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Rapport d'enquête ferroviaire R96M0011

Déraillement en voie principale
Canadien National
Point milliaire 6,44, subdivision Sussex
River Glade, Nouveau-Brunswick



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 11 mars 1996, vers 8 h 35, heure normale de l'Atlantique (HNA), 22 wagons du train de marchandises no 311-11-11 du Canadien National (CN) qui faisait route vers l'est ont déraillé près de River Glade (Nouveau-Brunswick) à la hauteur du point milliaire 6,44 de la subdivision Sussex. Seize des wagons qui ont déraillé étaient des wagons-citernes chargés de diverses marchandises dangereuses. Environ 455 litres d'essence ont été répandus d'un wagon-citerne et une petite quantité de butane s'est échappée de deux wagons-citernes sous pression. Par mesure de précaution, les résidents de deux maisons des alentours ont été évacués pendant environ quatre heures. Personne n'a été blessé.

Le Bureau a déterminé qu'une rupture de champignon de rail et d'âme de rail, causée par une fissuration verticale du champignon, a entraîné le déraillement. Une défaillance métallurgique est à l'origine de la fissuration verticale du champignon.

This report is also available in English.

Renseignements de base

L'accident

Le train quitte Saint John (Nouveau-Brunswick), point milliaire 86,9, en direction est à destination de Moncton (Nouveau-Brunswick), point milliaire 0,0. En traversant un passage à niveau public au point milliaire 6,44, les freins d'urgence se déclenchent. Les membres de l'équipe prennent les mesures d'urgence nécessaires, et déterminent que 22 wagons (du 27e au 48e) ont déraillé. Parmi les wagons déraillés, on compte 16 wagons-citernes contenant des marchandises dangereuses, notamment de l'essence, du butane ou du mazout. La paroi des citernes des wagons-citernes CGTX 30413, chargé d'essence, et DCTX 34255, contenant des résidus de butane, est percée et laisse échapper de petites quantités de produit. Trois jours après l'événement, on découvre que le wagon CGTX 63723 (contenant aussi des résidus de butane) fuit.

Le butane est un gaz inflammable incolore dont la pression de vapeur est de 16,3 livres au pouce carré (lb/po2) à 21 degrés Celsius. Il est faiblement odorant et légèrement toxique en cas d'inhalation. L'essence est un liquide transparent, volatil, odorant et inflammable. Elle attaque le système nerveux central, le foie et les reins en cas d'inhalation ou d'absorption par la peau.

La police locale avise immédiatement huit résidents de deux maisons des alentours du danger éventuel constitué par le déraillement et leur demande d'évacuer le secteur. On leur permet de regagner leur domicile environ quatre heures plus tard après que les autorités du CN et du service des incendies de Moncton inspectent les lieux et déterminent qu'il n'y a pas de danger.

On remet sur les rails et déplace huit des wagons contenant des marchandises dangereuses (mazout et essence), et on en déplace six autres après les avoir vidés de leur contenu. Les résidus des deux wagons de butane sont éliminés par combustion et leur citerne est purgée à l'aide d'un gaz inerte (azote). On tient les résidents au courant de la situation avant le transfert des produits. On doit procéder à une autre évacuation trois jours plus tard quand on découvre que le wagon CGTX 63723 fuit. L'origine de la fuite est indéterminée.

Dommages

Environ 400 pieds de voie ont été détruits et quelque 1 000 pieds ont subi des dommages importants. Quatre des wagons qui ont déraillé ont subi de légers dommages et 18 ont été complètement détruits.

Renseignements sur le train

Le train était composé de 3 locomotives, de 27 wagons chargés, de 17 wagons vides et de 9 wagons contenant des résidus. Il mesurait environ 3 200 pieds et pesait quelque 3 500 tonnes.

Particularités de la voie

Dans la subdivision, la voie principale simple comporte une pente descendante de 0,1 p. 100 dans le sens du mouvement au point milliaire 6,44. La vitesse autorisée par l'indicateur est de 50 mi/h pour les trains de marchandises et de 70 mi/h pour les trains de voyageurs. Le trafic ferroviaire est régi par le système de régulation de l'occupation de la voie (ROV) autorisé en vertu du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF) et surveillé par un contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) en poste à Montréal (Québec).

Dans le secteur du déraillement, la voie est constituée de rails éclissés de 100 livres fabriqués en 1950. Ils ont été posés en 1951 sur des selles à double épaulement placées sur des traverses de bois dur traité et sont fixés à toutes les six traverses. Le ballast est constitué de pierre concassée tassée dans les cases entre les traverses et de banquettes de 18 pouces.

