delà. Les organisations qui se conforment simplement aux normes minimales définies par la réglementation ne sont pas bien placées pour identifier les problèmes de sécurité émergentsNote de bas de page 34.

[…]

Alors que les activités et la complexité ne cessent de croître dans le secteur mondial de l'aviation, la pertinence et l'efficacité des méthodes classiques de gestion de la sécurité ne sont plus aussi valables dans des contextes d'exploitation profondément modifiés, marqués par de nouveaux défis. Des méthodes différentes, évoluées, de compréhension et de gestion de la sécurité sont nécessairesNote de bas de page 35.

1.18.9 Systèmes de gestion de la sécurité

Transports Canada décrit un système de gestion de la sécurité (SGS) comme :

[...] une approche de type commercial à la sécurité. C'est un processus systématique, explicite et global de gestion des risques pour la sécurité. Comme tous les autres systèmes de gestion, un SGS précise une façon de déterminer les objectifs, un moyen de planification et une mesure du rendement. [...] Un système de gestion de la sécurité est intimement lié à l'organisation d'un organisme; il entre dans la culture de celle-ci et dans la manière de faire le travailNote de bas de page 36.

Comme l'a résumé le BST, dans son rapport d'enquête aéronautique A07A0134 :

Les pratiques modernes de gestion de la sécurité favorisent une recherche proactive des dangers, une identification des risques et l'adoption des meilleurs moyens de défense pour réduire les risques à un niveau acceptable. Ces principes doivent être enracinés dans la gestion de l'entreprise de façon à ce que les politiques, la planification, les procédures et la mesure des performances soient intégrées dans les opérations quotidienne.

Dans sa Liste de surveillance, le BST presse TC de mettre en œuvre une réglementation exigeant que tous les exploitants du secteur de l'aviation se dotent de procédures officielles de gestion de la sécurité. En outre, TC doit assurer la surveillance de ces procédures. Il demande aussi aux entreprises qui ont un système de gestion de la sécurité de démontrer qu'il fonctionne bien, c'est-à-dire qu'il permet de déceler les dangers et que des mesures de réduction des risques efficaces sont mises en œuvre. Enfin, si les entreprises ne peuvent pas assurer une gestion de la sécurité efficace, TC doit non seulement intervenir, mais le faire de façon à changer les pratiques d'exploitation non sécuritairesNote de bas de page 37.

1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

Il n'y avait aucune indication de panne d'un composant ou d'un système pendant le vol en question et la fatigue n'a pas été considérée comme un facteur contributif. L'analyse portera sur la raison pour laquelle l'aéronef en bon état de service a atterri environ à mi-piste, ainsi que sur la culture et les pratiques de sécurité de l'entreprise.

2.1 Approche et atterrissage

L'aéronef était configuré pour l'atterrissage conformément aux procédures d'utilisation normalisées (SOP) d'Air Labrador. Il n'y avait aucun vent arrière et aucune indication que l'équipage ait connu des problèmes avec l'aéronef. L'aéronef n'avait pas d'enregistreur de données de vol (FDR). En conséquence, il a été impossible de déterminer l'altitude ou la vitesse de l'aéronef lorsqu'il a franchi le seuil. L'aéronef a flotté pendant 6,3 secondes au-dessus de la piste et s'est posé à environ 750 pieds au-delà du seuil, ce qui a réduit la longueur de piste disponible pour immobiliser l'aéronef.

Les SOP d'Air Labrador en matière d'exposé d'approche n'exigent pas de discuter des menaces (telles que le dépassement par l'aéronef en vol d'un point de poser des roues préétabli) qui pourraient imposer à l'équipage de remettre les gaz. L'entreprise n'a ni SOP ni politique stipulant quand effectuer une remise des gaz et compte uniquement sur l'expérience des pilotes pour déterminer si cette manœuvre doit être exécutée. Comme aucun des 2 membres de l'équipage n'a perçu la longueur de la piste comme une menace, ils n'ont pas discuté du point à partir duquel il deviendrait impossible d'atterrir en toute sécurité.

Aucun des 2 pilotes n'a amorcé une remise des gaz alors que l'aéronef planait au-dessus de la piste, et ce, pendant plus de 6 secondes. Si les pilotes ne sont pas préparés à exécuter une remise des gaz à chaque approche, il y a un risque qu'ils ne soient pas prêts à réagir dans un cas où cette manœuvre devient impérative.

