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Rapport d'enquête maritime M10F0003

Renversement et naufrage
Du yacht-école à voile Concordia
À 300 milles au S.-S.-E. de Rio de Janeiro (Brésil)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 17 février 2010, vers 14 h 23, le yacht-école à voile Concordia s'est renversé et a fait naufrage à la suite d'un grain de pluie au large de la côte du Brésil. Les 64 membres d'équipage, professeurs et étudiants ont quitté le navire à bord de radeaux de sauvetage. Ils ont été sauvés 2 jours plus tard par 2 navires marchands et amenés à Rio de Janeiro, au Brésil. Un membre d'équipage a subi des fractures.

© Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux 2011
no de cat. TU3-7/10-0003F
ISBN 978-1-100-19281-9

1.0 Renseignements de base

1.1 Fiche technique du navire

Nom du navire Concordia
Numéro OMI 1001269
Port d'immatriculation Bridgetown
Pavillon Barbadien
Type Yacht-école à voile
Jauge brute 413
Longueur de pontNote de bas de page 1 (longueur totale) 46,50 m (57,50 m)
Tirant d'eau (départ de Recife, au Brésil) Avant : 3,8 m
Arrière : 4,0 m
Construction 1991, Colod Co. Ltd., Szczecin, Pologne
Propulsion Voile
Propulsion auxiliaire MAN 420 kW
Équipage À bord : 8 membres d'équipage, 8 professeurs et 48 étudiants (64 personnes au total)
Propriétaire/gestionnaire West Island College International, Inc., Bahamas

1.2 Description du navire

Le yacht-école à voile Concordia a été construit en Pologne à titre de barquentin à coque en acier (voir photo 1). Le navire avait 3 mâts : 1 mât de misaine (premier mât) à gréement en carré, 1 grand mât (mât principal) à gréement aurique (avant-arrière) et 1 mât d'artimon (arrière). On pouvait monter 1 trinquette, 3 focs avant et 5 voiles carrées sur le mât de misaine ainsi que 3 voiles d'étai entre le grand mât et le mât de misaine. Le grand mât et le mât d'artimon étaient pourvus de voiles de flèche à corne, d'une grand-voile et d'une voile d'artimon, respectivement (voir l'annexe A pour le plan de voilure).

Le navire comptait 3 pontsNote de bas de page 2. Sur le pont le plus bas se trouvaient la salle des machines, les réservoirs de carburant, la citerne à eau douce, la citerne de ballast, la buanderie et des magasins. Le pont d'habitation abritait les cabines des membres d'équipage, des professeurs et des étudiantsNote de bas de page 3, 1 salon du capitaine à l'arrière et 1 salle de travail à l'avant, à bâbord. Une fois fermées, 2 portes étanches divisaient le pont d'habitation en 3 espaces distincts. Un escalier permettait l'accès aux 2 espaces avant et 1 sas de plafond à l'espace arrière.

Sur le pont principal se trouvaient 2 roufs. La timonerie, la chambre des cartes, le bureau du navire et la salle de classe étaient situés dans le rouf arrière, qui était accessible par des portes sur le pont principal, à tribord, et le pont de passerelle, à bâbord et à tribord. Le rouf avant logeait la cuisine, la dépense et le poste d'équipage (qui était utilisé comme deuxième salle de classe). Les 2 roufs étaient pourvus de sas d'évacuation, au centre du plafond. Les sas centraux aménagés dans la partie avant du pont principal permettaient l'accès aux magasins à peinture et du maître d'équipage. La passerelle du navire était arrimée au plafond et assujettie aux 2 extrémités par des brides fixées au grand mât et à la timonerie.

Le navire était équipé de 2 canots pneumatiques à coque rigide. Le canot pneumatique à coque rigide avant, qui servait de bateau de sauvetage du navire, était arrimé sur le pont du poste d'équipage et pouvait être mis à la mer par une flèche et un treuil électrique. L'autre canot pneumatique à coque rigide, utilisé pour transporter les gens à terre ou pour des excursions, était arrimé par des bossoirs sur la poupe.

Photo 1. Concordia
Concordia

(Source : Matt Jacques Photography)

La timonerie abritait les appareils et les instruments de navigation, notamment 2 radars, 1 pilote automatique, 1 compas gyroscopique, 1 système de cartes marines électroniques, 1 anémomètre et 1 clinomètre. La chambre des cartes adjacente comprenait les cartes de navigation ainsi qu'un appareil de radiocommunication SMDSM (Système mondial de détresse et de sécurité en mer) et 1 télécopieur pour la réception des prévisions météorologiques. À partir de la timonerie, on avait un accès direct à cette pièce par 3 escaliers du côté bâbord. Le navire pouvait être gouverné à l'aide d'un pilote automatique ou d'une manette de commande depuis une console centrale dans la timonerie, ou d'un gouvernail hydraulique installé devant la timonerie, sur le pont. Le gouvernail était équipé d'un répétiteur de compas, d'un compas magnétique et d'un anémomètre.

1.3 Description de l'exploitation du navire

Le navire appartenait au West Island College International, Inc. (WIC Bahamas)Note de bas de page 4 et était affrété à terme au West Island College International for Education and Sail Training Limited4Note de bas de page 5 (WIC-NS). WIC Bahamas était responsable de l'exploitation du navire, notamment de l'enregistrement, des visites et de l'embauche des membres d'équipage. WIC-NS, appelé Class Afloat, offrait des programmes de formation à des étudiants âgés de 16 à 20 ans et était responsable de l'embauche des professeurs et du programme d'études.

Le capitaine et les membres d'équipage géraient l'exploitation quotidienne, alors que WIC-NS s'occupait des communications quotidiennes avec le navire et des différentes exigences professionnelles et commerciales associées au voyage, notamment l'approvisionnement et la gestion des réparations. Par exemple, lorsqu'une réparation était nécessaire, le problème était ciblé et géré par le capitaine et/ou des membres d'équipage et les coûts étaient autorisés par WIC Bahamas et les spécialistes embauchés par WIC-NS.

Le capitaine, le premier officier (C/O) et le deuxième officier (2/O) avaient chacun des quarts de travail, alors que le maître d'équipage était affecté aux tâches quotidiennes. Le capitaine était de service entre 8 h et 12 h, et le premier officier et le deuxième officier de 4 h à 8 h et de 12 h à 4 h, respectivement. Les étudiants effectuaient des manœuvres de voiles ainsi que des quarts de garde et occupaient un poste de vigie ou de barreur. Les étudiants pouvaient être responsables de 1 des 6 veilles de nuit, de 2 heures chacune. Il y avait 8 étudiants pour chacune des veilles de nuit. Les quarts de jour variaient selon l'horaire des cours des étudiants. On comptait généralement au moins 6 étudiants pour chaque quart de jour. Certains d'entre eux formaient l'équipe de quart à la passerelle : 3 étudiants relevaient de la passerelle et agissaient comme barreur ou vigie, et les autres travaillaient avec le maître d'équipage pour effectuer les tâches quotidiennes. Les étudiants qui n'étaient pas de service étaient soit en classe ou en congé. Les professeurs n'étaient affectés à aucune tâche courante liée à la manœuvre du voilier, mais étaient responsables de certaines mesures d'urgence.

Le voilier quittait normalement Lunenberg, en Nouvelle-Écosse (N.-E.), au début de l'année scolaire, en septembre, et y revenait près de la fin du programme après de nombreux voyages à l'étranger. Compte tenu des éléments scolaires du programme, on pilotait le navire de manière prudente, accordant une attention particulière à la gestion de l'angle d'inclinaison et des mouvements, de façon à favoriser le bon déroulement des activités en classe.

1.4 Déroulement du voyage

Le navire est arrivé à Recife (Brésil) le 19 janvier 2010. Au cours du séjour au port, les étudiants et les professeurs ont quitté le voilier puisque le premier semestre était terminé, et le capitaine et le premier officier ont quitté leurs fonctions. Le deuxième officier, qui s'était joint à l'équipage quelques semaines auparavant, est demeuré à bord. Une semaine avant le départ, les professeurs et 48 étudiants (dont 16 nouvellement inscrits au programme) sont montés à bord. Certains des professeurs étaient aussi nouveaux. Dans les jours qui ont suivi, toutes les personnes à bord ont reçu une formation, y compris un cours de familiarisation et une formation sur les manœuvres des voiles. De nombreux exercices ont eu lieuNote de bas de page 6.

Le navire a quitté Recife le 8 février 2010 à 14 hNote de bas de page 7 à destination de Montevideo (Uruguay). En vertu des pratiques courantes, le capitaine informait quotidiennement le bureau de Lunenberg des progrès du voilier en lui envoyant le rapport de nuitNote de bas de page 8 du navire le matin suivant. Quelques jours après le départ, on a noté une petite fuite sur le gouvernail hydraulique. Les membres d'équipage n'ont pas réussi à corriger le problème et, par conséquent, le poste de gouverne extérieur est demeuré isolé, barre retirée et amarrée au bastingage avoisinant. À compter de ce moment, le voilier était dirigé par un pilote automatique dans la timonerie.

Après avoir quitté Recife, le navire avait fait face à de petits grains de pluie. Au 16 février 2010, il avait reçu de nombreuses prévisions de conditions météorologiques par le système Inmarsat-C. Ces prévisions étaient émises par le Service météorologique maritime de la Marine brésilienne responsable de la régionNote de bas de page 9. Elles indiquaient que le vent tourneraitNote de bas de page 10 au est-sud-est et augmenterait à une force Beaufort 7 ou 8Note de bas de page 11 avec des rafales. Le capitaine a informé son équipage de la venue de conditions météorologiques défavorables.

Le matin du 17 février 2010, en prévision des conditions météorologiques prévues, le capitaine a réduit la voilure, ce qui a fini par donner à la fin de son quart (12 h) le plan suivant : faux-foc, trinquette, huniers supérieur et inférieur, voile d'étai principale, grand-voile et voile d'artimon roulée (voir la Figure 1) Note de bas de page 12. Le deuxième officier, qui avait le quart de 12 h à 4 h, est arrivé à son poste à 11 h 50.. Au cours du changement de quart, le capitaine et le deuxième officier ont discuté du plan de voilure et le deuxième officier a été informé que le plan établi convenait à des vents pouvant atteindre 40 nœuds. Le capitaine a demandé au deuxième officier de conserver, si possible, le vent sur l'arrière du travers et de maintenir un angle d'inclinaison confortable pour les personnes en classe. Il a aussi demandé au deuxième officier de brasser les vergues, de régler les voiles selon la direction du vent et de déborder vers bâbord, et de quitter avant tout grain de pluie. Le deuxième officier et le capitaine ont ensuite parlé des mesures à prendre s'il devenait nécessaire de réduire la toile. Le navire était en grand largueNote de bas de page 13, tribord amures, avec un cap compris entre 200° et 220° (G). Le vent apparent était de 15 à 18 nœuds, avec des vagues de 1,5 à 2 mètres en provenance du nord et une longue et faible houle en direction du sud. La température de l'air était comprise entre 29 °C et 31 °C .

Figure 1. Plan de voilure au moment de l'événement
Plan de voilure au moment de l'événement

Aux environs de 13 h, le capitaine a quitté la timonerie pour descendre prendre du repos. Le deuxième officier était alors seul dans la timonerie et responsable du quart. Pendant les 60 à 75 minutes qui ont suivi, le navire a conservé un cap de 200° à 220° (G) à une vitesse approximative de 5,5 nœuds dans les conditions suivantes : force Beaufort 5 et vents apparents atteignant 20 nœuds juste à l'arrière du travers. Dans ces conditions, le navire conservait un angle d'inclinaison stable d'environ 10°.

Peu avant 14 h, l'étudiant qui prenait la relève du quart de pont est arrivé sur la proue et est allé rencontrer le maître d'équipage. Deux des 8 étudiants ont remplacé les vigies sur les ailerons de passerelle bâbord et tribord. Vers 14 h 5, la voile d'étai principale était bordée et les vergues brassées d'un point à bâbordNote de bas de page 14. Environ au même moment, 3 grains de pluie ont été observés au loin, à l'avant-tribord du navire, et le deuxième officier a commencé à les surveiller visuellement et sur le radarNote de bas de page 15.

Peu de temps après, il a établi qu'un de ces grains de pluie allait croiser la course du voilier. Sur le radar, ce grain de pluie semblait plus rond que les autres grains de pluie que le voilier avait rencontrés les jours précédents. À l'œil, il semblait contenir plus de pluie, mais aucun mouton n'était visible sur la mer.

Vers 14 h 10, le grain de pluie se trouvant entre 1,5 et 2 milles nautiques du navire, les vigies sont descendues pour aller chercher leur ciré alors que d'autres ramassaient des vêtements qui séchaient sur le pont avant la venue de la pluie. Les fenêtres et les portes face au vent des 2 roufs ont été fermées, ainsi que les sas menant au magasin du maître d'équipage et au magasin à peinture. Les portes de la cuisine, de la timonerie et du poste d'équipage sous le vent à bâbord sont demeurées ouvertes.

Peu après 14 h 20, le deuxième officier s'est rendu sur l'aileron de la passerelle à tribord et a observé les conditions météorologiques et le grain de pluie qui approchait. Lorsque la pluie a commencé à tomber, il est retourné dans la timonerie et a fermé la porte latérale à tribord. À ce moment, l'angle d'inclinaison à bâbord du navire avait augmenté à environ 23 °Note de bas de page 16, et la vitesse du vent apparent avait augmenté à environ 22 à 23 nœuds.

De retour dans la timonerie, le deuxième officier s'est placé près du pilote automatique. La vitesse du vent apparent a commencé à augmenter et l'angle à diminuer (déplacement vers l'avant) et le navire s'est incliné davantage à bâbord.

Le deuxième officier a appuyé 3 fois coup sur coup sur le bouton de changement de cap vers bâbord du pilote automatique. La vitesse du vent continuait à augmenter et le navire continuait à s'incliner. Le deuxième officier a alors actionné le cadran sur le pilote automatique pour modifier le cap sur bâbord de 20° à 30° afin de modifier le cap encore plus. Comme le navire continuait à s'incliner, il a désactivé le pilote automatique et, à l'aide de la commande manuelle (manche), a placé le gouvernail à bâbord toute. Ce faisant, la vigie de bâbord est entrée dans la timonerie et le deuxième officier a vu que l'aileron de passerelle à bâbord allait passer sous l'eau.Note de bas de page 17

Le deuxième officier a continué à tenir le manche jusqu'à ce que l'axiomètre indique « barre toute » et a dû retenir la vigie qui appelait à l'aide puisqu'elle risquait de passer par-dessus bord par un espace dans le bastingage. Note de bas de page 18 Le deuxième officier l'a ensuite conduite dans l'aire de rassemblement derrière la timonerie à tribord et a ensuite utilisé l'interphone pour appeler le capitaine. L'eau entrait alors par la porte bâbord de la timonerieNote de bas de page 19 et l'anémomètre indiquait une vitesse du vent apparent de 30 nœuds, de 120°à 150° à tribord. À approximativement 14 h 23, le navire était engagé après s'être renverséNote de bas de page 20.

1.4.1 Événements dans la timonerie après le renversement

Le capitaine avait remarqué l'augmentation de l'angle d'inclinaison et s'apprêtait à se rendre dans la timonerie lorsque le deuxième officier l'a appelé à l'interphone. À la suite du renversement, le capitaine a quitté sa cabine et s'est rendu à l'aire de rassemblement où, accompagné du premier officier , il a aidé les étudiants à quitter la salle de classe. Il a aussi ordonné au deuxième officier de fermer la porte bâbord de la timonerie. Le deuxième officier n'a toutefois pas réussi puisque la porte était sous l'eau. Le capitaine lui a alors ordonné de transmettre un message de détresse au moyen de l'Inmarsat-C. L'appareil n'était toutefois pas accessible puisque la chambre des cartes était déjà inondée. Le deuxième officier a alors récupéré le transpondeur de recherche et de sauvetage (SART) près de la porte à tribord de la timonerie et lui, ainsi que le capitaine, sont sortis. L'eau entrait alors par la fenêtre du bureau de navire.

Une fois à l'extérieur, ils ont constaté que le sommet des mâts était dans l'eau et que le hunier supérieur et la voile d'artimon roulée étaient déchirés.

Peu de temps avant, des événements avaient aussi commencé à se produire ailleurs sur le navire, sur les ponts supérieur et inférieurs. Voici une description de ces événements.

1.4.2 Événements sur les ponts supérieur et inférieurs

À 14 h, avant le renversement, l'équipage du navire était réparti comme suit :

Vers 14 h 10, lorsque le deuxième officier a annoncé une averse imminente, certains des étudiants qui n'était pas en classe sont sortis sur le pont pour voir la pluie. Ces étudiants se sont rassemblés à l'embelle du navireNote de bas de page 21. Le navire a alors commencé à s'incliner, ce qui a immergé le livet de pont, puis, rapidement, le bastingage à bâbordNote de bas de page 22. Le navire s'inclinant de plus en plus, et ce, à cadence élevée, un des étudiants est tombé dans la mer, mais a réussi à remonter sur le voilier, près de la timonerie. D'autres étudiants ont attrapé de l'équipement de pont pour se retenir alors que le navire s'est retrouvé engagé à bâbord.

Immédiatement après le renversement, l'alarme de la génératrice s'est fait entendre dans la salle des machines, la génératrice s'est arrêtée et les appareils d'éclairage d'urgence se sont allumés.

Les étudiants et les professeurs qui se trouvaient dans la salle de classe arrière sont montés dans l'aire de rassemblement, où le capitaine, le premier officier et d'autres étudiants les ont aidés à grimper sur le côté du rouf arrière. Les étudiants et le maître d'équipage qui étaient dans le poste d'équipage ont été en mesure d'ouvrir la contre-porte à tribordNote de bas de page 23 et de s'aider mutuellement à atteindre le côté du poste d'équipage. Ils ont ensuite grimpé dans le bastingage et sur la coque du navire pour rejoindre les autres étudiants à l'arrière, tel que l'avait ordonné le capitaine.

Le navire étant engagé, les personnes qui se trouvaient sous pontNote de bas de page 24 ont immédiatement évacué vers le pont principal. Deux professeurs, qui étaient responsables de l'évacuation des cabines, sont sortis de leur cabine pour se rendre directement sur le pont principal sans vérifier si toutes les cabines étaient vides. Le médecin, qui était aussi dans sa cabine, est tombé alors qu'il essayait de sortir, se disloquant l'épaule gauche et se fracturant plusieurs côtes et l'humérus. Il a réaligné son épauleNote de bas de page 25 et est sorti de sa cabine à l'aide du premier officier ; tous deux se sont ensuite rendus sur le pont. Une étudiante qui ne pouvait pas ouvrir la porte de sa cabine a reçu l'aide d'un professeur. Toutes les personnes qui se trouvaient sous pont ont réussi à atteindre le poste d'équipage et celles qui se trouvaient déjà dans le poste d'équipage les ont aidées à sortir du navire. Une fois dehors, elles ont longé l'extérieur de la coque vers le rouf arrière.