Renseignements consignés

Les données recueillies par le consignateur d'événements indiquent que les freins d'urgence se sont déclenchés alors que le train roulait à 42 mi/h, freins desserrés et manette des gaz à la position no 5.

Inspections de la voie

Le superviseur adjoint de la voie a inspecté la voie par véhicule rail-route le 7 mars 1996 et il n'a rien remarqué d'anormal. Ce secteur a été évalué le 19 octobre 1995 à l'aide d'une voiture de contrôle de l'état géométrique de la voie sans qu'aucune anomalie ne soit relevée. Le rail a été contrôlé le 22 novembre 1995 par voiture d'auscultation des rails aux ultrasons et aucune défaillance n'a été découverte au point milliaire 6,44.

Renseignements sur le lieu de l'événement

Après le déraillement, on a découvert qu'il manquait environ 18 pieds du rail nord au passage à niveau du point milliaire 6,44. Le rail nord était constitué d'un rail court d'environ 16 pieds de longueur fixé entre le platelage du passage à niveau et éclissé du côté est à deux sections de 39 pieds. On a trouvé enfouies dans le ballast du côté est du passage à niveau des pièces de rail brisé provenant vraisemblablement d'un endroit situé juste à l'ouest du passage à niveau et à l'ouest de l'éclisse. Une inspection visuelle des pièces de rail et du tronçon de rail resté en place a révélé que le champignon s'était rompu du côté intérieur et s'était subséquemment détaché du rail. La rupture ne s'était pas encore propagée jusqu'à la table de roulement.

Essais des rails

À la suite d'un déraillement survenu en 1990, au cours duquel le rail s'était rompu entre le platelage d'un passage à niveau (R90S0420), le BST a recommandé que :

Le ministère des Transports exige que les compagnies ferroviaires sous juridiction fédérale mettent sur pied un programme d'inspection des rails aux passages à niveau et qu'elles gèrent des dossiers sur les résultats des inspections pour analyser les tendances.
(R92-25, publiée en février 1993)

Le CN confirme qu'il exige désormais que les entrepreneurs effectuent des essais manuels des rails aux endroits où les sondes de roues n'entrent pas en contact avec le rail aux passages à niveau.

Au sein du Chemin de fer Canadien Pacifique, on ne favorise pas l'utilisation de l'équipement ultrasonique portatif pour les essais manuels comme solution de rechange aux voitures de contrôle à cause du temps requis pour faire de tels essais (15 minutes environ) et du danger que représente pour les personnes l'essai manuel des rails aux passages à niveau. On a abandonné l'usage de calibres acoustiques portatifs pour faire les essais des rails aux passages à niveau parce que ces essais étaient moins efficaces que ceux effectués par les voitures de contrôle. En outre, la qualité des essais effectués par les appareils actuels dépend exclusivement de la vigilance de l'opérateur puisque les sondes manuelles ne fournissent pas d'enregistrement des inspections pour évaluation subséquente.

Transports Canada a passé en revue les procédures d'essais des rails et évalué les programmes d'inspection des compagnies ferroviaires. Les compagnies ferroviaires de réglementation fédérale remettent des rapports récapitulatifs sur les défaillances de rail à Transports Canada, et ces rapports sont considérés comme étant adéquats aux fins de contrôle de la sécurité.

Transports Canada est en train de revoir l'efficacité des différentes méthodes d'essais électroniques des rails à relever les défaillances de rails aux passages à niveau et a l'intention de prendre des mesures correctives s'il s'avère que les techniques d'essais en question sont inadéquates.

Essais et recherche

Des morceaux du rail nord rompu ont été envoyés à Montréal (Québec), au laboratoire de CANAC International Inc. - Technologies ferroviaires pour être analysés. On a pu déterminer à la suite des analyses que le rail s'est rompu en raison d'une fissure verticale du champignon qui s'est propagée à l'intérieur du champignon jusqu'à la jonction entre le champignon et l'âme. La fissure a ensuite changé de direction et s'est propagée longitudinalement le long de la jonction. La fissure verticale du champignon s'est amorcée dans une zone d'inclusions linéaires non métalliques qui étaient présentes dans le rail depuis sa fabrication. L'analyse a aussi révélé que l'usure verticale du champignon mesurait 5 mm. Au CN, la limite critique d'usure des champignons de rail pour les rails de 100 livres est de 7 mm.