La politique d'Air Labrador est d'atterrir avec les volets à 20° et l'entreprise considère comme hors norme toute piste requérant un atterrissage volets sortis à 37,5°, même si le manuel de vol des Twin Otter indique que ce type d'atterrissage est normal. Avec les volets réglés à 20°, il aurait fallu à l'aéronef en cause une longueur de piste supérieure à celle qui est disponible à CTU5.

Le calcul de la longueur de piste introduit en 2006, qui tient compte de volets à 37,5° et d'un facteur de 10 % pour piste en gravier, aurait donné la longueur de piste requise pour l'atterrissage le jour de l'événement. L'équipage a sorti les volets à 20° pour atterrir. Ce faisant, il n'a pu réaliser la distance d'atterrissage dont le calcul est exigé dans le manuel de vol ni tenu compte du facteur de 10 % requis par la réglementation sur l'atterrissage sur des surfaces non préparées.

Si les tableaux de performance ne sont pas consultés, il y a un risque que la distance d'atterrissage nécessaire soit supérieure à la longueur réelle de la piste.

2.2 Poste de pilotage silencieux

Pour veiller à ce que les pilotes ne soient pas distraits pendant des phases de vol critiques, Air Labrador exige un poste de pilotage silencieux. Pendant l'approche finale, le commandant de bord a interrompu le premier officier (P/O) en lui posant une question sans rapport aux opérations. La réponse du P/O, un seul mot exprimé brusquement, est typique de ce que l'on peut attendre des caractéristiques prosodiques du discours résultant de la charge de travail mental accrue du P/O lors de l'atterrissage.

Si les équipages de conduite ne respectent pas les règles afférentes au poste de pilotage silencieux, ils peuvent être distraits pendant des phases de vol critiques, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.

2.3 Gestion des ressources de l'équipage

La formation en gestion des ressources de l'équipage (CRM) est conçue spécialement pour traiter une grande part du comportement identifié dans le présent rapport relativement à l'interaction entre les membres de l'équipage de conduite. Des études ont montré que les membres d'équipages formés en CRM travaillaient mieux en équipe et réagissaient plus efficacement aux situations exceptionnelles que les équipages sans formation en CRM. En outre, en l'absence de renforcement positif des concepts de la CRM au moyen de formations périodiques, les progrès comportementaux observés après une formation initiale tendent à disparaître.

À l'exception de quelques exploitants de services de taxi aérien et de services aériens de navette qui assurent, de manière volontaire, une formation en CRM à leurs pilotes, les autres ne le font pas. De plus, les entreprises qui fournissent volontairement de la formation d'appoint ne le font pas forcément de manière périodique.

Depuis 1995, le BST, au moyen de ses recommandations, demande que la formation en CRM devienne obligatoire pour tous les exploitants aériens au Canada, et pourtant, elle ne l'est pas encore pour les exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC. Si la formation en CRM n'est pas une exigence réglementaire, il est moins probable qu'elle soit adoptée par les exploitants. Résultat : la coordination de leurs équipages peut être moins probante.

Le commandant de bord n'avait pas suivi de formation en CRM. En 2012, le premier officier avait suivi 8 heures de formation en CRM, incluant des jeux de rôle et des études de cas, tout en effectuant une formation au pilotage dans le cadre d'un programme de diplôme de pilote professionnel. Ni l'un ni l'autre des pilotes n'a reçu d'autre formation en CRM à Air Labrador, et la réglementation ne l'exige pas.

Le stress occasionné par la situation personnelle du commandant de bord peut avoir causé une perte d'attention et de conscience de la situation pendant la phase d'atterrissage au cours du vol à l'étude. L'entreprise était au courant de sa situation personnelle et en a tenu compte en lui associant un P/O. Les préoccupations personnelles du commandant de bord peuvent également avoir contribué au non-respect des SOP et à la violation des règles relatives au poste de pilotage silencieux. Le commandant de bord s'est rendu compte que l'aéronef flottait alors que ce dernier avait déjà survolé la piste sur environ 750 pieds.

S'ils avaient bénéficié d'une formation en CRM, les membres de l'équipage auraient pu être en mesure d'exercer une surveillance réciproque de leur performance, de signaler rapidement toute déviation identifiée et d'atténuer les écarts. Un atterrissage long serait considéré comme une déviation, en particulier sur une piste courte et difficile.