1.4.3 Abandon du navire

Une fois à l'extérieur, les étudiants ont commencé à récupérer des combinaisons d'immersion dans un compartiment de rangement situé sous la timonerie, sur le pont principal. Les combinaisons ont été remises aux personnes à proximité qui les ont endossées. Une fois sur le pont, le capitaine a ordonné aux officiers de gonfler les radeaux de sauvetage arrièreNote de bas de page 26. Les mécaniciens avaient déjà commencé à gonfler le radeau de sauvetage pouvant accueillir 20 personnes du côté tribord du pont du mât d'artimonNote de bas de page 27. Le navire se trouvant engagé, 3 radeaux pour 20 personnes de bâbord étaient sous l'eau et inaccessibles. Le premier officier a gonflé les radeaux pour 8 et pour 10 personnes qui se trouvaient sur la poupe du pont principal, et a demandé au deuxième officier s'il pouvait voir la radiobalise de localisation de sinistres (RLS), qui était arrimée à bâbord sur le pont du mât d'artimon. Le deuxième officier ne pouvait pas voir la RLS puisque le bastingage de bâbord du pont du mât d'artimon était submergé. Le capitaine a ordonné à tous ceux qui se trouvaient sur le rouf arrière de monter dans les radeaux de sauvetage. Il s'est ensuite rendu vers l'avant, à l'embelle du navire, où il a tenté de libérer les radeaux pour 20 personnes à tribord. Toutefois, il n'a pas pu dégager les crocs à échappement en raison du poids des radeaux et de leur angle de suspension dans leurs courroies de fixation. Le capitaine a coupé ces courroies et les 2 radeaux sont tombés dans l'eau, dans la zone entre le pont principal et la passerelle.

Sur le pont du mât d'artimon, le deuxième officier a grimpé jusqu'au compartiment de rangement des gilets de sauvetage, qui s'était ouvert, et duquel certains gilets de sauvetage étaient tombés dans la mer. Il a passé les gilets de sauvetage restants aux étudiants qui se trouvaient à tribord, sur le rouf arrière. Comme il était trop difficile de monter à bord du radeau pour 20 personnes à partir de cet endroit, on a déplacé le radeau à l'arrière du navire. Une fois à l'arrière, les étudiants, avec l'aide du deuxième officier, sont montés à bord en se servant du bateau d'excursion (qui s'était détaché de ses garants) comme plate-forme. Toutefois, en raison des vagues, il venait s'écraser contre les bossoirs, endommageant le bateau et le moteur. Pendant ce temps, le cuisinier de bord avait récupéré l'eau potable du compartiment de rangement sous la passerelle et a réparti celle-ci parmi les différents radeaux gonflés.

Au cours de l'abandon, le capitaine a confirmé la présence des 7 autres membres d'équipage. Les étudiants se sont mis à compter les membres de leur équipe de quart et les responsables de chacun des quarts ont confirmé, en criant, la présence de toutes les personnes en cause, mais l'information n'a été vérifiée qu'après l'abandon.

Comme les 2 radeaux pour 20 personnes que le capitaine avait libérés dans l'embelle du navire étaient trop lourds pour être déplacés, le capitaine a décidé de gonfler l'un d'entre eux sur place; mais il s'est coincé sous la passerelle. Le capitaine et le maître d'équipage ont alors tenté, sans succès, de dégager la passerelle. Le capitaine a gonflé le second radeau pour 20 personnes, qui est lui aussi resté coincé. Le capitaine et le maître d'équipage se sont alors rendus sur le pont du poste d'équipage et ont coupé les courroies de retenue du radeau de sauvetage, qui s'est retrouvé à l'envers et qu'on ne pouvait remettre en bonne position. Le maître d'équipage a ensuite coupé la courroie du compartiment de rangement des gilets de sauvetage sur le pont du poste d'équipage et le maître d'équipage et le capitaine ont remis les gilets de sauvetage aux membres de l'équipage et aux étudiants qui se trouvaient à tribord, sur la coque.

Le premier officier a demandé aux étudiants de tirer sur les radeaux qui se trouvaient au niveau de l'embelle du navire pour les libérer. Le capitaine a ensuite coupé les cordes qui les retenaient. Pendant ce temps, le navire avait tourné sous la force du vent et les vagues et les radeaux venaient taper contre le navire sous les rafales. Le capitaine a donc ordonné le déplacement des radeaux à l'écart de la coque, le long des mâts. Le premier officier est retourné sur le pont pour prendre la trousse médicale et un lance-amarre qui ont été placés dans les radeaux. Sur la poupe, le deuxième officier continuait à aider les étudiants à monter à bord des radeaux pour 20 et pour 10 personnes. Le deuxième officier avait endossé une combinaison d'immersion plus tôt, sans toutefois la fermer jusqu'au cou. À un certain moment, pendant qu'il aidait un étudiant à monter à bord du radeau, il a été projeté à l'eau, puis tiré sous l'eau par du matériel à l'écart du bateau et a eu de la difficulté à revenir à la surface parce que sa combinaison s'était remplie d'eau.

Les 2 radeaux pour 20 personnes ont été déplacés le long du mât d'artimon, et les étudiants et les professeurs sont montés à bord au moyen d'enfléchures et de haubans. Peu de temps après, le navire s'est retourné sur 20° à 30° additionnels et tous ont reçu l'ordre de sauter dans un radeau ou dans l'eau. Le capitaine et le premier officier ont chacun pris la commande d'un radeau pour 20 personnes. Le deuxième officier a aidé les derniers étudiants à monter dans l'autre radeau pour 20 personnes à l'arrière du navire, avant d'embarquer lui-même dans le radeau pour 10 personnes. Il a coupé la bosse avec son propre couteau avant de le passer aux mécaniciens, qui ont coupé la bosse du radeau pour 20 personnes. Il a ensuite attaché ensemble les 2 bosses et a passé le sac d'équipement du radeau pour 10 personnes à celui pour 20 personnes, avant de finalement monter à bord du radeau pour 20 personnesNote de bas de page 28.

Durant ce temps, les survivants installés dans les autres radeaux essayaient de libérer leur embarcation du gréement du navire. Une fois dégagés, les 2 radeaux pour 20 personnes ont été attachés ensemble et le maître d'équipage a nagé pour rejoindre 3 étudiants qui étaient seuls à bord du radeau pour 8 personnes qui était toujours relié au Concordia. Une fois dans le radeau, il a coupé la bosse pour permettre au radeau de s'écarter du navire. Alors qu'il récupérait des objets dans l'eau, un étudiant a vu la RLS, qui s'était dégagée d'elle-même et mise à fonctionner. Le maître d'équipage a nagé jusqu'à l'appareil pour le sortir de l'eau. Alors que certains des radeaux de sauvetage dérivaient autour de la poupe du navire renversé, aucun dommage à la coque n'a été observé et le gouvernail était à bâbord touteNote de bas de page 29.

Peu de temps après, le radeau pour 20 personnes du capitaine était réuni avec le radeau pour 20 personnes du premier officier et celui pour 8 personnes du maître d'équipageNote de bas de page 30. Le radeau pour 20 personnes, qui transportait le deuxième officier et les mécaniciens, a toutefois dérivé loin des autres, ainsi que le radeau pour 10 personnes vide qui y était toujours attachéNote de bas de page 31. On estime qu'il s'était alors écoulé 20 minutes depuis le renversement.

1.4.4 Événements suivant l'abandon

Une fois que le capitaine, le premier officier et le maître d'équipage ont réuni leurs 3 radeaux, le capitaine a entrepris d'utiliser la RLS, en testant son fonctionnement et en la plaçant en mode manuel. Le capitaine a tenté de retracer de nouveau tous les membres de l'équipage en commençant par identifier les personnes absentes. Il a ainsi établi une liste de 20 personnes non retracées. Même si toutes ces personnes avaient été vues à un moment ou à un autre au cours de l'abandon du navire, le capitaine n'avait aucun moyen de vérifier si elles se trouvaient dans le radeau du deuxième officier.

À la suite de la tentative en vue de trouver toutes les personnes de l'équipage, des comprimés contre le mal de mer ont été distribués, des vigies nommées et des horaires rotatifs établis. Même s'il était séparé des autres, les mêmes mesures ont été prises à bord du radeau pour 20 personnes du deuxième officier.

Vers midi le lendemain, le tube inférieur du radeau du premier officier s'est soudainement dégonflé; une inspection a montré que le tube inférieur présentait une rupture irréparable. Le médecin blessé a été transféré dans le radeau du capitaine, plus stable.

Les conditions dans les radeaux de sauvetage posaient de nombreux défis, notamment :

1.5 Recherche et sauvetage

La Marine brésilienne était responsable des opérations de recherche et de sauvetage dans la région où le navire s'est renversé. Le Geostationary Operational Environmental Satellite (GOES)-12 a été le premier à détecter le signal de la RLS, le 17 février à 15 h 5 min 6 sNote de bas de page 33. La position exacte a été établie à 15 h 25 min 54 s aux coordonnées 27° 28′ S, 040° 53′ O.

Le matin suivant, le 18 février 2010, à 8 h 6, le Centre de coordination des opérations de sauvetage maritime (CCOS) du Brésil a envoyé une télécopie au Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage (CCCOS) – Halifax, lui demandant des renseignements sur le Concordia. Note de bas de page 34 Le CCCOS a fait plusieurs tentatives pour joindre le West Island College à Lunenburg (Nouvelle-Écosse), mais c'est seulement une fois que les employés du collège sont arrivés au travail qu'ils ont rappelé, à 8 h 33. Le CCCOS a aussi tenté plusieurs fois de joindre le navire directement, en vainNote de bas de page 35.

À 9 h 33, le CCCOS a demandé au WIC-NS des renseignements sur les systèmes de communication qui se trouvaient à bord du Concordia. Le responsable des opérations n'était pas en mesure de fournir l'information et a référé le CCCOS à l'un des capitaines suppléants du navire. À 10 h 3, le CCCOS a réussi à joindre le capitaine suppléant du Concordia, qui lui a dit que le navire maintenait une veille sur les canaux très haute fréquence (VHF) 13/16 et 2182 kHz, et que la passerelle était équipée d'alarmes par appel sélectif numérique (ASN).

Vers 10 h, le 18 février 2010, le CCCOS a envoyé au CCOS - Brésil tous les numéros d'urgence disponibles du Concordia. Au cours d'un appel de suivi, le CCCOS a été informé que la responsabilité avait été transférée au CCOS - Rio de Janeiro. Des communications subséquentes entre le CCCOS et le CCOS - Rio ont permis de confirmer les données suivantes : le CCOS - Rio a bien reçu les numéros d'urgence, mais n'a pas réussi à communiquer avec le navire; le CCOS Rio a reçu le premier avis de position de la RLS à 18 h 39, le 17 février 2010; et que la RLS transmettait toujours de l'information. À la suite d'une demande d'envoi d'un appel de groupe amélioré (EGC)Note de bas de page 36, le CCCOS a été informé que des communications étaient en cours avec des navires à proximité.

À 10 h 41, le CCCOS, au moyen d'un système de recherche, d'identification et de suivi à distance (LRIT)Note de bas de page 37, a établi que 2 navires se trouvaient à proximité de la RLS: le Captain George II et le Voge Prosperity. Voir le tableau 1 pour de plus amples renseignements.

Tout au long de la matinée, le CCCOS a tenté maintes fois, sans succès, de communiquer avec le navire par le numéro d'urgence enregistré de la RLS.

À 11 h 48, le CCCOS a communiqué avec l'Unique Brilliance et lui a demandé d'appeler le Concordia sur le canal 2182 kHz et la radio ASN. L'Unique Brilliance a essayé sans succès et a confirmé qu'il n'avait reçu aucun EGC au sujet du Concordia.

Entre 12 h 12 et 12 h 55, le CCOS - Brésil a communiqué avec 5 navires dans la région, soit les Crystal Pioneer, Colorado Highway, Excalibur, Bow Fraternity et Nordic Apollo, afin qu'ils se rendent à la position du voilier en détresse (voir le tableau 1).

Tableau 1. Navires à proximité de la position du voilier en détresse
Date de calcul de la position du navire Heure du calcul de la position du navire Temps écouléNote de bas de page 38 Nom du navire Note Portée (milles marins) Distance Heure d'arrivée prévue /jourNote de bas de page 39
17-02-2010 1652 + 1 h 26 Captain George II 1 71 5:25 2217/17 fév.
18-02-2010 0212 + 10 h 46 Voge Prosperity 1 38 3:01 0513/18 fév.
18-02-2010 1138 + 20 h 12 Hanjin Gothenburg 1 44 2:05 1343/18 fév.
18-02-2010 1200 + 20 h 34 Unique Brilliance 4 304 19:22 0722/19 fév.
18-02-2010 1238 + 21 h 12 Nordic Apollo 2 216 17:17 0555/19 fév.
18-02-2010 1250 + 21 h 17 Crystal Pioneer 2 146 9:56 2246/18 fév.
18-02-2010 1255 + 21 h 29 Colorado Highway 2 10:00Note de bas de page 40 2255/18 fév.
18-02-2010 1300 + 21 h 34 Excalibur 2 129 10:15 2315/18 fév.
18-02-2010 1300 + 21 h 34 Bow Fraternity 2 Aucune information reçue – les responsables affirment que le navire n'a reçu aucun renseignement du CCOS - Brésil
18-02-2010 1400 + 22 h 34 Hanjin Gothenburg 5 53 2:44 1644/18 fév.
18-02-2010 1525 + 23 h 59 Crystal Pioneer 5 154 10:29 0154/19 fév.
18-02-2010 1855 + 27 h 29 Hokuetsu Delight 3 75 5:36 0031/19 fév.
  1. Position selon le système d'interrogation LRIT du CCCOS.
  2. Navires appelés par le CCOS - Brésil (de façon directe).
  3. Navire informé par message EGC seulement.
  4. Information tirée du registre du CCCOS (source inconnue).
  5. Positions établies selon les journaux de bord des navires.

Entre 12 h 35 et 13 h 42, les différentes communications entre le CCCOS et le CCOS - Rio indiquent que :

À 14 h 5, le CCCOS a communiqué avec le Hanjin Gothenburg et lui a demandé de tenter d'établir la communication avec le Concordia sur les canaux VHF 13/16, 2182 kHz et l'appareil ASN. Un rapport des conditions météorologiques a aussi été demandéNote de bas de page 41. À 15 h 6, le CCCOS a reçu la liste des membres d'équipage du WIC-NS, qu'il avait demandée à 13 h.

À 15 h 25, à la demande du CCOS - Brésil, le Crystal Pioneer a dévié de son itinéraire pour se rendre vers la position du navire en détresse indiquée par la RLS.

À 15 h 59, le CCCOS a été informé qu'un avion (un P95a de l'Armée de l'air du Brésil) était en route et qu'un navire militaire avec hélicoptère prendrait le départ à 18 h.

À 16 h 26, le Hanjin Gothenburg a signalé au CCCOS qu'il n'avait pu établir la communication avec le Concordia, et qu'il n'avait reçu aucun EGC.

À 18 h 9, le CCCOS a appelé le CCOS - Rio et a appris que l'avion envoyé à 17 h devait atteindre les lieux du sinistre à 18 h 30. Le CCOS - Rio n'a pas été en mesure de fournir une heure d'arrivée prévue pour le navire militaire. À 18 h 54, le CCCOS a transmis un EGC au nom du CCOS - Rio après que celui-ci a accepté l'offre qu'on lui avait préalablement présentée.

À 18 h 55, le Hokuetsu Delight a reçu l'EGC alors qu'il naviguait dans la région. Le capitaine a donné des consignes pour la nuit et ordonné la tenue d'une vigie rigoureuse et qu'on l'appelle si quelque chose était repéré.

Quelques moments après le coucher du soleil, l'avion SAR a atteint la position du voilier en détresse et a vu les radeaux de sauvetage. Le capitaine et le deuxième officier ont lancé des fusées éclairantes à parachute en réponse aux signaux avant que l'avion reparte. Durant ce temps, le SART ne donnait aucune indication qu'il recevait des interrogations du radar de recherche de l'avion.

À 20 h 58, le CCCOS a été informé par le CCOS - Rio qu'un bateau et 4 radeaux de sauvetage avaient été repérés, et que 3 navires commerciaux et 1 navire militaire étaient en route.

1.5.1 Opérations de sauvetage

À 1 h, le 19 février 2010, le Crystal Pioneer a communiqué avec le Hokuetsu Delight alors qu'il approchait de la position du voilier en détresse afin de demander de l'aide pour les opérations de sauvetage. Les membres d'équipage du Hokuetsu Delight ont vu les fusées de détresse et ont rejoint le groupe de radeaux du capitaine vers 3 h 30 (position approximative : 27° 18′ S, 040° 49′ O). À ce moment-là, un autre KC-130 de l'Armée de l'air du Brésil était sur les lieux. Deux survivants ont immédiatement été secourus, mais il a fallu attendre après l'aube, vers 7 h 5, avant que les autres puissent monter à bord en raison des fortes vagues. Le médecin blessé, incapable de grimper à l'échelle, a été soulevé par un filet de fret, tout comme le capitaine, le premier officier et le maître d'équipage.

Photo 2. Radeaux de sauvetage le long du Hokuetsu Delight
Radeaux de sauvetage le long du <em>Hokuetsu Delight</em>

(Source : Mitsui O.S.K. Lines, Ltd.)

Le Crystal Pioneer a rejoint le radeau du deuxième officier presque au même moment, mais en raison des conditions météorologiques, les survivants ont seulement pu commencer à quitter leur radeau à 4 h 45. Cette manœuvre a demandé 30 minutes.

Une fois à bord de leur navire respectif, le capitaine et le deuxième officier ont pu confirmer la présence de toutes les personnes qui se trouvaient à bord du Concordia.

Un des 4 radeaux a été récupéré des eaux. Ce radeau et le matériel qu'il contenait n'étaient pas disponibles pour examen au cours de l'enquête.