Wagons citernes de catégorie 112J

Les wagons-citernes DCTX 34255 et CGTX 63723 ont été lourdement endommagés au cours du déraillement et présentaient tous deux des fuites de butane. Les deux wagons ont été construits suivant la spécification DOT 112J340W. Le wagon DCTX 34255, sur lequel on a découvert la première fuite, avait une fente minuscule entre la traverse pivot et le bout «B» du wagon. Le wagon CGTX 63723 a été vérifié immédiatement après le déraillement pour voir s'il ne fuyait pas et aucune fuite n'a été constatée. Ce wagon a été l'un des derniers à être récupéré et il est resté immobilisé sur le lieu du déraillement pendant plusieurs jours. Avant de le récupérer, on l'a encore une fois vérifié et cette fois on a découvert une fuite. Après avoir purgé la citerne, on a enlevé l'enveloppe de la citerne et découvert une série de fissures en étoile au fond de la paroi de la citerne au milieu du wagon. La partie fissurée a été retirée et envoyée au Laboratoire technique du BST pour être analysée.

L'analyse du Laboratoire technique du BST (LP 57/96) a révélé que les fissures de la paroi de la citerne étaient le résultat d'une rupture fragile qui s'était amorcée au coin du support de fixation du tuyau de vidange, à l'endroit où le support est soudé à la citerne. Le support et le tuyau de vidange étaient désalignés à un tel point qu'avec le temps, ils se sont déformés. Les efforts engendrés par cette déformation ont été dégagés, en grande partie, à la suite de la rupture et de la déformation de la tôle de la paroi de la citerne.

Le matériau de la paroi de la citerne, de l'acier AAR-M128 (acier 128), satisfaisait aux exigences en ce qui a trait à la composition chimique mais, étant de la catégorie des aciers à grain moyen, ne satisfaisait pas aux exigences des structures à grain fin. (Les aciers à grain fin résistent mieux aux ruptures fragiles que les aciers à grain moyen ou à gros grain.) Les essais d'absorption d'énergie Charpy V ont révélé que la tôle de la paroi de la citerne n'enregistrait que des valeurs de 3 à 4 pieds-livres à une température de moins 45,6 degrés Celsius, comparativement aux exigences actuelles qui sont de 10 à 15 pieds-livres. Le rapport du Laboratoire technique du BST fait aussi remarquer que l'essai Charpy V n'était pas obligatoire à l'époque de la construction du wagon. Il conclut donc que l'effort de traction imposé au moment du déraillement a causé la rupture.

Le wagon CGTX 63723 est l'un des 25 wagons construits en 1965 dans le cadre du certificat de fabrication no 7466 de la General American Transportation Corporation, de Chicago (Illinois). Il était initialement désigné «wagon GATX» et il a reçu son identification actuelle quand il a été réaffecté et mis en service au Canada. Les 25 wagons en question ont été construits selon la spécification ICC 112A340W et ont été plus tard modifiés en rattrapage selon la spécification DOT 112J340W (par l'ajout d'une enveloppe protectrice et d'isolant). Un autre wagon du même groupe, le CGTX 63712, chargé de propane, s'est rompu à peu près au même endroit de la caisse, le 10 janvier 1982, lors d'un incident survenu au point milliaire 84,7 de la subdivision Rivers du CN (dossier 31385.3918). La rupture de la citerne avait causé l'allumage du chargement et la création d'une boule de feu d'environ 600 pieds de diamètre au niveau du sol. Des fragments de wagon avaient été projetés à près de 250 pieds de la voie.

Les wagons-citernes de catégorie 112J servent surtout au transport sous pression du gaz de pétrole liquéfié (GPL) et de l'ammoniac anhydre. Les citernes de ces wagons sont isolées par une chemise de céramique recouverte par une enveloppe extérieure en acier et les wagons sont munis d'attelages à double plateau et de boucliers protecteurs. Les dispositifs de chargement comme les robinets et les vannes sont protégés par un dôme pour éviter qu'ils ne soient endommagés en cas de renversement. Plusieurs wagons chargés de GPL ont subi des chocs importants lors du déraillement mais leurs boucliers protecteurs ont tenu le coup. Depuis le 1er janvier 1989, on exige que la tête et la paroi des wagons-citernes sous pression soient construites en acier normalisé ASTM 516 ou TC128 et que, s'ils sont appelés à être utilisés par temps froid, le matériau satisfasse à des exigences de 10 à 15 pieds-livres à moins 45,6 degrés Celsius lors des essais d'absorption d'énergie Charpy V. Les wagons doivent être construits conformément aux normes de l'Association of American Railroads (AAR).