Le commandant de bord a pris les commandes presque à mi-piste et ne disposait plus d'une longueur suffisante pour atterrir. Le commandant de bord connaissait très bien l'aéroport; aussi, il a viré vers la gauche et s'est engagé sur la voie de circulation pour éviter la dénivellation abrupte et les lignes électriques se trouvant à l'extrémité de la piste. L'aéronef a subi des dommages importants en raison du virage serré et du choc contre le panneau d'identification de la piste.

À défaut de formation en CRM, les pilotes peuvent ne pas être prêts à réagir à des situations qui peuvent compromettre la sécurité du vol.

2.4 Relâchement de la vigilance et utilisation des listes de vérification

Dans le cas des pilotes qui ont de nombreuses heures à leur actif et effectuent les mêmes vols tous les jours, le relâchement de la vigilance peut se glisser dans leurs activités quotidiennes. Les actions répétitives et routinières peuvent conduire au désengagement à l'égard de la tâche à accomplir et à un relâchement de la vigilance.

Le commandant de bord avait piloté de nombreuses fois jusqu'à l'aéroport en cause. Le jour de l'événement, il s'agissait d'un vol banal jusqu'à la phase d'atterrissage. Habitudes, familiarité, actions répétitives et confiance dans l'exécution d'un atterrissage normal ont probablement concouru à faire baisser la vigilance du commandant de bord. Le commandant de bord a effectué, et ce, sans incident et à plusieurs reprises, le vol à destination de CTU5 en compagnie du P/O agissant en tant que PF. Étant donné ses attentes à l'égard des capacités du P/O, le commandant de bord a pu se montrer moins attentif à la surveillance du déroulement de la situation.

Les expériences antérieures du commandant de bord pourraient avoir influé sur son niveau de vigilance, et, en conséquence, sur son temps de réaction dans le rôle de pilote surveillant. Si les pilotes ne se concentrent pas sur la tâche à accomplir, il y a risque de non-réaction aux conditions qui pourraient nuire à la sécurité du vol.

Le fait que le PNF n'ait pas lu la liste des vérifications à haute voix dénote un manque de conscience partagée de la situation et un relâchement de la vigilance dû à une perception d'absence de danger à propos de ce qui, pour un commandant de bord expérimenté, est une approche courante. L'équipage a utilisé une liste de vérifications de format « lecture et exécution », alors qu'une liste de vérification de format « question et réponse » aurait pu faire office de mesure de sûreté pour prévenir la perte de conscience partagée de la situation et le relâchement de la vigilance.

2.5 Gestion de la sécurité au sein d'Air Labrador

En 2007, Air Labrador effectuait des activités assujetties à la sous-partie 705 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), et avait commencé la mise en œuvre d'un système de gestion de la sécurité (SGS), tel que requis par Transport Canada (TC). Au printemps 2009, l'entreprise avait terminé la 3e de 4 phases de mise en œuvre, incluant l'élaboration d'un manuel sur le SGS, lorsqu'elle a abandonné ses activités assujetties à la sous-partie 705 du RAC, et que le processus de certification du SGS a été interrompu.

À la suite de l'examen de 2 événements (Rapport d'enquête aéronautique A13A0033 du BST et le cas présent), Air Labrador a pris des mesures correctives qui dénotent une approche classique de la gestion de la sécurité. Les organisations répondent aux pressions opérationnelles parce que ces priorités sont clairement mesurables et fournissent une rétroaction immédiate. En raison de ces pressions, les préoccupations liées à la sécurité peuvent devenir moins évidentes, et les organisations peuvent inconsciemment créer des risques dans leurs activités.

En novembre 2010, une spécification d'exploitation autorisant l'exploitation d' avions à hélice à partir ou à destination de surfaces non préparées a été octroyée à Air Labrador. En 2006, TC a mis en œuvre une modification des NSAC, l'alinéa 724.44, requérant l'application d'un facteur de 10 % aux calculs de distance d'atterrissage pour les surfaces de piste dures et sèches lors de l'exploitation d'un aéronef DHC-6-300 sur des pistes en gravier. On ne sait pas si Air Labrador a réexaminé ses destinations et effectué une analyse de risques intégrant cette nouvelle information. Toutefois, l'entreprise a continué ses vols à destination de CTU5 avec des volets réglés à 20°.