1.5.2 Transfert sur le navire militaire

À 8 h 40, après avoir informé le CCOS - Brésil du succès du sauvetage, les 2 navires ont reçu l'ordre d'aller à la rencontre du navire militaire brésilienNote de bas de page 42. La rencontre a eu lieu au cours de l'après-midi du 19 février 2010, à une positionNote de bas de page 43 à 185 milles marins à l'ouest du sud de Cabo Frio, au Brésil. La décision des autorités brésiliennes qui voulait que les survivants soient transférés par hélitreuillage sur le navire militaire a été contestée par le capitaine du Concordia, en raison de l'état des survivants et des risques en cause. Afin de régler la question, il a accepté d'être lui-même ainsi transféré, mais la manœuvre a été retardée en raison de problèmes visant le treuil de levage de l'hélicoptère. Plus tard, alors que le capitaine était à bord du navire militaire, 4 étudiants ont été transférés à partir du Crystal Pioneer et, malgré les objections du capitaine, les opérations de levage se sont poursuivies jusqu'à la tombée de la nuit, alors que 8 autres étudiants ont changé de navire. Les autorités ont ensuite demandé aux deux navires commerciaux de se rendre à Rio de Janeiro. Ils y sont arrivés l'après-midi du 20 février 2010 et tous les survivants ont pu rejoindre la terre ferme.

1.6 Blessures

Le médecin présentait les blessures suivantes : épaule disloquée, fracture de l'humérus et plusieurs côtes cassées. Les survivants présentaient des éruptions cutanées causées par l'exposition à l'eau salée au cours de leur séjour dans les radeaux de sauvetage.

1.7 Dommages au navire

Après l'abandon, le navire est demeuré renversé, mais à flot. On présume qu'il a coulé.

1.8 Dommages à l'environnement

Aucun dommage environnemental n'a été observé immédiatement après l'événement.

1.9 Renseignements sur le personnel

Le capitaine a étudié les sciences de la merNote de bas de page 44 à l'Université de Washington à Seattle (Washington) (É.-U.) de 1969 à 1973. En 1971, il a obtenu de la Garde Côtière des États-Unis (É.-U.) son premier brevet de capitaine, dont la classe a été relevée en 1981 à celle de capitaine de navires transocéaniques à vapeur, à moteur ou à moteur auxiliaire d'au plus 1600 tonnes de jauge brute. Il comptait 25 ans d'expérience de commandement à bord de différents types de voiliers, notamment à gréement aurique et carré, et a travaillé avec différents établissements d'enseignement qui offrent des programmes d'études à bord de voiliers. Il s'est joint au West Island College International en octobre 2008 à titre de premier officier et a été nommé capitaine du Concordia en avril 2009. L'ancien capitaine permanent a servi à bord du Concordia pendant 18 ans.

Le premier officier a commencé sa carrière en mer en 1974. En 1983 et en 1997, respectivement, il a obtenu les certificats de capitaine de pêche (troisième classe) et d'officier de pont de quart de Transports Canada. En 2005, il a obtenu son certificat de capitaine au long cours. Il comptait environ 2 ans d'expérience à bord de voiliers à trois mâts et une année et demie sur une barquentin. Avant de se joindre au Concordia à Recife, il avait passé 5 mois sur le navire en 2005.

Le deuxième officier détenait un brevet de capitaine de la Maritime and Coastguard Agency (MCA) (200 TJB) et d'officier de pont de quart (500 TJB) émis par le Royaume-Uni en 2008Note de bas de page 45. Il comptait 3 ans d'expérience professionnelle à titre de capitaine ou d'officier sur différents voiliers à gréement avant ou arrière. Il avait aussi à son actif des séjours non professionnels à bord de 2 voiliers-écoles gréés en carré différents. Il s'est joint à l'équipage du Concordia le 30 décembre 2009 à titre de deuxième officier.

Le maître d'équipage avait passé de nombreuses années à bord du Concordia, premièrement comme étudiant, puis à titre de membre d'équipage en 2007. Il a occupé le poste de maître d'équipage adjoint durant 2 ans et de maître d'équipage durant 1 an. Il a suivi des séance de formation sur les fonctions d'urgence en mer au Royaume-Uni et au CanadaNote de bas de page 46 et un cours de marin physiquement apte aux É.-U., sans toutefois obtenir de brevetNote de bas de page 47.

1.10 Certificats du navire

Le voilier a été construit sous la supervision de la société de classification Lloyd's Register et a conservé sa cote depuis sa mise à l'eau en 1992. Il a d'abord été immatriculé aux Bahamas, mais son immatriculation est passée à la Barbade en 2005. Le navire était enregistré à titre de yacht-école à voiles. Le certificat indique que le voilier était autorisé à transporter un total de 66 apprentis et membres d'équipage.

La société de classification a émis les certificats obligatoiresNote de bas de page 48 pour ce navire au nom de l'État du pavillon. En outre, le voilier était soumis à un programme d'inspections annuelles par l'État du pavillon et l'inspection la plus récente avait été menée à Lunenberg (N.-É.), le 3 septembre 2009, par un évaluateur contractuel. Le certificat de sécurité spécifiant l'effectif minimal de sécurité du bâtiment a été émis par la Barbade le 24 juillet 2006. Transports Canada a aussi procédé périodiquement à des inspections pour le contrôle par l'État du portNote de bas de page 49, la dernière ayant eu lieu à Lunenberg (N.-É.) en juin 2009.

Au moment de l'événement, tous les certificats étaient valides.

1.11 Prévisions météorologiques

Un système météorologique actif était attendu dans la région de l'itinéraire prévu du Concordia vers Montevideo (Uruguay) depuis le 12 février 2010. Le 15 février 2010, le Service de météorologie maritime de la Marine brésilienne a émis les prévisions suivantes pour les régions Alfa et Bravo de METAREA VNote de bas de page 50 :

Le 16 février 2010, d'autres avertissements ont été émis pour la région Bravo indiquant un changement de direction du vent et des vagues :

Figure 2. Représentation des limites de METAREA V et des régions de prévision
Représentation des limites de METAREA V et des régions de prévision

© Droit de publication réservé à la couronne et/ou droits de bases de données. Reproduit avec l'autorisation du Contrôleur du Service d'édition des publications officielles du Royaume-Uni et du Bureau hydrographique du R.-U.(www.ukho.gov.uk).

Le tableau des pressions au niveau de la mer publié par le Service de météorologie maritime de la Marine brésilienne pour la période du 14 au 17 février 2010 indiquait la progression lente vers le nord-est d'un front quasi stationnaire de la zone Alfa vers la zone Bravo. Le front était situé à proximité de la position signalée du Concordia au moment du renversement (voir l'annexe E).

1.12 Rafales descendantes

Tous les orages produisent des courants descendants d'intensités variables qui peuvent atteindre la surface de la terre. Ceux qui atteignent la surface de la terre sont généralement appelés des grains de pluie. Les courants descendants sont créés dans le cadre du cycle de vie d'un orage (voir la figure 3), mais leur force varie selon la structure de l'orage, l'intensité du principal courant ascendant et d'autres facteurs. Les courants descendants ne sont pas toujours associés à des précipitations. Un fort courant descendant qui produit une rafale de vents destructeurs sur la surface, ou à proximité, est appelé « rafale descendante ».

Figure 3. Front orageux type (Source : rapport du NTSB MAR-87/01 )
Front orageux type (Source : rapport du NTSB MAR-87/01 )

De graves orages peuvent produire de très fortes rafales descendantes localisées et si intenses qu'elles peuvent être classées comme des microrafales. Une microrafale intense peut générer des vents destructeurs pouvant atteindre 150 nœuds. La majorité des microrafales sont de courte durée (2 à 5 minutes), mais durent rarement plus de 5 minutes. La vitesse à laquelle l'air descend au cours d'une microrafale empêche celui-ci de se réchauffer selon les températures ambiantes environnantes. Les microrafales sont donc généralement associées à une importante chute de la température de l'air.

1.12.1 Imagerie satellitaire des conditions météorologiques au moment de l'événement

Les images de l'hémisphère Sud produites par le satellite GOES-12 indiquaient la présence d'importants orages de convection concentrés sur une ligne d'humidité nord-ouest/sud-est à la fin de la matinée et au cours de l'après-midi du 17 février 2010. Cette ligne d'humidité était quasi stationnaire le long d'une frontière frontale qui longeait la frontière sud du courant-jet à haute altitude. Entre 13 h et 17 h, de forts vents descendants de l'ouest étaient présents, poussant l'air sec à moyenne et haute altitudes par-dessus les cellules orageuses, qui se développaient déjà en raison des courants de convection tropicaux au nord-est de la frontière frontale.

Les images satellites infrarouge et vapeur d'eau de 14 h 9 indiquaient une forte intrusion sèche provenant de l'arrière d'un nuage sur le flanc nord-ouest de la tempête (entre les 2 cellules orageuses les plus intenses), pointant directement dans la direction du Concordia (voir la figure 3). Des images satellites subséquentes ont aussi montré une diminution assez rapide de toutes les tempêtes dans la région visée au cours des heures qui ont suivi le renversement.

Figure 4. Image satellite infrarouge et vapeur d'eau prise à 17 h 9 UTC La position du navire a été calculée approximativement 13 minutes avant le renversement du Concordia. (Source : NOAA)
Image satellite infrarouge et vapeur d'eau prise à 17 h 9 UTC

1.13 Emplacement des appareils de communication

Le voilier était pourvu des appareils radio conformes au SMDSM pour les zones de mer A1, A2 et A3Note de bas de page 51, notamment d'une radio MF/HF, de 2 appareils Inmarsat-C (chacun ayant son propre numéro) dans la chambre des cartes, et de 2 appareils ASN VHF à bâbord de l'escalier menant à la chambre des cartes. Toutes les unités étaient en mesure de transmettre des alertes de détresse indéfiniesNote de bas de page 52. Aucune fonction télécommandée de transmission d'alertes de détresse n'était prévue, ce que n'exigeait pas la réglementation.

Il y avait un autre appareil VHF à tribord de la timonerie, mais celui-ci ne fonctionnait pas. Il y avait 5 radios portatives VHF, dont 2 étanches, rangées dans un casier à bâbord de la timonerie. Ce casier contenait aussi le téléphone satellite Iridium.

1.14 Équipements d'urgence

Le Concordia avait à son bord 8 radeaux de sauvetage pour une capacité totale de 138 personnes, ce qui est considérablement supérieur aux exigences réglementairesNote de bas de page 53. Quatre radeaux de sauvetage pouvant accueillir 20 personnes étaient arrimés à l'embelle du navire, juste devant la timonerie sur le pont principal. Il y avait aussi un radeau de sauvetage pour 20 personnes de chaque côté du pont du mât d'artimon, et un radeau pour 10 personnes et un autre pour 8 personnes étaient installés à l'arrière, sur le pont principal, près de la poupe à tribord. Tous les radeaux de sauvetage étaient pourvus de dispositifs de largage automatique en cas de naufrage. Tous les radeaux de sauvetage avaient fait l'objet d'une inspection annuelle en août 2009 et leurs certificats étaient valides.

Le navire transportait 72 gilets de sauvetage. Au cours de l'été 2009, ils ont été déplacés des cabines à 2 compartiments de rangement sur les ponts du poste d'équipage et d'artimon. Les couvercles des compartiments de rangement étaient pourvus de dispositifs d'ouverture automatiques. Il y avait 32 gilets de sauvetage dans chacun des compartiments, les autres étaient conservés dans le compartiment de l'équipement d'urgence sous la passerelle et dans le bureau, la timonerie et la chambre des cartes du navire.

Les emménagements du navire étaient équipés d'un système d'éclairage d'urgence. Les portes de sortie étaient identifiées par une affiche appropriée et il y avait dans les coursives des flèches directionnelles indiquant les itinéraires de sortie.

Le compartiment de l'équipement d'urgence sur le pont principal sous la timonerie contenait 75 combinaisons d'immersion, d'autres gilets de sauvetage et des contenants d'eau en cas d'urgence.

1.15 Préparation aux situations d'urgence

Des fonctions d'urgence étaient assignées aux membres d'équipage, aux professeurs et aux étudiants conformément au rôle d'appel préparé par le capitaine. Le capitaine du navire s'assurait que tous les membres de l'équipage participaient régulièrement à des exercices, notamment en cas d'incendies, « d'homme à la mer » et d'abandon du navire. La fréquence de ces exercices dépassait le nombre prévu par la réglementation. Aucun exercice, aucune pratique et aucun breffage sur les difficultés propres à un chavirement ou à un renversement soudain n'ont été organisés, mais la réglementation ne l'exige pas. En ce qui a trait à un chavirement soudain, l'équipage du navire a été mis au courant de l'emplacement des gilets de sauvetage et des combinaisons d'immersion, des provisions supplémentaires pour radeaux de sauvetage ainsi que de la capacité d'autolargage et de gonflement de ces radeaux.

1.16 Pilote automatique

Le navire était équipé d'un pilote automatique. Une fois l'appareil allumé et la fonction « automatique » sélectionnée, le cap pouvait être modifié selon 2 méthodes, premièrement en utilisant les boutons bâbord et tribord, qui permettaient une modification d'un degré à chaque pression, ou par le bouton de sélection de trajet, qu'on pouvait tourner vers le cap souhaité, puis enfoncer pour confirmer le changement. Une fois le changement de cap amorcé, le pilote automatique contrôlait le mouvement de la barre selon un angle de barre calculé par le système et fondé sur une plage préétablie. Cette plage, ou limite, pouvait être établie pour garantir que le cap du navire ne changerait pas trop rapidement. Dans le cas de cet événement, la limite de débattement du pilote automatique était réglée à 5°. Ainsi, quelle que soit l'importance du changement de direction choisie, la barre ne se déplacerait pas de plus de 5° à bâbord ou à tribord. L'angle de barre maximal était de 35° à partir de l'axe.

1.17 Anémomètre

Le Concordia était équipé d'un anémomètre composé d'un convertisseur de vent, installé au sommet du mât de misaine, et d'un indicateur de vitesse et de direction du vent apparent monté dans la timonerie. Même si l'enquête n'a pas permis d'établir le modèle exact du matériel, la précision de tous les anémomètres varie selon de nombreux facteurs, notamment :

Des essais en soufflerie ont révélé que l'erreur dans la mesure de la vitesse du vent due à l'angle d'inclinaison d'un anémomètre peut être aussi importante que 15 % à 20 % dans le cas d'une inclinaison pouvant atteindre 45°Note de bas de page 54.

1.18 Livret de stabilité

Le livret de stabilité du Concordia a été préparé par le personnel du chantier naval en 1992. Les calculs et renseignements présentés dans ce document visaient à respecter les exigences des 2 entités suivantes :

Le 16 juin 1993, le document a été approuvé par Lloyd's Register, qui a déclaré qu'il respectait le format prescrit par le Chapitre I, Généralités, Règle 10(2) de l'annexe I de la Convention internationale de 1966 sur les lignes de charge, et contenait différentes données, notamment :

1.19 Directives relatives à la stabilité à l'intention du capitaine

En plus des différents calculs fournis pour démontrer la conformité aux règlements, le livret de stabilité comprend de nombreuses pages de renseignements, sur les sujets qui suivent, qui visent à guider le capitaine :

1.19.1 Courbes d'angle d'inclinaison stable maximale recommandées pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafale ou de grain

Tel qu'il est indiqué dans les notes ci-haut mentionnées, le livret de stabilité du Concordia contient des directives sous forme de courbes dans la section « Courbes d'angle d'inclinaison stable maximale recommandées pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafale ou de grain » Note de bas de page 55 (voir l'annexe F). En ce qui a trait aux rafales, les courbes procuraient au capitaine la valeur d'un angle d'inclinaison stable, soit 24°, qui entraînerait une marge de sécurité acceptable si le navire était soumis à une augmentation de la vitesse du vent associée à une rafale. De telles augmentations ne sont pas susceptibles de dépasser de 1,4 fois la moyenne horaire Note de bas de page 56.

Les grains de pluie, toutefois, ont été enregistrés avec des vents d'une vitesse dépassant de 10 fois celle de la moyenne de l'heure précédente Note de bas de page 57. En connaissant la vitesse moyenne du vent apparent et l'angle d'inclinaison stable correspondant produit par ce vent, le capitaine pourrait utiliser les courbes de grain pour évaluer la vulnérabilité du navire aux grains, en rapport avec l'allure et le plan de voilure du navire en vigueur à ce moment. S'il a déterminé que le risque d'envahissement par les hauts était élevé, le capitaine pourrait prendre des mesures en vue de réduire l'angle d'inclinaison stable du navire, et donc le risque.

L'entrée des courbes de grain du Concordia, avec les vitesses du vent apparent et les angles d'inclinaison correspondants, à des points représentatifs au cours de la période menant au renversement, donne les résultats suivants :

Tableau 2. Valeurs des courbes de grain du Concordia
Période Vitesse du vent apparent (en nœuds) Angle d'inclinaison du navire Vitesse du vent « sécuritaire » maximale (en nœuds) Marge de sécurité
Avant que le capitaine ne descende de 15 à 18 de 50 à 55 3,2
Une heure avant le renversement 18 (jusqu'à 20) 10° 40 2,2
De 2 à 3 minutes avant le renversement 23 23° 35 1,5

1.20 Exigences réglementaires relatives aux directives en matière de stabilité

Le type et le format des directives relatives à la stabilité données aux capitaines de voiliers sont dictés en grande partie par les exigences de chaque État du pavillon.

Au niveau international, l'Organisation maritime internationale (OMI)Note de bas de page 58 n'a pas de normes ou directives particulières en ce qui a trait à la stabilité des voiliers. Bien qu'il soit possible d'inclure les voiliers-écoles dans la définition des navires « spécialisés » aux fins de l'application du Code of Safety for Special Purpose Ships,les dispositions de ce code liées à la stabilité ne traitent pas des considérations uniques en matière de stabilité auxquelles un voilier est soumis. Il n'y a pas non plus dans le code de dispositions visant à faire en sorte que le livret de stabilité inclue des renseignements qui pourraient servir à conseiller ou à orienter les capitaines en rapport avec les limites liées à la stabilité d'un navire voiles dehors.

Plusieurs États de pavillonNote de bas de page 59 ont adopté des dispositions réglementaires qui traitent expressément de la stabilité des voiliers et exigent de ceux-ci que l'évaluation de leur capacité à se redresser voiles dehors soit connue. La fourniture de directives aux capitaines ne fait toutefois pas partie de ces exigences.

En revanche, des normes concernant la stabilité des voiliers ont été élaborées au R.-U. et adoptées ultérieurement par plusieurs autres paysNote de bas de page 60. Ces normes comprennent l'exigence de fournir des directives au capitaineNote de bas de page 61 sous forme de courbes de grain, comme celles qui ont été incluses dans le livret de stabilité du Concordia. En outre, l'information en question doit être aisément accessible à bord du navire et doit comprendre des exemples démontrant de quelle manière les courbes de grain peuvent être utilisées pour prendre des décisions opérationnelles.

1.21 Évaluation de la stabilité par le Bureau de la sécurité des transports

1.21.1 Courbe de bras de levier de redressement

À l'aide de données tirées du livret de stabilité du navire, en plus de celles provenant des plans du navire, un modèle informatique de la forme de la coque et des réservoirs a été créé et validé en vue d'être utilisé dans des calculs plus poussés. La croissance du déplacement à l'état lège et du centre de gravité du navire depuis son lancement a été estimée, et l'état sous charge du navire au moment de l'événement a été déterminé. À partir de ces données, la courbe de bras de levier de redressement relative au navire au moment de l'événement a été calculée.