Wagons-citernes de catégorie 111A

Le wagon CGTX 30413 répondait aux spécifications minimales de la norme DOT/CTC 111A pour les wagons-citernes. Les wagons-citernes construits en vertu de cette norme n'offrent pas le même degré de protection contre les fuites de produit que les wagons-citernes construits suivant les normes DOT/CTC 105, 112 ou 114. L'essence que contenait la citerne du wagon en question fuyait par un trou de 1/4 de pouce dans la paroi à environ 10 pieds du bout «B» du wagon. La déchirure, de forme elliptique, avait environ 3 pouces de profondeur et 12 pouces de longueur. La plaque d'extrémité du bout «B» avait subi un choc et était renfoncée. Ce renfoncement mesurait environ 12 pouces de diamètre et 3/4 de pouce de profondeur. Le bouclier protecteur était intact.

La paroi de la citerne du wagon ACFX 95068, un wagon de catégorie 111A, spécification minimale, qui contenait des résidus d'acide sulfurique, était parsemée de petites bosses et raclée à plusieurs endroits, mais il n'y a pas eu de perforations. Les couvercles des accessoires et autres dispositifs de chargement et de déchargement ont cependant été arrachés lors du déraillement, mais il n'y a pas eu de fuite de produit à cause de la position dans laquelle le wagon s'est retrouvé après le déraillement.

Il est bien connu que les wagons-citernes de catégorie 111A sont sujets à laisser fuir leur contenu en cas de déraillement et de choc. On continue tout de même à transporter de nombreux liquides toxiques et volatils dans ces wagons.

Les boucliers protecteurs de plusieurs wagons de GPL ont subi des dommages importants à la suite de l'impact mais ils n'ont pas été percés.

Conditions météorologiques

Le temps était clair avec des vents légers de l'ouest. La température était de moins huit degrés Celsius.

Analyse

Le train était exploité conformément aux normes de sécurité du gouvernement et aux procédures de la compagnie ferroviaire.

Le déraillement s'est produit lorsque le rail nord s'est rompu sous le train à la hauteur du point milliaire 6,44. Le champignon s'est détaché de l'âme du rail à la suite d'une fissuration verticale du champignon qui s'est amorcée dans une zone d'inclusions non métalliques présentes dans le rail depuis sa fabrication.

Ni la fissuration verticale du champignon ni la séparation du champignon et de l'âme n'ont été relevées lors de la dernière inspection aux ultrasons à cet endroit, quatre mois avant le déraillement. Il semble que les inclusions linéaires qui existaient avant le déraillement étaient fermées et n'ont pu être détectées par les appareils d'auscultation des rails.

À la suite de la recommandation R92-25 du BST, un projet conjoint visant à faire l'essai des rails et à mettre au point une nouvelle technologie d'inspection des rails a été mis sur pied par le Centre de développement des transports en collaboration avec le Canadien National, le Chemin de fer Canadien Pacifique, la Tektrand International Inc., Canac International Inc. et Transports Canada. Le projet s'intéresse surtout aux questions suivantes : la qualité du matériel et de la technologie d'essai, les méthodes de collecte de données et les procédés d'analyse, et les technologies de rechange pour l'amélioration des essais des rails. Transports Canada a par ailleurs déterminé que les technologies d'essais actuelles étaient les meilleures disponibles à ce moment-ci et que toute nouvelle technologie mise sur pied ferait l'objet d'un examen approfondi.

La fissure verticale du champignon ne s'était pas propagée jusqu'à la surface du champignon et n'aurait pas été visible lorsque la voie a été inspectée en véhicule rail-route par l'équipe d'entretien quatre jours avant le déraillement.

L'analyse métallurgique de la citerne du wagon CGTX 63723 a indiqué qu'elle ne satisfaisait pas aux dernières exigences en matière d'absorption d'énergie selon les essais de résilience Charpy V, mais que ces exigences n'étaient pas en vigueur lorsque le wagon a été construit en 1965. Il est à remarquer que si la citerne avait été construite en acier à grain fin et avait satisfait aux dernières exigences en matière d'essais de résilience Charpy V, elle aurait été plus résistante aux ruptures fragiles.

Il s'agit du deuxième wagon d'un parc initial de 25 wagons à se rompre à peu près au même endroit inattendu au milieu du wagon. Les deux wagons ont été construits d'acier qui, essentiellement, est fragile par temps froid. Puisque l'acier qui a servi à construire les wagons ne satisfaisait pas aux critères en matière de grains fins en vigueur à l'époque, il se peut qu'il y ait jusqu'à 23 autres wagons du même parc qui aient été construits avec de l'acier ayant les mêmes caractéristiques. Même si la norme exigeait l'utilisation d'acier à grain fin, elle n'exigeait pas que l'on vérifie l'acier pour s'assurer qu'il satisfasse à cette norme.