L'approche classique de la gestion de la sécurité, qui consiste à se conformer à la réglementation et à réagir aux incidents et accidents, ne convient pas pour cerner des problèmes de sécurité émergents. Dans le contexte de l'aviation d'aujourd'hui, il faut intégrer des pratiques de gestion de la sécurité modernes au système de gestion de l'organisation de façon à ce que la gestion de la sécurité fasse partie intégrante des activités quotidiennes. Même si la réglementation n'impose pas aux exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC de se doter d'un SGS, rien ne les empêche d'en mettre un en œuvre.

Si les organisations n'adoptent pas de pratiques de gestion de la sécurité modernes, il y a un risque accru de non-détection et de non-atténuation des dangers.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L'aéronef a flotté pendant 6,3 secondes au-dessus de la piste et s'est posé à environ 750 pieds au-delà du seuil, ce qui a réduit la longueur de piste disponible pour immobiliser l'aéronef.
  2. Le commandant de bord a pris les commandes presque à mi-piste. Comme la longueur de piste restante était insuffisante pour s'arrêter, il a dû effectuer un virage serré vers la gauche pour s'engager sur la voie de circulation, ce qui s'est traduit par des dommages importants subis par l'aéronef.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Si les pilotes ne sont pas préparés à exécuter une remise des gaz à chaque approche, il y a un risque qu'ils ne soient pas prêts à réagir dans un cas où cette manœuvre devient impérative.
  2. Si les tableaux de performance ne sont pas consultés, il y a un risque que la distance d'atterrissage nécessaire soit supérieure à la longueur réelle de la piste.
  3. Si les équipages de conduite ne respectent pas les règles afférentes au poste de pilotage silencieux, ils peuvent être distraits pendant des phases de vol critiques, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.
  4. Si la formation en gestion des ressources de l'équipage n'est pas une exigence réglementaire, il est moins probable qu'elle soit adoptée par les exploitants. Résultat : la coordination de leurs équipages peut être moins probante.
  5. Si les pilotes ne reçoivent pas de formation en gestion des ressources de l'équipage, ils peuvent ne pas être prêts à réagir à des situations qui peuvent compromettre la sécurité du vol.
  6. Si les pilotes ne se concentrent pas sur la tâche à accomplir, il y a risque de non-réaction aux conditions qui pourraient nuire à la sécurité du vol.
  7. Si les organisations n'adoptent pas de pratiques de gestion de la sécurité modernes, il y a un risque accru de non-détection et de non-atténuation des dangers.
  8. L'absence d'enregistrement de données de vol pourrait empêcher une enquête de déterminer et de communiquer d'importantes lacunes au chapitre de la sécurité et ainsi d'améliorer la sécurité des transports.

3.3 Autres faits établis

  1. L'équipage a sorti les volets à 20° pour atterrir. Ce faisant, il n'a pu réaliser la distance d'atterrissage dont le calcul est exigé dans le manuel de vol ni tenir compte du facteur de 10 % requis par la réglementation sur l'atterrissage sur des surfaces non préparées.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Air Labrador Limited

La compagnie a publié une directive à l'intention de tous les équipages, contraignant les premiers officiers (P/O) comptant moins de 1000 heures sur type à effectuer des atterrissages seulement sur des pistes de 2000 pieds ou plus. Dans le cas d'un P/O ayant plus de 1000 heures sur type à son actif, le commandant de bord, en tenant compte des conditions du moment, pourrait décider qu'il a les compétences pour effectuer un atterrissage en toute sécurité.

Depuis l'événement en cause, Air Labrador a pourvu chaque aéronef d'un tableau de performance relatif aux distances d'atterrissage plastifié, qui rappelle aux pilotes d'ajouter 10 % aux calculs de distance d'atterrissage dans le cas des pistes en gravier.

Le 16 janvier 2015, la compagnie a publié une modification de ses SOP et de sa liste de vérification normale pour indiquer que la liste de vérification d'atterrissage pouvait être exécutée en format « lecture et exécution » ou « question et réponse ».

Le 27 février 2015, la compagnie a publié une directive à l'intention de ses équipages stipulant qu'il faut régler les volets à 37,5° pour tous les atterrissages sur des pistes dont la longueur est inférieure à 2000 pieds.

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A – Renseignements sur l'aérodrome de La Tabatière

Source : NAV CANADA, Supplément de vol – Canada, CTU5