1.21.1.1 Ouvertures dans la coque et les roufs

L'enquête a permis de déterminer qu'il y avait dans le pont exposé et dans les roufs de nombreuses ouvertures qui n'étaient pas fermées au moment de l'événement et qui auraient servi de points d'entrée de l'eau de mer en cas d'immersion (voir la Photo 3). Les angles d'immersion de certaines de ces ouvertures ont été calculés comme suit :

Tableau 3. Ouvertures dans la coque et les roufs
Description Angle d'immersion
Note : L'immersion de ces points critiques mènerait à l'envahissement par les hauts de la coque.
Porte de la cuisine (rouf avant, côté bâbord) 56,5°
Porte du poste d'équipage (rouf avant, côté bâbord) 58,4°
Sortie de ventilation sanitaire (rouf avant, côté bâbord) Note 65,0°
Fenêtre de la salle des radios (rouf arrière, côté bâbord) 68,6°
Porte de la timonerie (rouf arrière, côté bâbord) 74,2°
Porte intérieure de la chambre des cartes 87,9°
Échappement des moteurs (haut du mât d'artimon) Note 91,7°
Claire-voie de la salle des machines (à l'avant de la timonerie, décalée vers tribord) Note 100,5°
Escalier du poste d'équipage (à l'intérieur du rouf avant) Note 116,5°

Note : L’immersion de ces points critiques mènerait à l’envahissement par les hauts de la coque.

Photo 3. Certaines ouvertures critiques du côté bâbord
Certaines ouvertures critiques du côté bâbord

(Source : Matt Jacques Photography)

Encerclés de l'avant vers l'arrière : porte du poste d'équipage, porte de la cuisine, sortie de ventilation sanitaire, claire-voie de la salle des machines et porte de la timonerie.

En plus des ouvertures susmentionnées, il y avait sur le pont principal avant des manches à air menant au magasin à peinture et aux magasins du maître d'équipage ainsi qu'une prise d'air extérieur et un conduit de sortie reliés à la salle des machines et au compartiment de l'appareil à gouverner, de même qu'un escalier arrière menant aux emménagements de l'entrepont situés à l'intérieur du rouf arrière. Bien que toutes ces ouvertures aient été munies d'un moyen de fermeture ou de protectionNote de bas de page 62, elles étaient ouvertes au moment de l'événement.

1.21.1.2 Intégrité de l'étanchéité aux intempéries

Les courbes de bras de levier de redressement présentées dans le livret de stabilité du Concordia sont fondées sur l'hypothèse selon laquelle les portes étanches aux intempéries des 2 roufs sont bien fermées, et que, par conséquent, les roufs contribuent à la flottabilité du navire. L'effet d'un tel phénomène sur la capacité de redressement du navire peut être vu sous forme d'une deuxième « bosse » dans la courbe de bras de levier de redressement, au-delà des angles d'environ 60° (voir la figure 5).

Comme mentionné précédemment, les portes des roufs du côté bâbord étaient ouvertes au moment de l'événement. L'effet que cela a eu sur la capacité de redressement du navire a été modélisé par l'élimination de la contribution, à la flottabilité, du rouf visé au-delà des angles où ses portes seraient immergées, tel que montré au Tableau 3—le rouf avant a été négligé après environ 58°, et le rouf arrière, après environ 88°. C'est ainsi qu'on a obtenu la courbe de bras de levier de redressement au moment de l'événement, illustrée à la figure 5 ci-dessous.

Figure 5. Courbe de bras de levier de redressement de l'événement Note de bas de page 63 montrant l'effet de la perte de flottabilité dans les roufs
Courbe de bras de levier de redressement de l'événement montrant l'effet de la perte de flottabilité dans les roufs

1.21.2 Inclinaison due au vent – Vent horizontal

Il est possible de présenter l'effet d'inclinaison due au vent sur un navire sous forme de courbe de bras de levier d'inclinaison due au vent, qui, lorsqu'elle est superposée à la courbe de bras de levier de redressement du navire, indique l'angle d'inclinaison stableNote de bas de page 64. À l'aide des renseignements sur le plan de voilure et la courbe de bras de levier de redressement du navire, il est possible de calculer la plage des vitesses de vent apparent qui seraient nécessaires pour produire un angle d'inclinaison due au vent donné. De tels calculs ont été effectués pour le Concordia afin de refléter la plage d'angles d'inclinaison due au vent présents avant l'événement et pendant ce dernier (voir l'annexe G). Les calculs ont ensuite été comparés aux données sur le comportement environnemental et sur le comportement du navire correspondant qui ont été observés, données recueillies durant l'enquête (voir l'annexe H), puis validés par rapport aux dites données.

Les données de l'annexe G montrent que les mêmes vitesses de vent apparent (dans la plage d'environ 27 à 37 nœuds) produiraient des angles d'inclinaison due au vent stable variant d'environ 38° à 68°. Autrement dit, à mesure que la vitesse du vent apparent augmente et passe de 0 à une valeur qui se situe entre 27 et 37 nœudsNote de bas de page 65, l'angle d'inclinaison due au vent qui en résulte augmente régulièrement pour atteindre environ 38°. L'augmentation de la vitesse du vent au-delà de ce point entraînerait toutefois une réaction beaucoup plus importante et l'inclinaison du navire atteindrait presque 70°. Il est possible de voir ce résultat plus clairement en superposant la courbe de bras de levier d'inclinaison due au vent à la courbe de bras de levier de redressement du navire, comme le montre la figure 6 ci-dessous, ce qui démontre qu'il n'y pas d'intersection claire des 2 courbes avant un angle d'environ 70°.

Figure 6. Courbes de bras de levier de redressement / courbe d'inclinaison due au vent de l'événement
Courbes de bras de levier de redressement / courbe d'inclinaison due au vent de l'événement

Il est également possible de voir à l'annexe G que, pour produire un angle d'inclinaison due au vent de plus de 70°, les vitesses du vent apparent nécessaires augmentent de façon importante au point où il faut un vent de plus de 60 nœuds pour faire gîter le navire à un angle d'environ 80°.

1.21.3 Inclinaison due au vent—Vent incliné par rapport à l'horizontale

Il est possible d'estimer l'effet d'inclinaison du vent incliné par rapport à l'horizontale, par exemple dans le cas d'une rafale descendante, en déplaçant la courbe de bras de levier d'inclinaison pour un vent horizontal, comme décrit dans la section précédente, à la droite sur l'axe des x. Par exemple, pour examiner l'effet des vents inclinés à 45° par rapport à l'horizontale, la courbe de bras de levier d'inclinaison due au vent horizontal peut être déplacée de 45° à la droite.

La Figure montre cet effet sur la capacité de redressement du Concordia. Premièrement, on suppose que le navire est incliné à un angle d'environ 28° en raison d'un vent horizontal. Selon le lien existant entre la vitesse du vent apparent et l'angle d'inclinaison qu'illustre l'annexe G, des vents horizontaux d'une vitesse se situant entre 23 et 31 nœuds seraient suffisants pour créer cet angle d'inclinaison. Ainsi, la courbe de bras de levier d'inclinaison se déplace de 30° sur la droite, en supposant que les vents se sont déplacés de 30° par rapport à l'horizontale. Comme l'illustre la Figure , la capacité de redressement du navire serait complètement dominée par l'action combinée de la vitesse du vent et de l'inclinaison.

Figure 7. Courbe de bras de levier d'inclinaison due au vent, pour un vent incliné de 30 ° par rapport à l'horizontale
Courbe de bras de levier d'inclinaison due au vent, pour un vent incliné de 30 ° par rapport à l'horizontale

1.21.4 Stabilité des grands voiliers

Les exigences en matière de stabilité du Code of Practice de la MCA du R.-U. ont été élaborées en 1989 et, à ce moment, visaient les navires d'une longueur allant jusqu'à 24 m. Lorsque l'on a évalué la possibilité d'appliquer lesdites exigences aux grands voiliersNote de bas de page 66, on a établi ce qui suit :

Un renversement constitue un réel danger, et on a rapporté de nombreuses situations où de très grands navires de plaisance étaient inclinés à des angles suffisants pour alerter le capitaine et les membres de l'équipage.

Certains très grands navires de plaisance dont la plage de stabilité est inférieure à 90° peuvent présenter des plans de voilure et des caractéristiques de stabilité qui, combinés, peuvent les rendre vulnérables aux vents d'une vitesse inférieure à 30 nœuds. Des vents d'une telle vitesse peuvent prendre la forme de rafales de force Beaufort 5 à 6, ou de grains.

1.22 Compétences requises des capitaines et officiers de voiliers

1.22.1 Internationales

Les exigences en matière de compétence relatives aux officiers et à l'équipage d'un voilier varient beaucoup selon l'État de pavillon. Au niveau international, la Convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (Convention STCW) ne contient aucune disposition ou mention précise pertinente aux compétences de l'équipage d'un voilier. Le protocole d'entente (PE) du conseil de sécurité de European Maritime Heritage est un autre accord international qui traite du sujetNote de bas de page 67. Plutôt que d'aborder des aspects techniques ou de conception, ce document vise à traiter des besoins des navires traditionnels (y compris les voiliers) en mettant l'accent sur la compétence des équipages et la gestion de la sécurité. Le PE vise expressément les navires dont la jauge brute est inférieure à 500 tonneaux, auxquels les autres conventions internationales ne s'appliquent pas, et il contient des dispositions relatives à la reconnaissance mutuelle des brevets ainsi qu'aux inspections de contrôle effectuées par les États du port. Une annexe du PE indique les détails des compétences requises dans le cas des officiers de quart et des capitaines de navires traditionnels (y compris les voiliers) à l'occasion de voyages dans les eaux à proximité du littoral ou au-delà de celles-ci. En ce qui concerne la stabilité, ces exigences sont limitées à une connaissance pratique de la stabilité et de l'assiette, y compris les principes de la stabilité du navire voiles dehors, avec un critère d'évaluation correspondant selon lequel les conditions de stabilité doivent être conformes aux critères de stabilité à l'état intact dans toutes les conditions.

En ce qui a trait aux procédures en situation d'urgence, le PE mentionne expressément, entre autres, la connaissance de l'appréciation des dommages et de la limitation des dégâts, ainsi que les mesures à prendre à la suite d'un abordage ou d'un échouement. Le document ne mentionne aucune procédure concernant les renversements.

1.22.2 Royaume-Uni

La Maritime and Coastguard Agency (MCA) tient à jour un programme d'accréditation des officiers de pont expressément pertinent aux yachts à moteur ou à voiles, commerciaux ou privés, et aux voiliers-écolesNote de bas de page 68. Pour obtenir un brevet de capitaine d'un voilier dont la jauge brute se situe entre 200 et 3000 tonneaux, les candidats doivent avoir suivi avec succès un module de formation sur la stabilité (en plus d'avoir passé un examen). Cela traite de sujets tels que les principes de base de la stabilité transversale, les courbes de stabilité statique, l'évaluation à l'aide d'un bras de levier constant d'inclinaison due au vent, de l'angle d'inclinaison produit par un vent de travers, et la sensibilisation au contenu des données de stabilité fournies aux yachts. Dans le cas des capitaines de navires dont la jauge brute est inférieure à 200 tonneaux ou de ceux qui occupent un poste aussi élevé que premier officier à bord d'un navire dont la jauge brute peut atteindre 3000 tonneaux, le niveau des connaissances requises sur le sujet de la stabilité est moins détaillé.

La réussite d'un examen oral est une autre exigence relative à l'obtention d'un brevet. Les directivesNote de bas de page 69 relatives aux candidats éventuels indiquent que les sujets d'examen peuvent inclure les mesures d'intervention d'urgence à la suite d'un événement tel qu'un homme à la mer, un abordage ou un échouement. Les procédures d'urgence à suivre en cas de renversement ne sont pas mentionnées explicitement.

La MCA exige également que le capitaine et les officiers de quart de tout navire gréé en carré aient servi pendant au moins 14 jours en mer dans le poste pertinent et qu'ils soient évalués par le propriétaire en vertu d'un système approuvé et surveillé par l'organisme, comme étant compétents à bord du navire en cause. L'évaluation inclut la connaissance des effets d'un renversement et des manœuvres telles que le virement de bord, le virement lof pour lof, le fait d'affronter un grain et la manœuvre par gros temps. Tout officier potentiel qui, en plus du brevet de base, est titulaire d'un brevet appelé Nautical Institute Square Rig Sailing Ship Certificate est considéré comme ayant respecté cette exigence. La publication du Nautical InstituteNote de bas de page 70 qui appuie ce brevet traite le sujet de la stabilité et du renversement de façon beaucoup plus approfondie et inclut une discussion des principes de la résistance des voiliers au renversement; elle contient également les directives dont la MCA exige qu'elles figurent dans le livret de stabilité de tout voilier.

À la suite de l'enquête de 1997 sur le chavirement du yacht à voiles Ocean Madame, la Marine Accident and Investigation Branch (MAIB) du R.-U. a formulé des recommandations concernant la disponibilité de l'information sur la stabilité, et l'adéquation de la formation connexeNote de bas de page 71. En conséquence, en 2001, la MCA a examiné dans le cadre d'un projet le programme de cours de formation pour s'assurer que les candidats acquéraient un niveau approprié de connaissances en rapport avec les questions de stabilitéNote de bas de page 72. Des livrets contenant des directives relatives à la stabilité ont ensuite été élaborés, soit un livret pour les yachts à moteur et un livret pour les voiliers. Dans le livret relatif aux voiliers, il est mentionné qu'il peut y avoir à bord du navire un livret d'information sur la stabilité rédigé par la MCA et contenant un diagramme de grain, mais la publication insiste par ailleurs sur la stabilité des petits yachts. En ce qui concerne le sujet de la formation sur la stabilité, les responsables du projet de la MCA ont conclu que les programmes de cours relatifs à la compétence en navigation à voile ne devaient pas inclure d'explication de l'angle d'inclinaison stable maximal recommandé pour prévenir l'envahissement par les hauts en cas de rafale ou de grain, mais que la présentation et l'explication de ces diagrammes dans le livret devaient être améliorées.

Dans le cas du présent événement, le deuxième officier n'avait reçu aucune formation ou évaluation officielle en rapport avec les courbes de grain, ce que n'exigeait pas la réglementation.

1.22.3 États-Unis

Les aspirants-officiers peuvent faire ajouter à leur brevet une mention relative aux voiliers et aux voiliers à moteur auxiliaire après avoir passé avec succès un examen sur des sujets connexes. Ceux-ci incluent les mesures de sécurité relatives aux voiliers, les règles de route, les procédures à suivre par gros temps, la terminologie de la voile et tout autre sujet considéré comme nécessaire pour établir la compétence du candidatNote de bas de page 73.

Dans le cas du présent événement, le capitaine n'avait reçu aucune formation spécifique ou évaluation officielle en rapport avec la présentation d'information sur la stabilité sous forme de courbes de grain, ce que n'exigeait pas la réglementationNote de bas de page 74.

1.22.4 Canada

La réglementation canadienneNote de bas de page 75 exigera que les officiers de pont d'un voilier soient titulaires d'une mention spéciale ajoutée à leur brevet de capacité de capitaine ou de lieutenant. La mise en application doit avoir lieu en novembre 2014. L'exigence sera fonction de l'exécution d'un service en mer admissible et de l'obtention d'un certificat de formation en voile applicable au type de gréement – qu'il s'agisse du gréement aurique ou du gréement en carré. Les détails de la formation qui sera requise pour obtenir la mention sont en cours d'élaboration.

Dans le cas du présent événement, le premier officier n'avait reçu aucune formation ou évaluation officielle en rapport avec les courbes de grain, ce que n'exigeait pas la réglementation.

1.23 Convention internationale de 1979 sur la recherche et le sauvetage maritimes

La Convention internationale de 1979 sur la recherche et le sauvetage maritimes (Convention SAR)Note de bas de page 76 mentionne les procédures à suivre durant une urgence, une alerte ou des opérations SAR. En ce qui concerne les situations en évolution, la convention établit 3 phases critiques – d'incertitude, d'alerte et de détresse – dont la dernière se définit comme suitNote de bas de page 77 :

En conséquence, dès la déclaration de la phase de détresse (par exemple dès la réception d'un signal d'une RLS et lorsque les tentatives de communiquer avec le navire ont échoué), un centre de coordination des opérations de sauvetage doit prendre des mesures, notamment celles qui suiventNote de bas de page 78 :

Au moment de l'événement, le Concordia naviguait dans la zone des eaux internationales qui est couverte par les ressources en recherche et sauvetage brésiliennes.

1.23.1 SISTRAM

Les systèmes de notification des mouvements des navires sont un des moyens qu'un État côtier peut utiliser pour aider à la recherche et au sauvetage. Ces systèmes fournissent des renseignements à jour sur les mouvements des navires dans une zone donnée; ils peuvent aussi servir à déterminer quels sont les navires qui peuvent être appelés à prêter assistance et qui sont en mesure d'arriver sur les lieux avant tout autre service de sauvetage. Le système brésilien, connu sous le nom de SISTRAM, est sous la responsabilité de la Marine brésilienneNote de bas de page 79. La participation à ce système est obligatoire pour tous les navires brésiliens ou ceux qui naviguent en vertu d'un contrat brésilien; ces navires doivent signaler leur position, leur cap, leur vitesse, les ports de départ et de destination, ainsi que la date d'arrivée prévue. Dans le cas de tous les navires étrangers, la participation au SISTRAM n'est obligatoire que dans les eaux territoriales du Brésil; une fois à l'extérieur de cette limite de 12 milles marins (NM), même s'ils demeurent dans la zone maritime de recherche et de sauvetage sous responsabilité brésilienne, leur participation est facultative.

Au cours de son voyage de Recife à Montevideo, le Concordia n'a à aucun moment participé au SISTRAM, et il n'était pas obligé de le faire au moment de l'événement.

1.24 Diffusion de l'information sur la sécurité maritime

En vertu du SMDSM, les navires doivent être équipés de façon à recevoir automatiquement de l'information sur la sécurité maritime(MSI), telle que les avis aux navigateurs, les prévisions météorologiques et les avis de système SAR.

En général, la livraison de la MSI s'effectue au moyen de 2 modes différents :

Les organismes de recherche et de sauvetage utilisent régulièrement les EGC pour diffuser de l'information concernant un sinistre dans une région en particulier. Dans le cas du présent événement, le seul message EGC reçu par tout navire a été transmis à 18 h 54, le 18 février 2010, par le centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage (CCCOS) d'Halifax.