Dans un document de l'AAR sur l'évaluation des dommages causés aux wagons-citernes par un déraillement, on pose comme hypothèse que tous les wagons-citernes en acier 128 ont été construits avec de l'acier à grain fin. Comme le présent rapport l'indique, il se peut que cette hypothèse ne soit pas valide.

Puisque les wagons-citernes de la catégorie 111A sont vulnérables aux déversements de produits lors d'un accident, le Bureau est préoccupé par le fait que le transport de certaines marchandises dangereuses dans ces wagons puisse poser des risques pour les personnes et l'environnement dans les environs immédiats du lieu d'un accident. On pourrait diminuer les risques en réduisant la possibilité d'un déversement de produit en améliorant la conception des dispositifs de protection des wagons, surtout au niveau des accessoires qui font saillie et qui sont susceptibles d'être arrachés lors d'un accident.

Transports Canada a reconnu la nécessité de restreindre davantage le transport des produits chimiques les plus dangereux et toxiques aux wagons-citernes plus solides et a pris des mesures réglementaires pour régler la question. Une norme révisée sur les wagons-citernes (CAN/CGSB 43.147-94) qui restreint davantage l'utilisation des wagons-citernes de catégorie 111A a été mise en application. La nouvelle norme interdit le transport de 80 autres marchandises dans ces wagons.

L'intervention opportune de l'équipe d'intervention d'urgence a permis d'éviter que les résidents immédiats ne soient exposés à un plus grand danger.

Conclusions

Faits établis

  1. Le train était exploité conformément aux normes de sécurité du gouvernement et aux procédures de la compagnie ferroviaire.
  2. Le train a déraillé quand un rail s'est rompu au point milliaire 6,44 lorsque le champignon du rail s'est détaché de l'âme à la suite d'une fissuration verticale du champignon. Cette défaillance a été causée par la présence d'inclusions non métalliques qui n'avaient pas été détectées auparavant.
  3. La voiture d'auscultation des rails aux ultrasons n'a pas détecté la fissuration verticale du champignon au cours d'essais effectués le 22 novembre 1995 parce que, selon toute vraisemblance, la défaillance n'avait pas suffisamment progressé pour être détectée.
  4. Une rupture fragile s'est produite dans la paroi du wagon-citerne CGTX 63723 en raison des efforts de traction créés par le choc violent au moment du déraillement.
  5. La paroi de la citerne, constituée d'acier 128, satisfaisait aux normes appropriées en matière de composition chimique et de résistance à la rupture, mais était faite d'acier à grain moyen, et non à grain fin comme prescrit. Elle ne satisfaisait pas aux exigences actuelles en matière d'absorption d'énergie selon l'essai de résilience Charpy V, mais ces exigences n'étaient pas en vigueur lorsque le wagon a été construit.
  6. Si la citerne avait été construite en acier à grain fin et avait satisfait aux dernières exigences en matière d'essai Charpy V, elle aurait été plus résistante aux ruptures fragiles.
  7. Les critères de l'AAR relatifs à l'évaluation des dommages subis par les wagons-citernes ne s'appliquent qu'aux wagons-citernes construits en acier 128 après le 1er janvier 1989 parce que seuls les wagons-citernes sous pression construits après cette date doivent être en acier dit «normalisé».
  8. Il se peut que la déformation du support de fixation à l'intérieur de la citerne du wagon CGTX 63723 ait créé des efforts à mesure que la déformation progressait. Ces efforts ont pu contribué à la rupture de la citerne. Il se peut donc que les 23 autres wagons construits en vertu du même certificat de construction comportent le même problème.
  9. Les wagons-citernes de catégorie 111A ont plus tendance de fuir à la suite d'un déraillement ou d'un choc que les wagons-citernes sous pression, et pourtant on permet encore que de nombreux liquides toxiques et volatils soient transportés dans des wagons-citernes qui ne répondent qu'aux normes minimales de catégorie 111A.
  10. L'intervention opportune de l'équipe d'intervention d'urgence a permis d'éviter que les résidants immédiats ne soient exposés à un plus grand danger.

Cause

Une rupture de champignon de rail et d'âme de rail, causée par une fissuration verticale du champignon, a entraîné le déraillement. Une défaillance métallurgique est à l'origine de la fissuration verticale du champignon.

Mesures de sécurité

Mesures prises

La CGTX a entrepris d'inspecter tous les wagons-jumeaux et de vérifier l'intégrité des tuyaux de vidange et des supports de fixation pour s'assurer que leur alignement réponde aux normes actuelles. D'autres mesures conformément à l'Annexe R de la norme AAR M-1002 seront prises pour réduire la possibilité que des efforts excessifs soient générés aux points de soudure qui relient les supports de fixation à la citerne.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.