1.25 Enregistrement d'une radiobalise de localisation de sinistres

Avant sa mise en place à bord d'un navire, toute RLS doit être enregistrée. Les renseignements relatifs à l'enregistrement incluent les détails au sujet du navire et du matériel de communication qui se trouve à bord, ainsi qu'une personne ou une entreprise avec qui communiquer en cas d'urgence et qu'il est possible de joindre en toute temps en cas d'activation de la RLS. Dans le cas des navires battant pavillon de la Barbade, les coordonnées de la personne ou de l'entreprise avec qui communiquer se trouvent dans la base de données de l'Union internationale des télécommunications (UIT).

La RLS du Concordia a été placée à bord du navire en juin 2009; elle a alors remplacé une RLS qui ne fonctionnait pas. Même si cela exigeait qu'on procède à un nouvel enregistrement, les coordonnées de la personne ou de l'entreprise à contacter n'ont pas été mises à jour dans la base de données de l'UIT. Le numéro de téléphone mentionné était aux Bahamas, mais il n'était plus en service depuis août 2004. La base de données contenait aussi un seul numéro Inmarsat-C. L'autre numéro, de même que celui du téléphone Iridium, n'était pas enregistré.

Depuis ses débuts, le système de RLS est sujet à un taux élevé de fausses alarmes. Les enregistrements du Système Cospas-SarsatNote de bas de page 80, l'organisme qui administre le programme de satellites, indiquent un taux global de fausses alarmes de 96,7 % dans le cas des RLS à 406 MHz. Le taux est de 98 % au Brésil et de 94,9 % au Canada. Par conséquent, lorsque les circonstances le permettent, dès qu'elles reçoivent une alerte de détresse envoyée par une RLS, les autorités SAR essaient de communiquer avec le navire ou le propriétaire pour s'assurer de l'existence réelle d'un sinistre avant de lancer les services de sauvetage. Selon des facteurs tels que les autres alertes et la disponibilité de ressources, les tentatives de contact ont habituellement lieu moins d'une heure après la réception de l'alerte initiale.

1.26 SART

Le transpondeur de recherche et de sauvetage (SART) est un transpondeur radar imperméable à l'eau et autonome qui interagit avec le radar bande X d'un navire ou d'un avion. Selon la proximité du SART, le radar affiche une ligne de points ou de cercles concentriques qui indiquent un azimut vraiNote de bas de page 81. Les SART sont équipés d'un moyen visuel ou sonore d'indiquer qu'ils sont activés par un radar.

1.27 Normes relatives aux transferts par hélicoptère

En termes généraux, les hélitreuillages effectués par le ministère de la Défense nationale du Canada ne le sont que lorsqu'ils sont nécessaires et seulement après examen de nombreux facteurs opérationnels, notamment la météo, l'endurance de l'aéronef et le niveau d'urgence.

Aux É.-U., la politique de l'USCG interdit expressément les transferts par hélitreuillage « de complaisance » en raison des risques élevés liés à ce type d'opération. Cela inclut le transfert de dignitaires pour des besoins administratifs ou logistiquesNote de bas de page 82.

1.28 Gestion de la sécurité

En ce qui a trait à la gestion du Concordia, qui se trouve la plupart du temps loin de son port d'attache, les difficultés incluaient la communication entre différents fuseaux horaires, la nécessité de composer avec des conditions opérationnelles en évolution et la gestion des affaires à divers endroits nouveaux à l'échelle internationale. En outre, les membres clés de l'équipe de gestion étaient novices dans leur rôle et les membres de l'équipage changeaient régulièrement, ce qui demandait de se familiariser avec le navire.

L'enquête a permis de déterminer que WIC-NS avait fourni aux professeurs et aux membres d'équipage à bord du navire un guide d'orientationNote de bas de page 83. Les étudiants se sont aussi vu remettre un livre d'inscription de la formation en voile qui leur permettait de consigner les réalisations liées à la sécurité de base et aux techniques de matelotage.

Avant la nomination du capitaine en avril 2009, le capitaine et le président-directeur général (PDG) de WIC-Bahamas se sont réunis pendant 3 jours pour discuter de l'état et de l'exploitation du navire, de la mise en œuvre du programme et de diverses questions liées à la sécurité. Le PDG rendait également visite au navire périodiquement, visites durant lesquelles il discutait de questions d'exploitation, de sécurité et d'entretien avec l'équipage, en plus d'observer et d'évaluer la tenue d'exercices. Au cours d'une visite à Lunenburg en juillet 2009, il a approuvé plusieurs dépenses relatives à divers projets d'entretien et la relocalisation de l'arrimage des gilets de sauvetage. Le capitaine était chargé de diriger les opérations quotidiennes à bord du navire, y compris les exercices et l'entretien, conformément aux instructions et aux directives reçues.

Il n'y avait aucune politique de sécurité officielle et documentée émanant de WIC-Bahamas et servant à guider l'exploitation du navire, notamment les mesures préventives à prendre à l'approche d'un grain, pas plus qu'il n'y avait à l'intention des nouveaux officiers de pont de processus de familiarisation officiel traitant du livret de stabilité et des directives opérationnelles s'y trouvant.

En outre, en ce qui a trait au degré de préparation en cas d'urgence :

Il y avait également certains manques de cohérence concernant :

Au moment de l'événement, il n'y avait aucune exigence relative à la documentation de politiques et de procédures au sein d'un système organisé de gestion de la sécurité dans le cas des voiliers-écoles immatriculés à la Barbade. En revanche, les voiliers-écoles immatriculés au CanadaNote de bas de page 84 et au R.-U.Note de bas de page 85 sont tenus d'avoir un système de gestion de la sécurité formalisé. Plusieurs autres pays européens ont signé un PE dont la rédaction avait été coordonnée par le conseil de sécurité de European Maritime Heritage, qui établit les lignes directrices relatives à la mise en pratique d'un système de gestion de la sécurité dans le cadre de l'exploitation d'un navire traditionnel dont la jauge brute est inférieure à 500 tonneaux.

1.29 Liste des rapports disponibles

Les rapports de laboratoire qui suivent ont été rédigés :

  1. LP027 / 2010 Satellite Image Capture (Saisie des images satellitaires)
  2. LP063 / 2010 Video Analysis (Analyse vidéo)
  3. Rapport de stabilité du BST

On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

2.0 Analyse

2.1 Le renversement

Les voiliers comptent sur le vent pour obtenir de l'énergie propulsive; toutefois, celui-ci peut être la source d'importantes forces d'inclinaison. En soi, la compréhension de la stabilité d'un grand voilier, tel que le Concordia, exige l'évaluation de la stabilité du navire à des angles d'inclinaison beaucoup plus importants que ceux qu'un navire à moteur connaît ordinairement ainsi que de l'équilibre entre la force d'inclinaison exercée par le vent et la capacité de redressement de la coque.

Pour qu'il soit possible de comprendre complètement la stabilité du Concordia, la capacité de redressement du navire a été évaluée selon des scénarios de vent et d'inclinaison considérés comme représentatifs des conditions qui prévalaient au moment de l'événementNote de bas de page 86. Ces renseignements ont été analysés pour déterminer la plage des vitesses du vent ayant pu causer le comportement observé à bord du Concordia durant l'événement, vu qu'au cours des périodes ayant fait l'objet de l'examen, il n'est survenu aucun changement ni au plan de voilure du navire, ni à son état sous charge. Les sections qui suivent présentent cette analyse.

2.1.1 Inclinaison due aux vents horizontaux

Durant plus ou moins l'heure précédant l'événement, le Concordia naviguait avec un angle d'inclinaison d'environ 10° par vent de travers, la vitesse du vent apparent étant alors, selon les estimations, d'approximativement 18 nœuds. Les résultats des calculs de l'annexe G, par comparaison, indiquent qu'un angle d'inclinaison de 10° a pu être produit par des vents apparents d'une vitesse se situant entre 12 et 16 nœuds, se déplaçant à l'horizontale au-dessus de la surface de l'eau. L'écart entre la vitesse du vent observée et la vitesse du vent calculée est probablement attribuable, en grande partie, à des différences entre l'efficacité hypothétique des voiles et leur efficacité réelleNote de bas de page 87 ainsi qu'aux difficultés inhérentes au fait de déterminer quelles observations relatives au vent et à l'inclinaison peuvent être considérées comme représentatives de la fluctuation naturelle des conditions au cours d'une période si longue.

Pendant 2 à 3 minutes juste avant l'événement, on a observé que l'angle d'inclinaison du navire et la vitesse du vent apparent correspondante avaient augmenté pour atteindre environ 23°et 23 nœuds, respectivement. Il s'agit d'une augmentation de la vitesse du vent apparent d'environ 5 nœuds par rapport à la valeur représentative de l'heure précédente. Les calculs indiquent qu'un angle d'inclinaison de 23° aurait pu être produit par des vents apparents d'une vitesse se situant entre 20 et 28 nœuds. Cette correspondance améliorée entre la vitesse du vent observée et la vitesse du vent calculée indique une approximation plus appropriée de l'efficacité de la voilure. Cette approximation plus appropriée est probablement reliée à un changement de l'angle du vent apparent, ainsi qu'à une amélioration de la qualité des données disponibles pour l'enquête pendant cette période.

Aucune autre observation définitive de l'angle d'inclinaison du navire et de la vitesse du vent correspondante n'a eu lieu, mais lorsque le Concordia a dépassé 88°, l'anémomètre grimpait à 30 nœudsNote de bas de page 88. Les résultats des calculs indiquent que, par rapport à la valeur de 23 nœuds observée précédemment, une augmentation de la vitesse du vent apparent à une valeur se situant entre 27 et 37 nœuds aurait été suffisante pour que l'angle d'inclinaison du navire se trouve à environ 38°. Aucune autre augmentation de la vitesse du vent n'aurait alors été nécessaire; après avoir atteint ce point critique, le navire aurait continué de s'incliner à un angle approchant les 70° (voir la figure 8). Cela représente une augmentation de la vitesse du vent de seulement 4 à 14 nœuds par rapport à la valeur observée précédemment.

Figure 8. Bras de levier de redressement/d'inclinaison dans des vents horizontaux avec angles critiques montrés
Bras de levier de redressement/d'inclinaison dans des vents horizontaux avec angles critiques montrés

Tel que l'indique la figure 8, même si l'angle d'inclinaison stable du navire serait théoriquement de presque 70° dans ce genre de vent, l'eau aurait commencé à entrer en divers points critiques avant que cet angle ne soit atteint – d'abord par les portes ouvertes du rouf avant (56,5°), puis peu après par la sortie de ventilation sanitaire qui se trouvait tout juste derrière (65°). Avec toutes les portes du côté bâbord, ou sous le vent, ainsi que les manches à air et la claire-voie de la salle des machines étant en position ouverte au moment du renversement, il n'y avait rien pour prévenir ou atténuer l'envahissement par les hauts qui a suivi et a progressé jusqu'à ce que le navire perde finalement toute stabilité, se retourne et chavire. La capacité du navire à récupérer aurait été encore plus entravée par le poids de l'eau entraînée dans les voiles lorsque celles-ci ont été immergées et aussi par le déplacement possible de masses ou de matériel.

2.1.2 Inclinaison dans des vents inclinés par rapport à l'horizontale

On a évalué de manière plus approfondie la capacité de redressement du Concordia afin de prendre en compte les vents inclinés par rapport à l'horizontale. Tel que le démontre le graphique de la figure 5, une augmentation de la vitesse du vent apparent faisant passer celle-ci à une valeur située entre 23 et 31 nœuds aurait suffi à donner au navire une inclinaison d'environ 28, ce qui représente une augmentation de 0 à 8 nœuds par rapport à la dernière vitesse du vent observée avant le renversement, soit 23 nœuds. À partir de ce moment, l'inclinaison du vent à environ 30° par rapport à l'horizontale (à cause des vents descendants associés au grain balayant le navire) aurait suffi à vaincre complètement la capacité de redressement du navire. Ainsi, une vitesse de 23 à 31 nœuds représente la plage minimale de vitesses du vent qui auraient pu renverser le Concordia.

Bien que la courbe de bras de levier de redressement indique que le navire aurait en théorie été soumis à des moments négatifs, ou de chavirement, après avoir atteint l'inclinaison de 90°, le chavirement, qui a eu lieu quelques minutes plus tard, aurait été probablement retardé par l'effet d'amortissement des voiles et du gréement lorsque ceux-ci ont trempé dans l'eau, ainsi que par la flottabilité initiale des roufs (jusqu'au point où l'eau les a envahis par leurs portes ouvertes).

Photo 4. Immersion du livet de pont bâbord à 29°(Source : Erica Trimble)
Immersion du livet de pont bâbord à 29°

(Source : Matt Jacques Photography)

Photo 5. Immersion du bastingage bâbord à 41° (Source : Erica Trimble)
Immersion du bastingage bâbord à 41°

(Source : Matt Jacques Photography)

2.1.3 Vitesse du vent probable au cours du renversement

Les conditions météorologiques au moment du renversement étaient propices à la formation de forts orages de convection. Dans la zone de l'événement, l'imagerie satellitaire montrait clairement :

L'imagerie satellitaire a montré une dégradation assez rapide de tous les orages au-dessus de la zone durant les heures qui ont suivi les rafales descendantes, ce qui indique que l'intensité et la durée des courants ascendants associés à ce système étaient plus faibles, et que le complexe des orages lui-même était moins organisé en comparaison avec d'autres événements météorologiques au cours desquels on sait qu'il y a eu des microrafales.

En outre, des calculs (voir l'annexe G) ont permis de déterminer que des vitesses du vent d'environ 60 nœuds auraient été nécessaires pour renverser le navire directement à un angle d'environ 80°. Toutefois, une telle vitesse du vent ne correspond pas aux observations faites à bord; elle représente plus du double de la vitesse du vent de 23 nœuds lue sur l'anémomètre juste avant l'événement. De plus, on n'a observé aucun important changement de température à bord, effet associé à une microrafale. Par conséquent, la vitesse du vent atteinte durant l'événement était inférieure à celle ordinairement requise pour qu'il s'agisse d'une microrafale et qui, dans le cas des événements terrestres, se situe dans la plage de 50 à 150 nœuds. Il est peu probable que la vitesse du vent maximale durant l'événement ait dépassé 50 nœuds.

L'intensité précise de la rafale descendante affrontée durant l'événement est difficile à quantifier en raison du manque d'imagerie de radar Doppler. L'analyse post-hoc des modèles de dommages causés par le vent dans la zone de la rafale descendante soupçonnée est toutefois un autre outil qui sert à établir la vitesse du vent dans une rafale descendante. Dans le présent événement, le seul indice de dommages était que le navire avait été renversé et que 2 voiles s'étaient déchirées.

Bien que l'enquête n'ait pas permis de déterminer si les voiles avaient été endommagées par le vent ou par le renversement, l'évaluation de la capacité de redressement du Concordia indique que le navire, compte tenu de son état sous charge, de son plan de voilure et de son allure au moment de l'événement, était vulnérable aux grands angles d'inclinaison avec augmentations modérées de la vitesse du vent horizontal portant ce dernier à une valeur située entre 25Note de bas de page 89 et 37 nœuds. De plus, l'évaluation a démontré que si le navire avait subi des vents descendants associés au grain, cette plage serait réduite à 25 à 31 nœuds, au minimum.

Étant donné ce qui précède, il est par conséquent fort probable que la vitesse du vent horizontal à laquelle le navire a été confronté au moment du renversement se situait dans la plage de 25 à 50 nœuds. Rien ne prouve qu'une microrafale a eu lieu.

2.2 Intégrité de l'étanchéité aux intempéries

Même si le Concordia était équipé d'une protection étanche aux intempéries (p. ex. des portes et des écoutilles) dans le cas de tous les moyens d'accès aux espaces sous le pont exposé, en plus de dispositifs de fermeture dans le cas de tous les manches à air menant aux espaces sous pont, ceux-ci n'étaient pas tous bien fermés avant le renversement. L'enquête n'a pas permis de confirmer si les fenêtres du côté bâbord du rouf arrière avaient été bien fermées lorsqu'elles l'ont été en prévision de la pluie qui approchait, ou si elles avaient fait défaut après le renversement du navire; cependant, l'information recueillie durant l'enquête indique qu'il se peut que l'eau ait aussi pénétré par cette voie.

La figure 5 compare 2 courbes de bras de levier de redressement pour le Concordia. Pour l'une d'elles, il est supposé que les ouvertures des 2 roufs sont bien fermées (et que ceux-ci contribuent par conséquent à la flottabilité du navire), et l'autre courbe reflète la situation au moment de l'événement, en ne tenant compte de la flottabilité des roufs que jusqu'au point où les portes ouvertes deviennent immergées. À partir de cette comparaison, il est évident qu'en plus des avantages évidents liés à la prévention de l'entrée de l'eau, la capacité de redressement du Concordia est substantiellement amélioréedans l'hypothèse selon laquelle les roufs sont étanches aux intempéries. L'amélioration suggère que le navire aurait probablement récupéré du renversement.

Comme le navire n'était pas complètement sécurisé alors qu'approchait le grain, l'eau est entrée dans la coque lorsque le navire s'est incliné, ce qui a tellement réduit la capacité de redressement du navire qu'il n'a pas été en mesure de récupérer du renversement. En conséquence, l'envahissement par les hauts a progressé, ce qui a accru la perte de la stabilité jusqu'à ce que le navire finisse par chavirer.

2.3 Directives en matière de stabilité

Depuis son lancement, le Concordia avait à son bord un livret de stabilité qui non seulement démontrait la conformité aux critères du ministère des Transports du R.-U. et du Polish Register of Shipping (Société de classification polonaise), mais offrait au capitaine des directives précises en rapport avec l'évaluation des risques pour le navire liés à l'inclinaison durant un grainNote de bas de page 90 (voir l'annexe F). En outre, on a estimé que le déplacement à l'état lège et le centre de gravité du navire avaient peu changé depuis son lancement. Par conséquent, les directives et les calculs fournis dans le livret de stabilité ont conservé leur pertinence jusqu'au moment de l'événement.

Dans le présent événement, les courbes de grain du livret démontrent qu'à partir du moment où le capitaine est descendu, la marge de sécurité du Concordia contre un envahissement par les hauts durant un grain diminuait. Toutefois, le deuxième officier n'a vu aucune menace pour le navire, même si un grain était suivi et qu'un croisement était prévu. En conséquence, il n'a pas appelé le capitaine et n'a pris aucune mesure pour sécuriser le côté sous le vent, rendre les ouvertures étanches ou réduire l'angle d'inclinaison stable, soit en réduisant la toile, soit en modifiant l'allure du navire. N'importe quelle mesure anticipée de ce genre pourrait avoir atténué les conséquences des augmentations de la vitesse du vent connues plus tard lorsque le grain a touché le navire.

Lorsque le grain a frappé, l'inclinaison du navire a augmenté pour atteindre approximativement 23° et elle a conservé cette valeur pendant 2 à 3 minutes. La référence aux courbes de grain montre qu'à ce moment la marge de sécurité contre l'envahissement par les hauts avait diminué encore davantage. Toutefois, le deuxième officier, toujours inconscient de quelque risque que ce soit pour le navire, n'a pas appelé le capitaine et il n'y a pas eu non plus aucune tentative visant à sécuriser le côté sous le vent, à rendre les ouvertures étanches ou à réduire l'inclinaison. Ce n'est que lorsque l'inclinaison du Concordia a dépassé 23° que des mesures d'atténuation ont été prises pour modifier le cap du navire. Toutefois, à ce moment, la cadence des événements, et possiblement la réduction de l'efficacité du gouvernail, ont empêché l'efficacité de cette mesure, et l'angle d'inclinaison du navire a rapidement atteint ou dépassé 70°.

La vulnérabilité du Concordia aux augmentations modérées de la vitesse du vent n'est pas unique. Des recherches indiquent que certains grands voiliers peuvent présenter un plan de voilure et des caractéristiques de stabilité combinés qui les rendent vulnérables aux vents d'une vitesse inférieure à 30 nœuds. De telles vitesses de vent peuvent être vécues sous forme de rafales de force Beaufort 5 ou 6, ou sous forme de grains. Même si le livret de stabilité du Concordia comprenait des directives qui auraient pu être utilisées par ses officiers pour identifier le risque d'envahissement par les hauts à l'approche du grain, plusieurs États du pavillon n'exigent pas que ces renseignements soient fournis. En l'absence de directives traitant de la stabilité du voilier dans le contexte du plan de voilure et des conditions environnementales dans lesquelles ledit voilier évolue, les officiers peuvent manquer de renseignements clés avec lesquels évaluer le risque correspondant pour la sécurité.

2.4 Formation en stabilité à l'intention des capitaines et officiers de voiliers

Au moment de la prise en charge du quart le 17 février 2010, le capitaine avait pris plusieurs décisions en rapport avec le plan de voilure et l'allure avant la dégradation prévue de la météo à mesure que le front froid approchait. Il a pris ces décisions en fonction de son expérience personnelle, acquise à la fois au cours de sa carrière en mer et sur le Concordia. Au moment de la prise en charge du quart, le capitaine a avisé le deuxième officier qu'il devait déborder et fuir devant tout grain qui approchait, et limiter l'angle d'inclinaison pour que les salles de classe demeurent confortables. On lui a également dit que le plan de voilure était valable jusqu'à 40 nœuds.

Le deuxième officier a été breveté en vertu du système du R.-U., et il possédait un brevet de capacité pour agir comme officier de quart sur des navires dont la jauge brute pouvait atteindre 500 tonneaux. Les connaissances en stabilité requises pour obtenir ce genre de brevet sont élémentaires et ne traitent pas de toutes les questions de stabilité propres aux voiliers, telles que les courbes de grain.Ces facteurs se sont combinés pour créer une situation dans laquelle, malgré le fait qu'il détenait un brevet de capacité valide pour le poste qu'il occupait à bord, le deuxième officier n'avait aucune connaissance approfondie des caractéristiques de la stabilité du navire et de ses limites dans des conditions de vent variables. En conséquence, il n'était pas conscient de la vulnérabilité du navire au grain qui approchait.

Tel que le présent événement le démontre, ceux qui sont qualifiés pour être capitaine ou officier d'un voilier bénéficieraient une compréhension approfondie des caractéristiques de stabilité de leur navire et de ses limites en ce qui a trait aux combinaisons de vitesses du vent apparent et d'angles d'inclinaison. Ils seraient alors en mesure de faire une évaluation rapide de la stabilité du navire dans la gamme de conditions que celui-ci est susceptible d'affronter. Pour posséder ces connaissances, les capitaines et les officiers doivent toutefois d'abord recevoir l'information pertinente, puis l'interpréter et la mettre en pratique de façon compétente. En l'absence de telles connaissances, les instructions du capitaine doivent être conservatrices et explicites.

À l'heure actuelle, seuls quelques États du pavillon ont rendu obligatoire la prestation de directives au capitaine et établi les normes relatives au format et au contenu dans lesquels ce genre d'information doit être présentéNote de bas de page 91. En conséquence, ce ne sont pas tous les capitaines et officiers de voiliers qui profitent de ces directives au moment de prendre des décisions opérationnelles.

Même dans le cas où l'information a été fournie, il se peut qu'elle ne soit pas bien comprise. Les courbes de grain, par exemple, sont une représentation de la réaction du navire à des conditions environnementales et leur interprétation est complexe. Il a toutefois été démontré dans de nombreux pays que la formation actuelle des officiers insistait surtout sur les principes de base de la stabilité et qu'elle ne tenait pas compte de ce degré de détail. Dans la plupart des cas, elle ne traite pas de la théorie de l'architecture navale assez en profondeur pour permettre à un marin de faire la synthèse de cette théorie et de l'appliquer de nouveauNote de bas de page 92 à une nouvelle tâche, telle que l'interprétation de l'information sur la stabilité que sa formation ne lui permet pas d'utiliserNote de bas de page 93.

Pour acquérir cette compétence, les capitaines et officiers de voiliers profiteraient d'une formation officielle qui traiterait spécifiquement de l'interprétation et de l'utilisation opérationnelle des directives de stabilité qui leur sont données et qui, dans le présent cas, étaient les courbes de grain. Sans cette formation, ils pourraient ne pas être en mesure d'interpréter et d'utiliser efficacement les directives essentielles lorsque celles-ci sont incluses dans le livret de stabilité.

2.5 Préparatifs d'urgence relatifs à un renversement

Le risque d'être renversé en cas de grain ou de rafale de vent est bien connu et s'applique, à divers degrés, à tous les voiliers. Les renversements et leurs conséquences ont également été démontrés dans des événements antérieursNote de bas de page 94, qui ont à leur tour mis en évidence le besoin d'une préparation ou d'une formation préalable. Bien que les grains soient imprévisibles, les équipages et les propriétaires peuvent néanmoins examiner au préalable plusieurs facteurs, notamment :

Le Concordia respectait entièrement les exigences concernant l'équipement et les exercices, et dépassait considérablement les exigences relatives à la capacité en matière de radeaux de sauvetage. Le présent événement a toutefois mis en évidence l'importance des 5 facteurs précédents en situation de renversement, en raison par exemple de ce qui suit :

En outre, l'enquête a permis de déterminer ce qui suit :

Quelles que soient les circonstances, le processus d'abandon d'un navire est difficile, et il est encore plus difficile dans une situation de renversement, parce que l'orientation inconnue du navire et la menace imminente de chavirage et de naufrage imposent alors des exigences supplémentaires à l'équipage. Des exercices d'incendie, d'abandon du navire et de récupération d'un homme à la mer ont été effectués régulièrement par tout l'équipage du Concordia. Bien que la possibilité d'un chavirement ou d'un renversement ait été mentionnéeNote de bas de page 96 dans le cadre de ces exercices, on n'avait pas accordé toute l'attention requise aux circonstances exceptionnelles liées à un renversement, notamment le délai réduit au cours duquel l'abandon du navire peut être effectué.

Pour cette raison, il y a lieu d'adopter des plans et des procédures d'intervention d'urgence de façon à pouvoir cerner les tâches les plus prioritaires, telles que le fait de retracer tous les membres de l'équipage, et à faire en sorte que ces tâches puissent être accomplies dans le plus court délai possible. En outre, les plans exigent la tenue d'exercices périodiques. En ce qui concerne l'orientation inconnue du navire en cas de renversement, ce n'est pas une situation qui peut être simulée de façon réaliste durant un exercice; les membres de l'équipage profiteraient toutefois d'une certaine forme d'information dans le cadre du programme d'exercices.

Il est également reconnu que le placement et l'arrimage optimaux de matériel à bord d'un voilier posent d'importants défis. Ceux-ci peuvent être dus à la limitation de l'espace disponible, aux besoins périodiques de rénover le navire en raison de l'ajout ou de la modification de règlements, et notamment des obstacles posés par le gréement. Cependant, étant donné les possibilités de sauver des vies en situation d'urgence, il est justifié de la part des capitaines et des propriétaires de voiliers d'examiner la question attentivement en tenant compte de l'inclinaison du navire à des angles extrêmes.

L'importance du bon placement du matériel a déjà été soulevée par le National Transportation Safety Board des É.-U. à la suite de l'enquête que l'organisme a menée sur le chavirage et le naufrage du Pride of BaltimoreNote de bas de page 97. La question était également connue du capitaine du Concordia. Avant le présent événement, il avait donné ordre que les gilets de sauvetage soient rangés dans des caissons sur le pont, près du poste d'équipage et du mât d'artimon (plutôt que dans les cabines), de manière à ce qu'ils soient plus accessibles en cas d'urgence. L'avantage de cette mesure est devenu évident à la suite du renversement. La capacité supplémentaire en matière de radeaux de sauvetage transportés à bord du navire a constitué un avantage similaire.

La conception et l'aménagement de chaque navire sont uniques, et les solutions possibles à la question varient donc elles aussi. Parmi les exemples de la façon dont il est possible de traiter la question, on retrouve :

L'examen des exigences relatives à la compétence des officiers de voiliers a indiqué que, sauf dans le cas du R.-U.Note de bas de page 98, les événements tels que les abordages et les échouements sont mentionnés expressément, mais que les renversements ne le sont pas. À ce titre, il existe un risque que les officiers de quart à bord de voiliers ne soient pas au courant des mesures à prendre soit pour éviter une situation de renversement, soit pour réagir à une telle situation.

Les préparatifs d'urgence traitent des scénarios les plus probables qui peuvent se présenter. Dans le cas d'un voilier, le renversement est un de ces scénarios. Le fait d'avoir un équipage bien versé dans la question et un effectif qui a été mis au courant d'un tel scénario, de même qu'un breffage préalable sur l'emplacment des engins de sauvetage et du matériel de communication, peut améliorer considérablement les chances de réussite de l'intervention. L'absence du breffage mentionné plus haut fait augmenter les risques pour l'équipage.

2.6 Utilisation du pilote automatique dans des conditions météorologiques défavorables

L'autopilote est une pièce d'équipement de passerelle souvent utilisée qui aide l'officier de quart à maintenir le cap. Son efficacité dépend toutefois des réglages et des circonstances. On sait, par exemple, qu'il peut y avoir des situations dans lesquelles il n'est pas souhaitable d'utiliser le pilote automatique ou il peut être préférable de gouverner à la main.

Dans le présent événement, même si les ordres permanents du capitaine décrivaient les situations dans lesquelles la conduite devait être transférée de la barre extérieure au pilote automatique, il n'y a eu aucune directive ou discussion concernant certaines situations où l'utilisation du pilote automatique était peu souhaitable. Le deuxième officier a continué à gouverner à l'aide du pilote automatique à mesure que le navire approchait du grain. Par conséquent, bien qu'il ait fini par transférer la gouverne à la manette de commande, ses premières tentatives en vue de changer de cap lorsque le navire a commencé à s'incliner, y compris l'important changement de 20° à 30° tenté, ont été faites avec le pilote automatique. Cependant, comme les réglages étaient préprogrammés, le plus grand angle de gouvernail permis par le pilote automatique était de 5°, ce qui ne permettait pas de modifier rapidement le cap de façon significative.

Une fois que l'angle d'inclinaison du Concordia a dépassé 23°, ce qui marquait le début du renversement, la nature des mécanismes agissant sur le navire et la vitesse à laquelle se sont déroulés les événements subséquents ont probablement écarté toute possibilité qu'une action au gouvernail (que ce soit par pilote automatique ou par conduite au moyen de la manette de commande/conduite manuelle) soit efficace. Néanmoins, il existe plusieurs situations, en navigation, pour lesquelles le pilote automatique n'est pas indiqué et les officiers doivent pouvoir reconnaître de telles situations et passer en temps opportun à la conduite manuelle. De plus, les officiers doivent bien connaître les réglages du pilote automatique afin d'éviter une situation où la réponse du navire diffère de celle désirée, ainsi que pour réduire au minimum les risques pour le navire.

2.7 Enregistrement de la radiobalise de localisation de sinistres

Les divers éléments constituants du SMDSM peuvent servir à indiquer une alerte de détresse à bord d'un navire. Un de ces éléments est le signal provenant d'une RLS. Cependant, depuis ses débuts, le système de RLS a souffert de problèmes de fausse alerte à répétition. Ainsi, pour éviter tout déploiement inutile de ressources SAR, la pratique normale consiste à tenter de vérifier l'authenticité de la situation de détresse. Pour ce faire, on communique soit avec le navire, soit avec le propriétaire ou son représentant.

Dans le présent événement, l'emplacement de la RLS a été confirmé à 15 h 25 min 54 s, le 17 février 2010. Cependant, l'information sur la personne ou l'entreprise avec qui communiquer en cas d'urgence enregistrée en rapport avec la RLS du Concordia était périmée depuis plus de 5 ans. En conséquence, les autorités SAR brésiliennes n'ont pu communiquer avec le propriétaire ou son représentant pour vérifier l'existence possible d'une situation de détresse. En outre, seul un des numéros des 2 terminaux Inmarsat-C du navire était enregistré dans la base de données de l'UIT.

L'enquête n'a pas permis de déterminer l'ampleur des premiers efforts faits par le CCOS du Brésil en vue soit de communiquer avec le navire, soit d'atteindre le numéro d'urgence durant les quelque 17 heures qui ont suivi la confirmation de la position de la RLS. Toutefois, à 8 h 15, le 18 février 2010, après avoir appris que le Concordia avait un lien avec le Canada, le CCOS du Brésil a communiqué avec le CCCOS d'Halifax pour obtenir des renseignements au sujet du navire. À la suite de l'échec des tentatives du CCCOS en vue de communiquer avec le navire, il y a eu entre le CCCOS d'Halifax et les CCOS du Brésil et de Rio une série de conversations qui ont abouti au lancement d'un avion SAR à 17 h ce jour-là. Bien qu'il n'ait pas été possible de déterminer si le fait pour la base de données de l'UIT de contenir des renseignements exacts aurait accéléré le lancement de ressources SAR, toute inexactitude ou insuffisance de l'information sur l'enregistrement d'une RLS est susceptible de retarder les efforts en matière de recherche et de sauvetage en cas d'urgence.

2.8 Recherche et sauvetage

L'objectif premier d'une opération de recherche et de sauvetage consiste à localiser les personnes en détresse, à les récupérer et à les amener à un endroit où elles seront en sécurité, et à faire le nécessaire pour leurs besoins médicaux initiaux ou autres besoins. Bien que cela ne soit pas mentionné expressément dans la Convention SAR, il est entendu que cela nécessite d'insister sur la rapidité d'exécution. Selon le Manuel IAMSARNote de bas de page 99, par exemple :

[traduction]

L'expérience a démontré que les chances de survie des personnes blessées pouvaient diminuer de 80 % durant les 24 premières heures et que celles des personnes indemnes diminuaient rapidement après les 3 premiers jours. À la suite d'un accident, même les personnes indemnes qui sont en apparence physiquement aptes et capables de pensée rationnelle sont souvent incapables d'accomplir des tâches simples, et il est établi qu'elles ont gêné, retardé ou même empêché leur propre sauvetage.

2.8.1 Retard dans le déclenchement d'activités de type détresse

À 12 h 35, le 18 février 2010, soit 21 heures après que le CCOS du Brésil a confirmé la position de la RLS, toutes les tentatives en vue de communiquer avec le Concordia avaient échoué. Le CCCOS d'Halifax ne savait toutefois pas encore très bien quelle était la phase de SAR que le CCOS de Rio avait déclarée, même si la Convention SAR définit explicitement ce genre de scénario comme la phase de détresseNote de bas de page 100.

Selon la Convention SAR, une des mesures à prendre durant la phase de détresse consiste à déterminer la position, le cap et la vitesse des navires qui se trouvent dans la zone de manière à ce que ceux-ci puissent prêter assistance si nécessaire. Pour ce faire, le CCOS du Brésil et celui de Rio comptent sur un système de notification des mouvements des navires connu sous le nom de SISTRAM. Bien que l'enquête n'ait pas permis de déterminer la mesure dans laquelle ce système a été utilisé, 2 points pertinents sont évidents :

Cependant, au moins 3 navires qui avaient été dans la zone plus tôt n'ont pas été avisés par le Brésil. En conséquence, ce n'est qu'à 18 h 54 le 18 février 2010, après que le CCOS de Rio a accepté l'offre du CCCOS d'Halifax de transmettre l'EGC en son nom, que le Hokuetsu Delight et d'autres navires dans la zone ont été informés de l'existence possible d'un sinistre. Vingt-sept heures s'étaient écoulées depuis la première notification par RLS.

2.8.2 Aéronef de recherche et de sauvetage

Il est essentiel de disposer du bon matériel et de savoir en tirer pleinement avantage afin de déterminer l'emplacement des survivants. Le SART, transpondeur radar étanche et autonome qui interagit avec le radar bande X d'un navire ou d'un avion de sauvetage, est un exemple de ce genre de matériel. Le SART peut être activé à bord d'un navire en détresse ou transporté à la suite de l'abandon du navire, et il fournit à la fois le relèvement de position et l'emplacement, ce qui est particulièrement utile la nuit ou lorsque la visibilité est réduite.

Dans le présent événement, il n'a pas été possible de déterminer si l'avion de recherche et de sauvetage qui est arrivé sur les lieux vers 19 h 30 était équipé d'un radar bande X ou si le dispositif était en fonction; peu importe, l'avion n'a émis aucun signal pour activer le SART qui se trouvait à bord du radeau du deuxième officier. Bien que les occupants des radeaux aient pu repérer l'avion et, par la suite, signaler leur position au moyen de fusées éclairantes à parachute, si la visibilité avait été encore plus mauvaise, les chances de découverte auraient pu être considérablement réduites. Il est donc essentiel que tout le matériel conçu pour aider les efforts en matière de recherche et de sauvetage soit accessible et exploité au maximum. Autrement, les chances de découverte, et donc de sauvetage, sont alors réduites.

2.8.3 Transbordement des survivants à une frégate militaire

L'utilité des transferts par hélicoptère durant les opérations de recherche et de sauvetage a été bien documentée au cours des années. Des preuves suffisantes montrent que plusieurs transferts par hélicoptère ont permis de sauver la vie de survivants en mer et contribué à assurer la réussite d'un grand nombre d'activités de recherche et de sauvetage.

Les transbordements ne s'effectuent toutefois pas sans risques et posent souvent certaines difficultés. Une évaluation globale des risques a habituellement lieu avant le transbordement, au cours de laquelle on tient compte à la fois des problèmes médicaux de ceux qui sont dans le besoin et de l'urgence de la situation (p. ex. si les survivants sont dans l'eau). Dans le cas où l'on juge que les chances de réussite sont élevées et que les risques pour l'équipage de conduite et de sauvetage sont acceptables, l'opération va habituellement de l'avant.

La politique du Canada en ce qui concerne les transferts par hélicoptère de recherche et de sauvetage consiste à d'abord évaluer l'état des survivants et à déterminer si l'opération est justifiée. La politique de la Coast Guard des É.-U. (USGC) est semblable, mais elle prévoit également l'utilisation de la réussite de la mission globale (d'un atterrissage à l'autre) comme principale considération. La politique de l'USCG interdit expressément les transferts par hélitreuillage « de complaisance ».

Dans le cadre du présent événement, une fois les survivants rendus à bord des navires de sauvetage, le capitaine du Concordia s'est opposé à leur transbordement au navire militaire brésilien. L'effectif du Concordia se trouvait dans un environnement sécuritaire et n'était plus en danger. Les personnes étaient nourries et réhydratées; elles étaient à l'abri des éléments et ont pu se reposer et dormir après avoir passé 40 heures dans les radeaux. En outre, les capitaines des navires ayant participé au sauvetage avaient accepté d'amener toutes les personnes à leurs prochains ports d'escale respectifs. Malgré cela, et sans qu'il soit tenu compte des objections du capitaine, 12 étudiants ont été transférés par hélicoptère au navire militaire, opération qui a dû être reportée et dont les risques ont été démontrés lorsqu'on a dû réparer le treuil. Bien que le transfert ait été interrompu à la tombée de la nuit, l'enquête n'a pas permis de déterminer la raison pour laquelle il avait été amorcé, surtout qu'il n'a été que partiel et n'a pas permis d'améliorer l'état des survivants. Qui plus est, le seul membre d'équipage (le médecin blessé) qui pourrait avoir profité d'une aide médicale possible à bord de la frégate ne faisait pas partie de ceux qui avaient été inclus dans le transfert.

2.9 Gestion de la sécurité

L'efficacité de la gestion de la sécurité exige des responsables d'un organisme, que celui soit grand ou petit, qu'ils connaissent les risques qu'entraîne l'exploitation de l'organisme, qu'ils aient la compétence nécessaire pour gérer ces risques et qu'ils s'engagent à exploiter l'organisme en toute sécurité. Pour ce faire, l'exploitant d'un navire doit évaluer les risques existants et potentiels, établir les politiques de sécurité et les procédures connexes qui permettront d'atténuer les risques recensés, et offrir un moyen d'évaluer continuellement leur rendement, au moyen de vérifications, de façon à améliorer la sécurité organisationnelle au besoin. L'approche systématique et documentée qui résulte de cette démarche contribue à faire en sorte que les personnes à tous les niveaux d'un organisme possèdent les connaissances et les outils dont elles ont besoin pour gérer les risques efficacement ainsi que l'information nécessaire pour prendre des décisions judicieuses dans toute condition d'exploitation, notamment aussi bien dans le cadre des opérations courantes qu'en cas d'urgence.

Dans le présent événement, au cours de la période précédant le renversement, les grains qui approchaient étaient suivis à la fois visuellement et sur écran radar. Cependant, la compagnie n'avait pas de procédures établies concernant les tactiques de base relatives aux grains et les ordres permanents du capitaine à cet égard devaient être exécutés uniquement quand l'officier voyait un risque pour le navire. Comme le deuxième officier ne considérait pas qu'il existait un risque, les précautions telles que le fait d'appeler le capitaine pour obtenir rapidement des directives, de se tenir près des drisses et des écoutes, de désactiver le pilote automatique en vue de pouvoir naviguer sous le vent promptement ou de fermer toutes les ouvertures étanches aux intempéries sur le pont et les portes étanches sous pont n'ont pas été prises. En outre, l'absence de procédures documentées relatives à la familiarisation des officiers ne laissait à l'organisme aucun moyen de s'assurer que les directives importantes relatives à la stabilité étaient examinées, comprises et utilisées.

En ne fournissant pas de telles procédures, l'équipe de gestion à terre du Concordia n'avait aucun moyen de maintenir des normes de sécurité relatives à ces opérations à bord du navire.

D'un point de vue plus général, le manque d'homogénéité concernant des éléments essentiels pour la sécurité tels que l'obligation de s'attacher au moyen d'un cordage de sécurité et la bonne connaissance des officiers des systèmes du navire était symptomatique du manque de procédures émanant de la direction à terre. De plus, il y avait des problèmes fondamentaux dans les préparatifs d'urgence de l'entreprise, comme l'ont démontré le manque de plans d'urgence, le défaut de tenir à jour l'information exacte d'enregistrement de la RLS et la liste courante des membres de l'équipage.

Bien que le PDG de WIC Bahamas ait rendu visite au navire périodiquement tout au long de l'année, ces visites n'étaient pas organisées de façon à permettre de cerner systématiquement les lacunes possibles en matière de sécurité, pas plus qu'il n'existait de politiques et de procédures permettant de ce faire. En conséquence, il était impossible de compter sur le fait que ces visites permettraient de repérer les lacunes liées à la sécurité à bord du navire.

Le BST a déjà souligné certains problèmes en rapport avec la gestion de la sécurité à bord des voiliers-écoles. À la suite d'un événement qui a eu lieu en 2006 à bord du Picton CastleNote de bas de page 101, le Bureau a constaté que, en l'absence d'une structure efficace de gestion de la sécurité, les conditions et les pratiques dangereuses risquaient de demeurer inconnues et non corrigées. En outre, le Bureau a encouragé Transports Canada « à agir proactivement au sein de l'OMI afin de s'assurer que tous les voiliers-écoles se plient aux exigences des conventions internationales appropriées, tout en reconnaissant leur caractère particulier ».

À l'heure actuelle, le Canada et le R.-U., ainsi que certains autres pays européens, exigent que les organismes exploitant des voiliers-écoles mettent en œuvre un système de gestion de la sécurité. Ce n'est toutefois pas le cas de tous les États du pavillon, notamment le pavillon sous lequel le Concordia était immatriculé, soit celui de la Barbade. Bien que ce soit l'engagement de la part de l'exploitant qui constitue la pierre angulaire de la gestion de la sécurité, les cadres réglementaires offrent effectivement de la motivation et des directives précieuses en ce qui a trait à l'élaboration et à la mise en œuvre d'un système de gestion de la sécurité.

Conséquemment, l'absence d'exigences relatives à l'efficacité des systèmes de gestion de la sécurité fait augmenter la possibilité que des personnes à tous les niveaux d'un organisme ne possèdent pas les connaissances et les outils requis pour gérer le risque efficacement, ou l'information nécessaire pour prendre des décisions judicieuses dans toute condition d'exploitation.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Lorsque le capitaine a transféré le quart au deuxième officier, il ne lui a pas fourni d'instructions qui lui auraient permis de réagir à des changements de conditions métérologiques de manière appropriée et de maintenir la stabilité du navire.
  2. Malgré le fait que les conditions de vent avaient changé au cours des 60 à 75 minutes précédant l'événement et le fait que plusieurs grains étaient surveillés, à la fois visuellement et sur écran radar, le deuxième officier n'a vu aucune menace pour le navire.
  3. Au fur et à mesure de l'augmentation de la vitesse du vent apparent à l'approche du grain, la bande du navire a atteint approximativement 23°, angle qu'elle a conservé pendant environ 2 ou 3 minutes sans que l'équipage prenne de mesures d'atténuation.
  4. En réaction à une autre légère augmentation de la vitesse du vent, qui était peut-être combinée à un changement par rapport à l'horizontale, le navire a commencé à donner de la bande au-delà de 23°, point auquel les mesures prises à la barre pour virer et se placer vent arrière ont été trop tard pour empêcher le navire de gîter assez pour immerger les portes et les autres manches à air du côté sous le vent.
  5. Les roufs avant et arrière n'avaient pas été rendus complètement étanches aux intempéries et, pour cette raison, la capacité du navire de se redresser à partir d'un grand angle d'inclinaison était réduite et la protection contre l'entrée de l'eau était compromise. En conséquence, le cycle d'envahissement par les hauts a progressé jusqu'à ce que le navire finisse par perdre toute stabilité et chavirer.
  6. L'équipe de gestion à terre du Concordia n'a pas fourni de directives concernant la nécessité de bien comprendre le livret de stabilité et les mesures à prendre en cas de grain, ce qui aurait permis de se protéger davantage contre les renversements et les chavirements.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. En l'absence de directives qui traitent de la stabilité d'un voilier en ce qui a trait au plan de voilure et aux conditions environnementales dans lesquelles celui-ci est exploité, il manque aux officiers les principaux renseignements avec lesquels évaluer le risque correspondant pour la sécurité.
  2. En l'absence de formation, il se peut que les officiers d'un voilier ne soient pas en mesure d'interpréter et d'utiliser efficacement les directives essentielles contenues dans le livret de stabilité.
  3. L'absence de prise en compte des préparatifs d'urgence et de l'intervention en cas de scénario de renversement augmente les risques pour un voilier.
  4. Les officiers doivent connaître les réglages du pilote automatique et pouvoir reconnaître des situations de navigation où le fait de diriger le navire au moyen du pilote automatique est à éviter, car cela met inutilement le navire en position de risque.
  5. Toute inexactitude ou insuffisance d'information concernant l'immatriculation d'une radiobalise de localisation de sinistres (RLS) est susceptible de retarder les efforts en matière de recherche et de sauvetage.
  6. En n'avertissant pas immédiatement les navires qui se trouvent dans la zone de l'existence d'un sinistre, il se peut que les ressources de recherche et de sauvetage (SAR) manquent des occasions d'effectuer un sauvetage à temps, ce qui est essentiel pour la survie des personnes en détresse.
  7. Le fait de ne pas utiliser pleinement le matériel conçu pour soutenir les efforts en matière de SAR réduit les chances de découverte et de sauvetage.
  8. Lorsqu'ils n'offrent aucune possibilité d'améliorer les chances de survie, les transferts par hélicoptère peuvent exposer ceux qui y participent à des risques inutiles.
  9. L'absence d'exigences relatives à l'efficacité du système de gestion de la sécurité fait augmenter le risque que les personnes à tous les niveaux d'un organisme ne possèdent pas les connaissances et les outils nécessaires pour gérer les risques efficacement, et l'information nécessaire pour prendre des décisions judicieuses dans toute condition d'exploitation.
  10. Les retards dans les efforts de recherche prolongent la souffrance des survivants (et de leurs proches) et augmentent le degré de danger par suite d'un abandon de navire.

3.3 Autres faits établis

  1. La vitesse du vent à laquelle le navire était confronté au moment du renversement était fort probablement de l'ordre de 25 à 50 nœuds. Bien que le vent était probablement assorti d'une composante verticale, rien n'indique qu'une microrafale est survenue au moment du renversement.
  2. Certains grands navires peuvent comporter un plan de voilure ainsi que des caractéristiques de stabilité qui les rendent vulnérables à des vents d'une vitesse inférieure à 30 nœuds.
  3. Les conditions à bord des radeaux ont été rendues plus difficiles par le manque d'espace de rangement du matériel d'urgence et des problèmes d'écopes, de pompes à pied et de lampes de poche.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada

Le 14 octobre 2010, le BST a publié l'avis de sécurité maritime 06/10. Ce document, Considerations and Precautions Regarding Knockdown of Sailing Vessels, s' adresse à Sail Training International (STI), à l'Association canadienne de voile éducative et à l'American Sail Training Association (ASTA) Note de bas de page 102. On y décrit brièvement les événements liés au naufrage et on y met en évidence les risques associés aux renversements pour les voiliers-écoles. On y mentionne également que les exploitants peuvent souhaiter revoir leurs tactiques et leurs procédures relatives aux grains, ainsi que leurs exercices et l'arrimage du matériel d'urgence, afin de s'assurer de prendre les précautions appropriées à l'avance.

STI a répondu que l'organisme attendrait le rapport final du Bureau sur l'incident avant de faire des commentaires définitifs

4.1.2 Barbados Maritime

À la suite de l'événement, Barbados Maritime (agence exécutive du ministère du Commerce international et du Transport international) a amorcé une enquête.

Barbados Maritime exige maintenant que les navires figurant dans son registre confirment annuellement qu'aucun changement n'a été apporté à la RLS à bord ni à l'information enregistrée dans la base de données appropriée.

4.1.3 Transports Canada

Le 2 mars 2011, Transports Canada (TC) a tenu une réunion avec des intervenants de l'industrie représentant 8 voiliers-écoles. En plus de discussions concernant l'élaboration de normes relatives à des programmes de formation à bord approuvés, TC a donné une présentation sur les dangers des grains dans la mesure où ces derniers ont une incidence sur les voiliers, et sur les mesures d'atténuation des risques à prendre en considération. Tous les participants ont été informés de l'avis de sécurité maritime 06/10 du BST.

Voici les points discutés durant la réunion :

4.2 Mesures à prendre

4.2.1 Directives relatives à la stabilité à l'intention des officiers de voiliers

Par nature, les voiliers dépendent du vent pour acquérir une puissance propulsive. Cependant, le vent est aussi la source d'importantes forces d'inclinaison. À ce titre, l'exploitation sécuritaire d'un voilier-école tel que le Concordia exige la compréhension de la stabilité du navire à de grands angles d'inclinaison ainsi que de l'équilibre entre la force d'inclinaison du vent et la capacité de redressement de la coque en rapport avec toute condition de vent et tout plan de voilure. Ces aspects établissent la distinction entre la stabilité d'un voilier et celle d'un navire à moteur. Le défaut de bien comprendre ces aspects et d'être en mesure d'évaluer la marge de sécurité du navire au fur et à mesure de l'évolution des conditions peut entraîner le dépassement des limites sécuritaires et peut-être mener au renversement, au chavirement et à la perte du navire.

À la suite de l'enquête sur la perte du trois-mâts barque MarquesNote de bas de page 103, en 1987, la Maritime and Coastguard Agency (MCA) du R.-U. a recommandé que des recherches soient effectuées en vue d'élaborer un ensemble d'exigences relatives à la stabilité des voiliers-écoles. Les exigences consécutives aux recherches incluent la prestation de courbes de grainNote de bas de page 104 afin d'évaluer la vulnérabilité d'un navire à l'envahissement par les hauts sous l'influence d'augmentations de la vitesse du vent causées par des rafales ou un grain. Cette information a pour but de fournir aux officiersNote de bas de page 105 des moyens d'évaluer continuellement le risque pour leur navire et de prendre à temps les mesures d'atténuation nécessaires.

Depuis l'adoption de la norme par le R.-U., certains États du pavillon, tels que le Canada, Malte, la Suède et les Bahamas, l'ont aussi adoptée Note de bas de page 106. Cependant, plusieurs autres États du pavillon, tels que les É.-U., la Pologne, les Pays-Bas et l'Australie, tout en exigeant des concepteurs qu'ils procèdent à une première évaluation de la stabilité théorique d'un navire pendant que celui-ci marche à la voile, n'exigent pas qu'on fournisse aux officiers des directives détaillées propres au navire. L'absence de cette exigence signifie que les officiers doivent se fier à des connaissances fondées sur l'expérience et qualitatives au moment d'évaluer le risque. Cette dépendance ne peut toutefois garantir l'existence d'une norme de sécurité uniforme et acceptable dans toute l'industrie en raison des variations possibles à la fois de l'expérience et du niveau de compétence.

Les courbes de grain contenues dans le livret de stabilité du Concordia indiquaient que le navire pouvait résister à une vitesse du vent environ 2 fois supérieure à celle à laquelle il était confronté au cours de l'heure précédant l'événement. N'ayant pas consulté ces directives ou n'en ayant pas été informé, le deuxième officier a poursuivi sa route, même si un grain approchait, sans modifier le plan de voilure ou le cap du navire malgré le fait que l'on sache que les grains sont imprévisibles et qu'ils peuvent comprendre des vents dont la force augmente plusieurs fois. Si les courbes de grain avaient été consultées et que les mesures nécessaires avaient été prises par le capitaine ou le deuxième officier, le plan de voilure aurait probablement été réduit, et le cap, changé considérablement, ce qui aurait réduit le risque de renversement.

Dans l'hypothèse où des directives propres au navire sont fournies, il est essentiel que les officiers aient la compétence nécessaire pour en faire une utilisation efficace. L'enquête a permis de déterminer que le deuxième officier était titulaire d'un brevet de capacité délivré par le R.-U. Cependant, les connaissances en matière de stabilité requises pour obtenir ce brevet sont élémentaires et ne traitent pas de toutes les questions de stabilité, notamment les courbes de grain propres aux voiliers. Ni le capitaine ni le premier officier n'avaient reçu de formation spécifique en rapport avec les courbes de grain présentées dans le livret de stabilité du Concordia.

Le BST a relevé 2 lacunes sur le plan de la sécurité sous-jacentes dans le cadre de son enquête sur cet événement :

4.2.2 Canada

Bien que le Canada ait adopté l'utilisation des courbes de grain dans le cadre de ses normes de stabilité pour les voiliers-écoles Note de bas de page 107, il n'existe actuellement pas de scénario de certification pour l'évaluation de la connaissance, par un officier, de ces normes. Bien que l'on s'attende à ce qu'un tel système de certification soit en place d'ici la fin de 2014, son contenu reste à définir.

Actuellement, il y a 7 voiliers-écoles battant pavillon canadien qui transportent plus de 2500 stagiaires chaque année. Comme le démontre cet événement, si les officiers ne connaissent pas les limites de stabilité de leur navire, des conséquences potentiellement importantes peuvent en découler. Le Bureau recommande donc que :

le ministère des Transports adopte des mesures destinées à faire en sorte que les officiers de voiliers reçoivent une formation appropriée en rapport avec l'utilisation des directives relatives à la stabilité qui doivent se trouver à bord de tout voilier.
Recommandation M11-01 du BST

4.2.3 International

Les bases de données de STI et de Tall Ships America (TSA)Note de bas de page 108 comprennent environ 700 voiliers-écoles exploités dans le monde entier et immatriculés dans plus de 50 pays différents. Selon ces données, les plus importantes flottes nationales (chacune représentant plus de 3 % du total mondial) figurent au Tableau 4.

Tableau 4. Les plus importantes flottes nationales
Pays Flotte nationale %
É.-U. 145 21,0
R.-U. 84 12,2
Pologne 69 10,0
Russie 42 6,1
Pays-Bas 34 4,9
Allemagne 34 4,9
France 30 4,3
Finlande 29 4,2
Norvège 26 3,8
Espagne 26 3,8
Suède 22 3,2
Belgique 21 3,0
Autres 135 18,6

De ces navires, on estime que 16 % sont immatriculés dans des pays qui ont adopté la méthode du R.-U. pour l'évaluation de la stabilité, y compris les courbes de grain, tandis qu'une autre tranche de 37 % sont immatriculés dans des pays qui suivent le modèle des É.-U.

Ces navires transportent des centaines de milliers de personnes par année dans le cadre de voyages dont la durée peut aller d'une journée à plusieurs mois. La majorité de ces personnes sont des stagiaires de différents âges (surtout des jeunes) et compétences (des voyages de formation en voile pour les personnes ayant une incapacité et les aînés sont entrepris). La formation en voile est de plus en plus reconnue pour le potentiel qu'elle a d'inciter les jeunes à faire carrière dans le secteur maritime.

La portée et la composition de l'industrie de la formation en voile sont internationales. Au cours de leur vie utile, les voiliers-écoles peuvent être immatriculés dans différents États. L'équipage est souvent composé de personnes originaires de divers pays, et le navire peut être exploité dans le monde entier. Le Concordia, par exemple, battait le pavillon de la Barbade, appartenait à une société bahamienne, était nolisé par une école canadienne et visitait régulièrement des ports partout dans le monde. Il était commandé par un capitaine américain, les officiers de quart étaient canadiens ou australiens et les officiers ingénieurs, polonais. Les stagiaires provenaient d'un certain nombre de pays, notamment du Canada, du Mexique, de l'Allemagne et des É.-U.

Le Canada possède 7 voiliers-écoles et représente 1,0 % de la flotte mondiale. Toutefois, l'intérêt du Canada dans ce secteur va au-delà des navires immatriculés au Canada, plusieurs stagiaires Canadiens montant à bord de navires immatriculés à l'étranger (comme le Concordia), dans des ports canadiens pour des voyages internationaux.

Les navires commerciaux sont assujettis aux exigences des pays dans lesquels ils sont immatriculés. Chaque État du pavillon peut être signataire de nombreuses conventions internationales qui sont sous l'égide de l'OMI. Les États du pavillon adoptent (et peuvent modifier) ces conventions internationales par des lois détaillées ou par renvoi. Ces conventions ne s'appliquent qu'aux navires en trafic international, bien que les États du pavillon puissent décider de les appliquer à l'échelle nationale. Le contrôle des navires par l'État du port met en cause l'inspection de navires immatriculés à l'étranger par l'administration de l'État du port pour assurer la conformité aux diverses conventions maritimes internationales majeures; des navires non conformes peuvent être retenus.

La majorité des voiliers-écoles, y compris le Concordia, ont une jauge brute inférieure à 500 tonnes de jauge, ce qui représente d'ordinaire la limite la plus basse à partir de laquelle les conventions et les codes internationaux établis s'appliqueraient. Lorsqu'un voilier-école a une jauge brute de plus de 500 tonnes de jauge, la définition de « passager » n'inclut pas « stagiaire », ce qui exclut effectivement le navire des exigences types relatives aux navires à passagers, que ce soit en vertu de l'OMI ou de l'État du pavillon. Bien que la définition de navires spécialisés donnée dans l'édition de 2008 du Code de sécurité pour les navires spécialisés de l'OMI puisse viser les voiliers-écoles, le Code ne contient pas de dispositions qui portent spécialement sur ce type de navire.

Autrement dit, les voiliers-écoles ne sont généralement pas assujettis aux conventions de l'OMI et, en outre, peuvent être exemptés d'une bonne portion du régime de réglementation de l'État du pavillon.

Comme plusieurs de ces navires font partie du patrimoine culturel, on ne peut en assurer la conformité aux règles internationales ou nationales sans en détruire le caractère inhérent. En outre, les modifications requises seraient impossibles à réaliser sur le plan physique ou elles seraient prohibitivement dispendieuses. Un degré élevé de souplesse est nécessaire.

Le secteur de la formation en voile est organisé internationalement sous la forme d'une coalition d'associations nationales (STI). Une autre association internationale est l'European Maritime Heritage (EMH). Toutefois, ce ne sont pas tous les pays ayant des voiliers-écoles qui possèdent une organisation nationale et lorsqu'ils en possèdent une, tous ne sont pas membres de STI ou d'EMH. Ces deux entités mettent l'accent sur le développement du caractère, l'éducation, les courses de grands voiliers et les visites de pays et de ports, ainsi que la conservation du patrimoine culturel.

Cela étant dit, la STI semble s'affirmer comme étant la liaison principale entre les États du pavillon et le secteur de la formation en voile international, en ce qui a trait à la communication et à la dissémination de l'information sur la sécurité et les pratiques exemplairesNote de bas de page 109.

À la lumière des lacunes de sécurité repérées dans le cadre de la présente enquête et étant donné le risque inhérent associé à l'exploitation de voiliers-écoles, le Bureau est préoccupé par le fait qu'il se peut que les officiers de ces navires ne possèdent pas l'information et la formation appropriées dont ils ont besoin pour reconnaître et gérer ce risque. En outre, en l'absence d'une approche coordonnée à l'échelle internationale de la promotion de la sécurité des voiliers-écoles, le Bureau craint que les lacunes cernées puissent continuer à mettre ces navires, les équipages et les stagiaires en danger.

À titre d'État du pavillon et du port faisant autorité, le Canada est bien placé pour prendre une position de chef de file dans la promotion des normes internationales portant sur la prestation de directives en matière de stabilité pour les voiliers-écoles et la formation des officiers à leur utilisation. Cela peut être réalisé par un programme conjoint avec les autorités du R.-U., des É.-U. et autres, et le tout pourrait être soumis à l'OMI et à STI.

Le Bureau recommande par conséquent que :

le ministère des Transports entreprenne des initiatives menant à l'adoption de normes internationales pour les voiliers-écoles relatives à la prestation de directives en matière de stabilité ayant pour objet d'aider les officiers à évaluer le risque de renversement et de chavirement et de former les officiers à l'utilisation de cette information.
Recommandation M11-02 du BST

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A - Plan de voilure

Annexe A. Plan de voilure
Plan de voilure

Annexe B - Aménagement d'ensemble

(Ce document n'existe pas en français)

Annexe B. Aménagement d'ensemble
Aménagement d'ensemble

Annexe C - Zone de l'événement

Annexe C. Zone de l'événement
Zone de l'événement

© Droit de publication réservé à la couronne et/ou droits de bases de données. Reproduit avec l'autorisation du Contrôleur du Service d'édition des publications officielles du Royaume-Uni et du Bureau hydrographique du R.-U.(www.ukho.gov.uk).

Annexe D - Matériel d'urgence

Annexe D. Matériel d'urgence
Matériel d'urgence
Radeau de sauvetage no Capacité Événement Équipage Navire de sauvetage
1 20 personnes Non gonflé
2 20 personnes Gonflé par le capitaine Capitaine
5 professeurs
16 étudiants
Hokuetsu Delight
3 20 personnes Non gonflé
4 20 personnes Gonflé par le capitaine Capitaine en second
Maître d'équipage
Médecin
Cuisinier
3 professeurs
15 étudiants
Hokuetsu Delight
5 20 personnes Non gonflé
6 20 personnes Gonflé par le ou les mécaniciens, embarquement à partir de la poupe par l'entremise d'un bateau de plaisance Premier lieutenant
Chef mécanicien
Deuxième mécanicien
17 étudiants
Crystal Pioneer
7 10 personnes Gonflé par le premier officier , endommagé après gonflement après avoir été battu par les vagues contre le navire, deuxième officier attaché à son radeau de 20 personnes, mais séparé par la suite
8 8 personnes Gonflé par le premier officier 3 étudiantsNote de bas de page 110 Hokuetsu Delight

Annexe E - Carte de la pression à la surface de la mer

Annexe E. Carte de la pression à la surface de la mer
Carte de la pression à la surface de la mer

Carte de la pression au niveau de la mer, publiée le 17 février 2010 à 12 h UTC par le Service de météorologie maritime de la Marine brésilienne. La position approximative du navire à cette heure-là est indiquée.

Annexe F - Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains

(Ce document n'existe pas en français)

Annexe F. Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains
Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains

Les courbes d'angle d'inclinaison stable maximal indiquent la plage d'angles d'inclinaisons moyens ou stables au-delà de laquelle le navire fera l'objet d'un envahissement par les hauts en cas de grain. L'exploitation du navire dans des conditions cycloniques, plus particulièrement au cours des heures d'obscurité, où des grains intenses sont imminents, exige que l'angle d'inclinaison stable maximal recommandé soit réduit, selon la vitesse moyenne du vent apparent conformément aux courbes présentées ci-dessus.

Annexe F. Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains
Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains
Annexe F. Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains
Angle d'inclinaison maximal recommandé pour empêcher l'envahissement par les hauts en cas de rafales et de grains

Example A : Le voilier est barré aux allures portantes et la vitesse du vent apparent soutenu est de 16 nœuds. L'angle de bande moyen est de 15°. Les prévisions et les cumulonimbus laissent entrevoir la possibilité de grains. Les tracés de l'angle de bande et de la vitesse du vent (point A, figure 1) indiquent que le bateau risque de gîter à l'angle d'envahissement par les hauts à des grains de 30 nœuds. Pour être plus à l'abri d'un envahissement par les hauts, à savoir résister à des grains allant jusqu'à 45 nœuds, il faut diminuer la voilure ou arriser pour réduire l'angle de bande moyen à 7° (point A1, figure 1) ou moins.

Exemple B : Le voilier louvoie et la vitesse du vent apparent est de 30 nœuds. L'angle de bande moyen est de 20°. On ne prévoit pas de grains. L'angle de bande est sensiblement inférieur à 24° (angle de bande stable maximal recommandé). Il existe donc une marge de sécurité appropriée contre un envahissement par les hauts en cas de forte rafale. Les tracés des valeurs relatives à la vitesse du vent et à l'angle de bande (point B, figure 1) indiquent aussi que le bateau n'est pas sujet à un envahissement par les hauts en cas de grain, à moins que celui-ci ne frappe à une vitesse supérieure à environ 50 nœuds. Il n'est donc pas nécessaire de diminuer la voilure pour assurer la stabilité du bateau.

Annexe G - Comparaison entre la vitesse du vent apparent et l'angle de bande

Angle d'inclinaison stable (degrés) Vitesse du vent apparent (nœuds)Note de bas de page 111 Remarques
Cs = 2 Cs = 1    
3,5 0 0  
8,5 10,4 13,9
13,5 14,6 19,6  
18,5 17,8 23,9
23,5 20,5 27,5
28,5 23,0 30,9  
28,9 23,2 31,1 Immersion du livet du pont principal
33,5 25,4 34,0
38,5 26,9 36,0 Angle approximatif du bras de levier de redressement maximum
43,5 27,6 37,0 Immersion du bastingage médian (41°)
48,5 27,6 37,0  
53,5 27,1 36,3  
56,5 26,6 35,7 Immersion de la porte de la cuisine
58,5 26,4 35,4 Immersion de la porte du poste d'équipage
3,4 25,3 34,0 Immersion du livet de la passerelle; immersion de la sortie de ventilation sanitaire (65°)
68,5 26,7 35,8 Immersion de la fenêtre de la salle des radios
73,5 37,1 49,8 Immersion de la porte bâbord de la timonerie (74,2°)
78,5 51,1 68,4  
83,5 64,1 85,9  
88,5 119,8 160,5 Évacuation de la timonerie par l'équipage
Annexe G. Comparaison entre la vitesse du vent apparent et l'angle de bande
Comparaison entre la vitesse du vent apparent et l'angle de bande

Annexe H - Renseignements sur le comportement environnemental et du navire

Explication des termes utilisés dans ce tableau :

Période (approx.) Vitesse du navire/Cap Vent réel Vent apparent Inclinaison Notes
De 12 h à 13 h Le capitaine descend à 13 h; O QUAT seul sur le pont Renseignement de l'enquête : 5,5 nœuds à 220° Approximation : 5,5 nœuds à 220° Renseignement de l'enquête : Force 5 /force plus faible, 6, à 1 ou 2 points O de N Approximation: 20 nœuds à 345° Renseignement de l'enquête : de 15 à 18 nœuds à portée large Obtenu au moyen des approximations de la vitesse du navire et du vent réel : 17,4 nœuds à 110° Renseignement de l'enquête : 5° Le calcul de la plage de vitesses du vent apparent pour cette inclinaison est de 6 à 8 nœuds
  • Le navire était soumis à de petits grains depuis 2 jours
  • En début de matinée, le plan de voilure avait été réduit en prévision de conditions de Force 7/8 plus tard dans la journée
  • Équilibrage des voiles pour une portée large – voiles carrées brassées d'un point vers l'avant; grand-voile et voile d'artimon sorties au maximum
  • Le vent se déplaçait vers l'avant depuis quelques jours et on prévoyait qu'il continue de le faire; des grains étaient attendus.
13 h à 14 h 15 Une heure environ avant l'événement—O QUART en charge de la garde Renseignement de l'enquête : 5.5 nœuds à 200 à 220° Approximation : 5,5 nœuds à 210° Renseignement de l'enquête : Force 5; direction du vent non connue Approximation : 20 nœuds à 320° *Voir les notes Renseignement de l'enquête : Jusqu'à 20 nœuds à 80° à 90° Renseignement dérivé : 18,8 nœuds à 94,1° Renseignement de l'enquête : 10° Portée calculée de la vitesse du vent apparent pour cette inclinaison : de 12 à 16 nœuds
  • Grand-voile rentrée et vergues attachées à un autre point (maintenant deux points vers l'avant); cela indique que le vent apparent s'est en fait déplacé vers l'avant.
  • Grain approchant sur le radar, grande largeur sur avant tribord, à une distance de 1,5 à 2 milles
  • Prendre note que l'angle d'inclinaison a augmenté considérablement au cours de l'heure qui vient de s'écouler malgré un changement minimal de la vitesse du vent apparent. Cela peut être imputable au changement de direction du vent et aux difficultés inhérentes à l'obtention des observations du vent et de l'inclinaison, qui sont représentatives d'une période si prolongée.
14 h 20 2 ou 3 minutes – L'étudiant prend une vidéo (57 sec.) montrant les conditions sur le pont et quelques photos. Approximation : 9 nœuds à 210° Approximation : 25 nœuds à 320° Renseignement d'enquête : 23 nœuds Obtenu au moyen des approximations de la vitesse du navire et de la vitesse du vent réel : 23,5 nœuds à 88,9° * Voir les notes Renseignement d'enquête : 23° min La plage calculée des vitesses du vent apparent pour cette inclinaison va de 20 à 28 nœuds. * Voir les notes
  • En analysant les enregistrements vidéo, il a été possible de saisir que l'angle d'inclinaison minimum du navire était de 23° [Voir la photo, ci-dessous].
  • Les enregistrements vidéo montrent que le bord d'attaque et le bord de fuite du faux-foc sont respectivement plein et battant; cela est probablement attribuable à l'effet de déventement du tourmentin. La grand-voile d'étai et la voile principale semblent également pleines, ce qui indique que l'angle du vent apparent équivaut, probablement, au moins, à son barrot ou à son arrière.
  • Voiles carrées pleines, ce qui indique un angle du vent apparent probable équivalant à au moins son barrot ou son arrière [voir la photo ci-dessous]
1423 Début du chavirement Approximation : 9 nœuds à 210° Approximation : 28 nœuds à 310° Renseignement d'enquête : la vitesse du vent commence à augmenter (elle grimpe jusqu'à 27 nœuds) et l'angle apparent diminue Obtenu au moyen des approximations de la vitesse du navire et de la vitesse du vent réel : 27,9 nœuds à 81,5° * Voir les notes. Renseignement d'enquête : Le navire commence à s'incliner; le mouvement est essentiellement continu. La plage calculée des vitesses du vent apparent pour l'inclinaison de 38° à 68° va de 27 à 37 nœuds
  • Alors que le navire s'incline, la vigie du côté bâbord se déplace à la porte du pont pour exprimer ses inquiétudes; à ce moment, le navire se serait incliné à environ 63,5°, alors que le côté bâbord du tablier du pont commençait à entrer sous l'eau.
  • Les renseignements obtenus au cours de l'enquête ont indiqué que les vents n'avaient pas atteint un niveau qui causait de l'inquiétude ou qui faisait en sorte qu'il était impossible de se tenir droit sur le pont. Compte tenu de ces facteurs et des résultats des calculs, il est peu probable que la vitesse des vents excédait largement 40 nœuds.
  • Le deuxième officier a observé l'anémomètre (30 nœuds de 120° à 150°) lorsque le navire était incliné à environ 88°. Il convient de prendre note que l'anémomètre n'est pas considéré comme fiable à cet angle et aussi que le navire peut s'être retourné lorsque la barre a été mise à gauche.
Navire sur les extrémités du barrot Approximation : 0 nœud à 210° * Voir les notes Approximation : 28 nœuds à 310° Renseignement de l'enquête : 30 nœuds à 120° à 150° Obtenu au moyen des approximations de la vitesse du navire et de la vitesse du vent réel : 28 nœuds à 100° * Voir les notes Résultat du calcul : >88° Fondé sur le fait que la porte du pont bâbord se trouvait sous l'eau et que le radar bâbord était sur le point d'être immergé.
  • La fiabilité de l'anémomètre est remise en doute en raison du grand angle d'inclinaison du navire.
  • La barre avait été mise tout à bâbord; en conséquence, le changement de l'angle du vent apparent pourrait être attribué en partie au débordement du navire.

Annexe I - Glossaire

'
minutes
° G 
cap selon le compas gyroscopique
°
degrés
°C
degrés Celsius
ASN
appel sélectif numérique
ASTA
American Sail Training Association
BST
Bureau de la sécurité des transports du Canada
CCOS
Centre de coordination des opérations de sauvetage maritime
ETA
heure d'arrivée estimée
É.-U.
États-Unis
GOES
Geostationary Operational Environmental Satellite
HF
haute fréquence
IAMSAR
Manuel international de recherche et de sauvetage aéronautiques et maritimes
kHz
kilohertz
m
mètre
MAIB
Marine Accident and Investigation Branch (R.-U.)
MCA
Maritime and Coastguard Agency (R.-U.)
MF
ondes hectométriques
MHz
megahertz
MSI
information sur la sécurité maritime
N.-E.
Nouvelle-Écosse
nm
mille nautique
NOAA
National Oceanic and Atmospheric Administration
OMI
Organisation maritime internationale
O Quart
officier de quart
PE
protocole d'entente
RLS
radiobalise de localisation de sinistres
R.-U.
Royaume-Uni
SAR 
recherche et sauvetage
SART
transpondeur de recherche et de sauvetage
SMDSM
Système mondial de détresse et de sécurité en mer
SOLAS
Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer
STCW
Convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille
STI
Sail Training International
TC
Transports Canada
TMG
Temps moyen de Greenwich
TSA
Tall Ships America
UIT
Union internationale des télécommunications
USCG
United States Coast Guard
VHF
très haute fréquence
WIC
West Island College